Ceci n'est pas la chronique de l'album mais l'édito du Mag #39.

tool - Fear inoculum En mettant autant de temps entre deux albums, chaque sortie de Tool marque forcément son époque et une évolution dans le monde de la musique. Au début des années 90', le groupe reste assez méconnu, le clip de "Sober" marque les esprits mais c'est avec l'album Aenima que le groupe s'impose au monde comme un monstre à part. Le CD vit alors son apogée, 80% de la vente de musique passant par ce support, Tool se démarque avec une édition originale qui joue avec l'artwork et le boîtier. Le W-Fenec n'existe pas encore, on ne fait notre apparition qu'au début de l'année 1998, déjà fans de Tool mais encore étrangers au monde du disque. A cette époque, les labels travaillent à fond leurs sorties, les chargés de promotion sont surtout des passionnés et les liens avec la presse sont très étroits, entre les stages et les CDD, les maisons de disques s'échangent presque leur personnel, tout le monde connaît tout le monde ou presque, de toute façon, il n'existe que quelques mags papier et les webzines sérieux se comptent sur les doigts d'une main. On reçoit donc le magnifique Lateralus au printemps 2001, le 15 mai pour être exact, quelques jours avant sa sortie, si je m'en souviens, c'est que c'est le jour de mon anniversaire... Un très beau cadeau surtout que le web de 2001 ne permet pas encore de télécharger rapidement et a plutôt une mauvaise image, le combat Metallica / Napster s'étalant partout. Je suis invité au concert du Zenith de Paris, c'est la première fois que je vis Tool en live, c'est encore un très bon souvenir. En 2002, le groupe repasse par Paris et petit miracle, le W-Fenec est un des 4 medias français à pouvoir l'interviewer. L'équipe qui assure la promotion aime le zine et nous le rend plus que bien. Ils prennent même quelques risques pour nous car on déclare être un mag papier, le management américain exigeant uniquement de gros poissons. Le même management qui fait la chasse aux photos volées lors du concert et demande aux photographes accrédités le premier quart d'heure de quitter la salle du concert ensuite. Hérésie corrigée par l'équipe du label qui prête ses badges all access aux quelques photographes pour les faire rentrer après la prise des clichés. Les gars sont fans et se démènent pour d'autres fans. Le CD est encore à la mode en 2006 quand sort 10,000 days mais il faut déjà faire plus qu'un beau digipak, Tool joue la carte de la vision stéréoscopique avec des lunettes intégrées, c'est rare, c'est bizarre mais l'objet vaut le détour et de mémoire, il n'était pas vendu plus cher qu'un album classique.

13 ans plus tard, le monde a changé, la valse des labels a concentré la puissance au sein de quelques majors qui se battent pour être écoutées sur internet, repressent des vinyles et se désengagent massivement de la promotion, laissant à des sous-traitants cette tâche qui demande beaucoup de travail pour des résultats pas toujours visibles. L'équipe des années 2000 a disparu, RCA a repris les rênes, les gars gèrent Black M, Kyo, Christophe Willem, Miley Cyrus, Shakira, Britney Spears, Justin Timberlake, Mariah Carrey, Michael Jackson, des dizaines d'autres et Tool. Aucun n'a besoin de la presse indé pour exister, même si on peut le comprendre, on aurait aimé que l'équipe d'Emmanuel Perrot (ou lui-même) nous le dise par retour de mail ou en décrochant ne serait-ce qu'une fois leur téléphone (nous rappeler étant encore plus compliqué), après tout, c'est leur boulot, non ? A leur décharge, Tool semble aussi se foutre un peu de la gueule du monde (et donc pas seulement de celle de Taylor Swift ou Justin Bieber) avec un objet OVNIesque à 80 €uros qui semble un peu profiter de leur position divine. Encore qu'une version promo "basique" nous irait bien quand même. Bref, pour le moment, on ne donnera pas d'avis sur Fear inoculum parce qu'on se doit de d'abord parler des albums que certains font l'effort de vouloir faire connaître, qu'ils soient eux aussi des poids lourds (Cult of Luna, Korn, Slipknot...) ou bien, pour l'heure, des poids plumes (Show Me Your Universe, Polar Moon, Leahtan, Rouge Gorge Rouge...).

Dans 10 ans, si son contrat est terminé, Tool n'aura plus besoin d'un label, il pourra directement traiter avec les plate-forme de téléchargement et les maquiladoras puis Amazon. De notre côté, on espère qu'il restera des gens comme nous, de simples intermédiaires mais des vrais passionnés.