Derrière V13 se cachent en réalité quatre musiciens : Laurent Carrier (chant), Olivier Duclos (guitare), Julien Luciano (basse), Nicolas Bernollin (batterie), originaires de la région Cannoise et adeptes d'un rock alternatif et expérimental flirtant dangereusement avec les frontières de la noise et chanté en français. Quelque part entre Oxbow, Unsane et Virago, le groupe joue ensemble 2004 et sort son premier effort en 2006 : Puzzle. Trois ans plus tard, le groupe publie Overlook Hotel, produit par Serge Morattel à Genève en Suisse (Knut, Shora, The Evpatoria Report...) et masterisé par Nick Zampiello au New Alliance East Studio à Cambridge - Massachusset aux USA (Converge, Isis, Torche...).
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V13 / Chronique LP > Traqueur
C'est un doux euphémisme de te dire, cher lecteur (lectrice aussi évidemment), que ce nouvel album de V13 était attendu au tournant, tant Overlook hotel avait marqué profondément les esprits. D'autant plus au tournant que le groupe a annoncé assez tôt qu'ils iraient bosser à Chicago avec Steve Albini (Nirvana, Neurosis, Breeders, Les Thugs, Cloud Nothings...). De quoi susciter une attente encore plus pressante donc...
Dès les premières écoutes, pas de surprise, le groupe continuer d'exploser (oui, j'ai bien écrit "exploser") le sillon noise-rock chanté en français et c'est ouvertement ce qui en fait un groupe à part... "Ricardo Klemente" est ce qu'on l'on appelle une introduction chaude-bouillante : les paroles cinglantes et le chant sont toujours aussi pertinents et derrière, les musiciens se débattent comme des damnés pour faire vivre les vagues de décibels enflammées, une tension qui joue à cache-cache avec les nerfs de l'auditeur. Bref, un morceau qui figure déjà parmi mes favoris de V13. Coté son, c'est parfait évidemment et saillant comme vous n'avez pas idée, le boulot d'Albini sied parfaitement à la bande-son à la fois aride et généreuse de V13 : toutes les petites nervures sont désormais visibles et appréciables là ou sur Overlook Hotel, les nuances de la musique avait tendance à être dissimulées par un son sous testostérones.
La suite ? C'est un groupe qui maitrise son sujet au quart de tour, le songwriting ne s'essoufflera pas. La basse granuleuse de "Personne ne m'attend" captive dès les premiers instants, l'évolution furieuse du morceau catapulte l'auditeur dans des sphères virulentes et jouissives. Et que dire de "21 grammes" ou la voix de Laurent prend des accents très Cantat période Tostaky (il ne s'agit absolument pas d'une tare pour votre serviteur...), reste que ce titre figure d'emblée comme très marquant pour un des premiers titres apaisés de l'album. Le reste de Traqueur, on va te laisser le découvrir mais sache qu'il n'y a rien à jeter. Le groupe réussit l'exploit de proposer un album sensiblement diffèrent d'Overlook hotel, on ressent plus d'urgence et d'envie d'en découdre dans Traqueur, tout en gardant une marge de progression assez flagrante. On a là affaire à un sacré album et à un groupe sur-talentueux. Bandant de A à Z. Encore une fois. Puis cette pochette en mode Anton Corbjin... Dernier argument massue. Au revoir.
V13 / Chronique LP > Overlook Hotel
Congestion électrique, explosions de décibels, une véritable éruption sonique sortant d'on ne sait trop où mais qui, entre geysers de lave en fusion et nuages de poussière, nous arrive en pleine figure sans prévenir : V13 se met en position et s'apprête à jouer les snipers d'élite ("Renegat"). Dans la ligne de mire, un auditeur qui ne sait pas encore qu'il est la cible d'un groupe capable de le terrasser d'une seule rafale de riffs hardcore rock. Noise sulfurique, textes dans la langue de Molière (soit, mais en anglais, ça sonnerait quand même mieux...), une énergie qui foudroie quiconque se dresse sur le passage des Cannois et un message "Tu as choisis d'entrer". Le morceau annonce la couleur, le reste, ça se passera entre l'auditeur et le groupe.
Crescendo déchaîné, déflagration métallique ("Black sheep"), accélération brutalement punkoïde et pas Tokyoïdes (Note : on s'excuse d'avance pour le bide qu'occasionnera fatalement cette vanne foireuse...), le groupe explose les limites habituelles du rock noisy et en fait quelque chose d'incroyablement intense, impulsif et ravageur. Exaltant dans son approche rythmique, kaléidoscopique dès lors qu'il s'agit de parler des styles : entre math-rock, noise et hardcore dopé au punk sursaturé, V13 enchaîne les titres à un tempo effréné afin d'accélérer les pulsations cardiaques de l'auditeur. Ruptures de rythme, accélération soudaine, le groupe semble prendre un malin plaisir à écrire des titres parfois déconstruits ("Alexandra"), d'autres fois complètement bétonné (l'excellent et percutant "Gouache"). Overlook Hotel devant donc être la parfaite synthèse des deux... quelque part entre Baxters, Sleeppers et Virago.
Après 5 titres (sur 10), le groupe nous a déjà acquis à sa cause et c'est là qu'il décide de dévoiler un autre versant de sa musique. Moins frontale, plus allégée et toute aussi vénéneuse. Quelques son triturés, un faux rythme mid-tempo appelant à une poussée de tension forcément fatale ("Pygmalion" puis "Chute libre), les Cannois prennent le risque de décevoir ("Mais ils ne renforcent pas [...] imbécile") tout en gardant la main pour revenir aux fondamentaux de ce qui fait la "V13's touch" sur le morceau suivant (l'éponyme "Overlook hotel" et son final apocalyptique). On l'aura compris, on a ici un groupe qui aime se mettre en danger, parce que c'est là l'essence même de sa musique, dans son urgence comme son raffinement, ses fulgurances électriques et sa verve infusée dans le rock, le metal et la noise. Classe.