Villa Fantôme Autant évoquer et balayer le sujet tout de suite, comme ça, c'est fait. Villa Fantôme est le nouveau projet de Pierre et Manu, respectivement chanteur et batteur de ce grand orchestre qu'était La Ruda, abandonnant en cours de route son Salska d'origine. Une formation qui a fait chavirer nombre cœurs de rockeurs et qui, en presque vingt ans, a produit dix albums et joué plus de 1.000 concerts. Un véritable groupe de scène que j'avais vraiment plaisir à voir et à entendre, même si j'ai quelque peu lâché l'affaire pendant la deuxième partie de la discographie du club des huit. Mais revenons à nos moutons. C'est en 2019 et après un summer reunion tour de La Ruda que nos deux amis décident de relancer la machine. En s'entourant de quatre mercenaires du rocksteady (et membres de Orange Blossom et Tarmac Rodéo), ils donnent naissance à Villa Fantôme, en hommage au "Ghost town" des Specials. On prend les mêmes influences (directement héritées des Clash, des Ruts et autres sucreries anglaises) et on recommence comme il y a... trente ans à se faire plaisir. Et comme il n'y a pas de fumée sans feu, le premier confinement a permis de développer ce nouveau projet et de proposer Villa Fantôme, premier album chez l'activiste et surtout indépendant label At(h)ome.

Mes bons souvenirs passés à écouter et voir l'ancienne bande de Pierre et Manu sont réapparus comme par enchantement une fois les premières mesures de "Fantômes dans les rues fantômes" (qui m'a filé de bons frissons à la première écoute et qui me procure toujours de bonnes sensations au gré des multiples écoutes). Les fans de La Ruda retrouveront avec plaisir la voix si attachante de Pierre (dans un flow moins rapide et donc plus compréhensible quand il s'agit de disséquer les bons mots de Pierrot) et le beat toujours impeccable de Manu. Les oiseaux n'ont rien perdu de leur superbe, et les titres rythmés ("Des messies pour les lanternes", "Sur mon blouson") côtoient les morceaux plus feutrés et syncopés ("Série noire", "Dieu n'est pas bon danseur", "Veux-tu savoir", l'atypique mais magnifique "Autopsie d'un songe") dans un déluge de clavier/cuivre abrasifs ("Rivière sans retour") ou dans une succession de riffs "in your face" ("Sentimentale n'est pas la foule", "Question de contrôle"). Les textes sont toujours aussi subtils, héritages des bons films à la Audiard, et renforcent le capital sympathie de cette formation que j'ai déjà hâte de voir exploser les scènes de la France entière.

Pas besoin de faire un long discours. Tu sais donc à quoi t'attendre avec ce disque réussi, entraînant et fort intelligent. Villa Fantôme, c'est noir comme un polar, mais clarteux comme les cieux. Le Roi Ruda est mort, vive le Roi Villa (Fantôme).