Vous fêtez cette année les 32 ans de Therapy?. As-tu l'impression d'être un survivant après tout ce que vous avez traversé ?
Dans un sens oui. Mais je n'ai eu cette perception qu'il y a deux, trois ans. Nos racines punk/hardcore nous ont considérablement aidés à tenir. On a été un groupe underground pendant tellement longtemps avant Nurse et Troublegum que lorsque nous sommes redevenus underground, cela n'a pas été douloureux. Ce qui n'est pas le cas des groupes qui avaient signé sur des majors après quelques mois à peine d'existence. Eux n'ont pas supporté descendre d'un ou de plusieurs crans. Cependant, le business de la musique est devenu une catastrophe ces deux dernières années, sans oublier que des musiciens que l'on admirait sont morts. "Le succès, c'est la survie (Success is survival)", c'est ce qu'a expliqué Leonard Cohen dans un documentaire quand on lui a demandé de définir le succès. On a nommé une de nos chansons de Cleave à partir de cette citation. Je crois qu'elle résume bien qui nous sommes.
Cela a-t-il été difficile pour toi de lire ce livre et de renouer avec tous ces souvenirs ? Certains sont-ils plus douloureux que d'autres ?
Il y a seulement deux passages qui sont compliqués à mes yeux. Le reste ne me pose aucun problème. Le premier est l'enregistrement d'Infernal love en 1995. Je n'avais jamais ressenti autant de pression dans ma vie que pour cet album. A l'époque, on tournait sans relâche dans le monde entier grâce au carton de Troublegum et on me faisait sentir qu'il fallait absolument que le disque suivant soit un succès. Je n'arrivais plus à dormir et les relations avec notre batteur, Fyfe Ewing, étaient très compliquées. On ne s'entendait plus du tout. Cette session Infernal love a été horrible. Mon second grand regret concerne l'album Shameless en 2001 enregistré à Seattle avec Jack Endino. Notre batteur de l'époque Graham (Hopkins) ne voulait plus être dans le groupe. Cet enregistrement a été douloureux et frustrant. Pas à cause de Jack Endino mais à cause de l'ambiance dans le groupe. Lire ces passages a fait remonter de très mauvais souvenirs. Si je pouvais revenir dans le temps et changer quelque chose dans l'histoire de Therapy?, cela serait ces deux moments.
Il est vrai que vous avez eu pas mal de problèmes de batteur depuis vos débuts. C'est le syndrome Spinal Tap ?
Oui (rires). Cela a été difficile car notre premier batteur Fyfe était notre ami et il avait un jeu vraiment singulier. C'était un batteur formidable. Quand Fyfe est parti, le batteur suivant Graham a toujours souffert de la comparaison. Il n'en parlait pas mais cela a été difficile pour lui. D'autant qu'il était irlandais comme Fyfe. Tout le monde lui disait "tu es bon, mais pas autant que Fyfe". Psychologiquement, cela a créé pas mal de problèmes. Keith de 3 Colours Red nous a ensuite rejoint. Paix à son âme, il a fini par se tuer avec l'alcool. Aujourd'hui, on a le meilleur batteur que l'on a jamais eu, Neil (Cooper). Fyfe aura toujours une place à part car il a contribué aux disques les plus fondateurs de Therapy?. Mais Neil Cooper a un impact similaire. Ils se connaissaient à l'époque. Je n'aimerais pas être batteur pour Therapy? et devoir succéder à Fyfe Ewing et Neil Cooper, deux des meilleurs batteurs des années 90.
Tu sembles regretter la manière dont vous vous êtes séparés avec Fyfe et le fait que vous ne vous soyez jamais reparlé depuis.
Oui, je regrette aujourd'hui. Sur le moment, on n'en pouvait plus l'un de l'autre. Ce n'était plus possible de continuer. Un jour il m'a appelé en disant "je ne veux plus tourner, je veux quitter le groupe". On s'est parlés comme on ne s'était pas parlés depuis très longtemps et je lui ai souhaité bonne chance en le remerciant d'avoir tant apporté à Therapy?. Ce n'est que plus tard que je me suis dit qu'il aurait été mieux que cette conversation ait lieu en face à face autour d'un café plutôt qu'au téléphone. Mais il n'y a aucune animosité. Je sais qu'il est en contact avec notre management pour les histoires de publishing. Il n'y a jamais eu de soucis entre eux. On est heureux aujourd'hui en tant que Therapy? et lui est heureux dans ce qu'il fait. C'est facile aujourd'hui de se dire que l'on aurait dû faire autrement.
Dans la bio, tu racontes que, enfant, tu étais terrifié par les punks...
