Quand le redac' chef m'a demandé de rédiger une petite bafouille d'anniversaire, j'étais dans le brouillard. Ce brouillard que connaisse bien les adorateurs de bières belges trop fortes. Un embouteillage de neurones. A la fois plein d'envie et pas trop non plus de fulgurances d'ex-scribe. Bref, un "crash" à la Cronenberg, avec de la tôle émotionnelle froissée et des vies perdues. Mais sans partie de jambes en l'air dans une Twingo déglinguée.

Si j'ai laissé tombé la chronique de disque, c'est que contrairement au patron, j'avais l'impression de me répéter, d'user les mêmes ressorts, de me répéter, d'user les mêmes néologismes, de me répéter, d'encenser mécaniquement les groupes, de me répéter, et rien que pour cela, je souhaite lui rendre hommage. Autant d'abnégation, d'enthousiasme et de constance, c'est digne d'une mission herculéenne ou d'un concours de meilleur mangeur de fricadelles à Hazebrouck. Ça révèle de l'inhumain ou de Michael Jordan. Un humain pas tout à fait comme les autres. Sauf qu'Oli, c'est plutôt Scottie Pipeen. Un mec qui cimente et bétonne les talents qu'il rencontre au quotidien pour former ce que va être le W-Fenec. Il pense collectif, pas comme Jordan, chantre de l'exploit individuel et des batailles d'égo. Le résultat, c'est un putain de webzine qui existe depuis quelques décennies. Sans aucune contrepartie financière, juste de la passion et de l'huile de coude. Et ça, c'est fort comme du chorizo cuit à la poêle pour agrémenter un plat assez fade à la base. Sur l'échelle de Scoville et du volontariat, ça mérite un 12/10.

Aboutir à une belle découverte dans le milieu du webzinat musical est un processus long et laborieux, parfois usant. Ce qui explique le turnover perpétuel des chroniqueurs. Il faut lire les 40 mails reçus au quotidien, écouter les propositions, espérer recevoir un support matériel, réécouter les propositions intéressantes pour valider les premières impressions et effectivement peut-être que ça va aboutir à un article. Et aussi assurer le SAV des groupes qui envoient un mail 3 jours après la réception de l'objet promotionnel pour savoir si ça va aboutir à une chronique ou si ça va aboutir à une chronique. Ce n'est pas une coquille, un envoi doit aboutir à une chronique. Bref, gérer les égos. C'est une sorte de chemin de croix. Mais en guise de croix, c'est plutôt un carton de CDs promotionnels qui s'accumulent. Bref, c'est herculéen. Et en plus, tes potes te maudissent quand tu déménages et ils ne viennent plus quand tu les sollicites de nouveau si par bonheur, tu connais un rebondissement géographique dans ta vie.

Dans un édito antédiluvien, j'avais par le passé déjà formulé mon engagement militant pour la Malterie, un lieu culturel situé à Lille. Et j'y suis toujours, impliqué comme au premier bisou. Ça a fourni une sorte de méthadone sonore et relationnelle dès ma désaffection pour la fonction de chroniqueur. L'être humain est soi-disant un animal social selon un philosophe bien français. Un chroniqueur est une espèce qui vit majoritairement via son laptop et parfois via quelques incursions sociales via les concerts. Un organisateur de concert palpe de suite les conséquences de son travail : l'affluence ou le manque d'affluence, le contentement ou le mécontentement des musiciens... bref, c'est de l'immédiat, du réel...

La Malterie reste une structure en sursis malgré sa visibilité. Martine Aubry souhaitant toujours filer la plupart des subventions à des projets culturels plus clinquants et plus générateurs de voix électorales. Mais la malterie existe toujours, tu peux aller checker la prog' surlamalterie.com.

Et histoire d'être corporate, je fais parti de Mohamed Dali. On organise des concerts à la malterie depuis 20 ans.... En 20 ans, nous avons eu de belles réussites : Dalëk, Zu, Dylan Carlson (de Earth), Dewaere, Disappears, The Ex, Joe Lally... Tu peux nous suivre sur Facebook (Mohamed Dali) si tu habites aux alentours de Lille. Et dans les mois à venir : Putan Club, Poutre, Echoplain, That Green, A Band Called E, Impure Wilhelmina, Scrtch, Sooma...

Et par dessus tout, longue vie au W-Fenec, et à ces petits rats de laboratoires et humains de l'ombre qui font vivre et galvaniser tes oreilles au quotidien.