Auteur de Disruption, disque essentiel de l'année 2022 malheureusement absent des bacs en France, Vulgaires Machins est de retour dans l'arène. Et malgré quelques lenteurs pour établir la connexion, Guillaume et Marie-Eve ont répondu à nos questions... pour notre plus grand plaisir !
Salut les Vulgaires Machins et merci pour le temps accordé pour cette interview. Vous revenez sur nos platines, douze ans après Requiem pour les sourds, votre précédent album studio. Que s'est-il passé pour vous durant ce laps de temps ?
Guillaume : Salut Gui ! Avec plaisir. En fait, on a fait un album acoustique après Requiem. Ensuite, Marie-Eve s'est lancée en solo et a fait paraître deux albums : Bleu nelson en 2016 et Multicolore en 2019. J'ai sorti deux albums aussi : D'étoiles, de pluie et de cendres en 2014 et Disparition en 2018, puis un album EP live en studio en 2020.
La mise en sommeil, puisque vous n'avez jamais parlé de split, de vos activités en 2012 était-elle due à une certaine lassitude ou l'envie de faire autre chose, vous qui jouiez ensemble depuis 1995 avec un line-up identique ? À ce moment-là, dans vos esprits, il était clair que les Vulgaires Machins rejoueraient ensemble ?
Guillaume : On a cessé nos activités en 2012 pour plusieurs raisons mais surtout à cause d'une crainte de se répéter et l'envie de faire d'autres expériences, travailler avec d'autres musiciens. On avait aucune idée de combien de temps la pause allait durer mais, quelque part en nous, on savait qu'on referait de la musique ensemble un jour.
Disruption vient de sortir au Québec. Votre retour, dans un premier temps en live, en 2019 était-il conditionné à l'écriture et l'enregistrement d'un nouveau disque ? L'épidémie de COVID a-t-elle ralenti et influencé le processus, ou le confinement vous a-t-il laissé plus de temps pour créer ?
Guillaume : En fait, le retour sur scène était motivé par le plaisir de jouer, tout simplement. C'est à ce moment-là qu'on a décidé de faire un nouvel album. Personne dans le groupe n'avait envie de continuer à faire des spectacles appuyés que par des vieux morceaux. On s'est donc mis à l'écriture à peine un mois avant la pandémie. Ce contexte-là a surtout ralenti le processus je dirais. C'était impossible de répéter et les nombreux confinements nous ont forcé à cesser l'écriture ou ralentir grandement, à plusieurs reprises.
Disruption est composé de 11 titres, dont quasiment la moitié sont chantés et écrits en "lead" par Marie-Ève. Peut-on parler de désinhibition ? Comment s'est passé l'équilibre d'écriture pour cet album avec Guillaume ?
Guillaume : La méthode consistait à aller jusqu'au bout de nos idées avant de les partager. On a donc écrit chacun de notre côté pendant près d'un an avant d'écouter nos chansons respectives. Ça s'est avéré une méthode très productive et pertinente. On s'est retrouvé au bout du processus avec beaucoup de matériel et de pistes intéressantes.
Marie-Eve : L'équilibre s'est fait à partir du moment où on a travaillé ensemble sur nos propres compositions. Et comme personne ne savait que nous travaillions sur un nouvel album, on a pu l'écrire sans attente d'aucunes parts. On se disait que si on n'était pas content, on ne le sortirais pas et c'est tout. Ça enlève énormément de pression.
Ce disque, qui porte bien son nom, est musicalement moins frontal, plus diversifié en termes de styles et de sonorités. Question simple mais ouverte : pourquoi ?
Guillaume : Ça ne s'est pas fait de façon très consciente. On a amené les chansons à terme de façon instinctive. Ça s'est fait naturellement. Sans cadre stricte au niveau des sonorités, des arrangements ou des structures. Par rapport aux textes, il y a eu beaucoup d'échanges et de réflexions pour trouver un ton qui soit cohérent avec l'endroit où on se trouve dans nos vies et la raison d'être du groupe. La pertinence d'un retour. Le message qu'on voulait passer s'est concrétisé dans un ton beaucoup moins accusateur que par le passé et surtout beaucoup plus personnel.
Les textes de Disruption semblent plus personnels que ceux des précédents albums. Ces textes sont aussi assez sombres : on y parle de dépression, de nihilisme, de narcissisme. Peut-on parler d'introspection ?
Guillaume : Oui, absolument. Tout a démarré en mettant les sentiments qu'on éprouve au centre de la réflexion. Dans un désir d'échange entre nous et avec le public.
Maintenant que ce disque est sorti, quels sont les prochains plans pour les Vulgaires Machins ?
Guillaume : L'été qui vient sera chargé au niveau des festivals au Québec. On va poursuivre la tournée à l'automne et sans doute faire quelques concerts en France. On en est à coordonner tout cela en ce moment même.
Vulgaires Machins est très appréciée en France et vous avez beaucoup joué ici avec Burning Heads, Tagada Jones, Dead Pop Club, Flying Donuts dont Benjamin se souvient d'une bonne anecdote de carburant ! Une sortie française de l'album est-elle prévue ? Le groupe reviendra-t-il jouer dans l'hexagone ? J'ai entendu parler d'une sortie française avec tournée, mais depuis, plus rien...
Marie-Eve : Hahaha ! C'est le mot "gazole" qui nous avait mélangés !
Guillaume : Nous travaillons là-dessus en ce moment, à suivre...
Suivez-vous l'actualité rock en France ? Quels sont les groupes de chez nous qui ont vos faveurs en 2022 ?
Guillaume : Nous continuons à suivre la carrière de nos amis français, Guérilla Poubelle, Pit Samprass, Panic Monster... En ce moment, nous écoutons en boucle le dernier album de Not Scientists Staring at the sun.
Quel est l'état du rock dans votre province ? Quels sont les groupes que vous pourriez nous conseiller ?
Marie-Eve : Le rock se porte super bien j'trouve. En ce moment, nous écoutons Les Shirleys et son album More is more, un trio power féminin de punk rock/indie et aussi le dernier de Mudie : Bad vibration qui vient de paraître. Deux groupes très mélodieux et bon !
Notre mag en ligne, auparavant webzine à part entière, fête ses 25 ans. En regardant dans le rétroviseur, à une période où, en France tout du moins, la démocratisation d'Internet et de la musique digitale en était à ses balbutiements, et quand le monde était moins pire qu'aujourd'hui, êtes-vous nostalgiques de cette époque ?
Guillaume : Je ne sais pas si c'est de la nostalgie. Il y a clairement des aspects positifs au partage de la musique en ligne, l'accessibilité notamment. En revanche, je trouve plutôt triste de constater la vitesse avec laquelle la musique est consommée et le peu d'attention qu'on accorde aux albums qui sortent...
Merci Guillaume, Marie-Eve, Michelle de Costume Records et Marie-Pier Létourneau.
Photo : Gaëlle Leroyer.
Publié dans le Mag #55