Oui. A l'époque mon père travaillait pour les pneus Michelin et il avait ramené un journal qui parlait des punks. Il y avait une photo et l'article disait que ces types avaient des lames de rasoirs, des couteaux et des chaînes. Je trouvais cela effrayant. Un peu plus tard, on est allé en vacances sur la côte Nord-Est de l'Angleterre. Je devais avoir 12 ans. Dans cette ville, il y avait beaucoup de jeunes appartenant à des gangs avec les cheveux verts et des blousons. Je flippais (rires). Beaucoup d'entre avaient des t-shirts des Sex Pistols. Je me souviens que mon petit frère et moi jouions au flipper dans une salle de jeux quand on a entendu "Pretty vacant". Quand on a appris que c'était les Sex Pistols, on a passé le reste de l'après-midi à se balader en criant "Pretty vacant" avec l'accent anglais. Ces mêmes vacances, je suis tombé sur Never mind the bollocks dans la vitrine d'un disquaire. Mon père me l'a acheté. Cela a été mon premier disque de punk.
On a tendance à oublier à quel point il était difficile d'être dans un groupe de rock en Irlande du Nord à la fin des années 80, d'autant plus avec un catholique et un protestant pour membres.
Politiquement, c'était compliqué. Notre groupe était effectivement constitué d'un protestant, d'un catholique et d'un batteur avec des parents mixtes. On se fichait de ça. La plupart de ceux de notre génération voulaient passer à autre chose et en avaient marre de la violence. Mais notre premier local de répétition était situé dans une propriété tenue par des pro british pro protestant. Pour avoir les clefs, il était impossible de les éviter. Etant protestant de naissance, et non pas par choix, j'y allais. Michael (McKeegan, basse) était catholique. Si ces types l'avaient appris, je ne sais pas ce qu'il se serait passé. Mais certainement quelque chose de dramatique. Il y avait aussi de nombreux endroits où l'on ne pouvait pas traîner. On est tous d'origine ouvrière, on a grandi dans des quartiers difficiles et politiques. C'est ce qui nous a fait détester la politique. Les premières années de Therapy?, on n'évoquait jamais la politique en Irlande du Nord dans nos paroles. C'était trop dangereux. Cela peut paraître fou aujourd'hui mais si à l'époque j'avais critiqué dans un fanzine de punk un groupe paramilitaire protestant, ce groupe m'aurait retrouvé ou aurait trouvé l'adresse de mes parents et les conséquences auraient été terribles. Si on avait dit que l'on n'aimait pas l'I.R.A, il y aurait aussi eu des conséquences. Ce n'est qu'après l'accord du Vendredi Saint en 1998 que la situation a commencé à s'améliorer. Ce que les gens oublient aussi, c'est qu'il y avait une frontière difficile en Irlande. On jouait beaucoup en République d'Irlande à nos débuts. Quand on se retrouvait face à l'armée anglaise à la frontière, il nous faisait vider tout le camion, démonter tout le matériel, la moindre pédale, le moindre ampli pour être certains que l'on n'ait pas d'armes ou d'explosifs. Ces années-là, beaucoup d'armes passaient la frontière. L'armée anglaise nous insultait régulièrement. Les soldats nous disaient "regardez vos cheveux longs, vous avez l'air débiles, votre groupe ira nulle part". On était malheureusement habitués à ces fouilles et à ce traitement. Je suis né en 1965. Je ne connaissais rien d'autre. On avait des détecteurs de métaux dans les magasins à cause des attentats. La première fois que je suis allé en Angleterre, j'étais rentré dans une boutique en levant les bras comme si on allait me fouiller. Ma mère m'a alors expliqué qu'il n'y avait rien de tel ici. Je ne comprenais pas. C'était choquant en sortant de l'île d'Irlande de constater que l'on ne te fouillait pas quand tu allais faire tes courses.
Therapy? est finalement devenu un symbole générationnel en ayant en son sein un protestant et un catholique. Vous symbolisiez ce qu'allait devenir l'Irlande quelques années plus tard.
Dans un sens oui. Dans le punk, on nous disait tout le temps "Pourquoi vous n'écrivez pas sur l'armée anglaise ? Ou sur la corruption du gouvernement irlandais ?". D'autres groupes l'ont fait, les politiciens sont censés le faire. On a tous nos points de vue politiques mais notre prise de position politique était de montrer au monde entier que les catholiques et les protestants ne se détestent pas. On vivait ensemble, on répétait ensemble, on composait ensemble, on tournait ensemble, on dormait ensemble. Comment peut-on dire plus efficacement que ce que l'on voyait à la télé, ce n'était pas qui nous sommes.
Parlons un peu musique. A vos débuts, vous vous êtes retrouvés avec des groupes comme Senseless Things, Mega City Four, Ned's Atomic Dustbin. Il semble que vos influences à tous étaient plus américaines qu'anglaises. Vous étiez finalement plus proche dans votre son de Bad Brains, Fugazi, Sonic Youth de ce qui se faisait alors en punk au Royaume-Uni.
Je pense que c'est une question de génération. J'avais le même âge que les Senseless Things ou Mega City Four. On a grandi avec les Sex Pistols, les Damned, Buzzcocks, les Undertones... Tous ces groupes avaient des chansons et des mélodies. Mon frère cadet lui a grandi avec Discharge, Extreme Noise Terror, Crass. Quand je me suis mis à faire de la musique, je découvrais Hüsker Dü, les premiers Lemonheads. J'adore Discharge et Napalm Death, mais comme on a grandi avec les Undertones et les Buzzcocks, aussi hardcore et noise que l'on pouvait être, on restait attachés aux mélodies tandis que la génération d'après a été plus abrasive.
A vos débuts, vous avez ouvert pour Fugazi. Quels souvenirs en gardes-tu ?
C'était génial. On adorait Minor Threat et Fugazi. C'était un rêve de pouvoir jouer avec eux. On est d'abord allé les voir à Belfast en tant que fans puis on a joué avec eux à Dublin. J'aime Ian McKaye pour les mêmes raisons que j'aime Henry Rollins. On a tourné avec le Rollins Band aux Etats-Unis des années plus tard. Ce qui m'avait marqué c'est que Ian McKaye et Henry Rollins te regardent dans les yeux quand ils te parlent. Je trouvais cela sain et rassurant. Beaucoup de groupes de cette époque développaient ce côté post Morrissey shoegaze. Quand tu les approchais, ils se la pétaient artistes et avaient un côté dédaigneux. Ian McKaye lui te parlait en te regardant dans les yeux comme un être humain ordinaire. Cela m'a profondément marqué.
De qui avez-vous le plus appris à vos débuts ?
De Fugazi justement. Je me souviens que l'on avait notre setlist de six, sept morceaux scotchée sur le sol tandis que les Fugazi se regardaient comme un groupe de jazz, changeaient d'enchaînement tous les soirs, rallongeaient certains passages s'ils en avaient envie. On s'en est inspiré. On a commencé à rallonger l'intro de "Neck freak" qui est sur Nurse pour imiter Fugazi. Puis la manière dont ils interagissaient avec le public nous a servi d'exemple. Ils étaient gentils avec tout le monde et en même temps arrêtaient le concert s'il y avait des connards qui blessaient les autres. On était les mecs bizarres de Belfast. On ne ressemblait pas à des rockstars. On n'avait rien de similaire avec Slash ou Alice Cooper. Mais on ressemblait à Fugazi dans le sens où on avait cette normalité avec nos habits de tous les jours.
Vu que tu parles de look, dans le livre on apprend qu'à plusieurs reprises, vos labels ont voulu changer votre image selon les modes du moment.
Oui. C'était assez étrange. Quand on a signé en major chez A&M, ils savaient qui on était. Puis j'ai signé alors que je n'avais pas les cheveux longs. Mais je les ai laissés pousser et quand je les ai coupés, cela a été un gros problème. Spécialement pour les Américains. "Mais qu'est-ce qu'il a foutu ce type ?" a été leur réaction. Quand Green Day a explosé, on avait déjà sorti le clip de "Screamager" mais ils voulaient que l'on en fasse un autre et que je me rase la barbe. Pour être honnête avec les gens d'A&M, ils ont beaucoup travaillé pour que l'on vende nos disques. Par contre, ils commentaient beaucoup trop notre look. La raison, c'est que je ne ressemble pas au chanteur d'un groupe. Je ne suis pas séduisant comme certains chanteurs peuvent l'être et je ne suis pas étrange comme un Marilyn Manson. Quand un de nos disques ne fonctionnait pas assez, les labels se disaient : "c'est certainement à cause du look de ce type. Qu'est-ce que l'on peut changer ?". Stéphane du magazine Rage m'avait raconté qu'un jour il avait été dans une réunion d'A&M en France et qu'on lui avait dit : "Therapy? ne pourra pas vendre plus à cause de son chanteur".
Troublegum a tout changé pour vous. Penses-tu que ce disque aurait eu le même succès sans Nevermind de Nirvana ? Therapy? a -t-il profité de cet engouement grunge ?
Oui. Je suis conscient de la raison qui a poussé une major à nous signer. On avait déjà sorti un disque et tourné avant que l'on entende parler de Nirvana. On les appréciait. Après la sortie de Nevermind, des quantités de labels se sont mis à nous courir après. On savait pourquoi ils voulaient nous signer. Nous n'étions pas stupides. Il y avait une vraie explosion de la musique à guitare que cela soit avec Fugazi, Nirvana, Sonic Youth, les Melvins, Mudhoney... Mais dès le début, on a fait comprendre que nous n'étions pas un groupe de grunge. Ce qui ne les a pas empêché de chercher à nous vendre comme tel. Quand on a signé, dans chaque pays, les majors nous envoyaient leurs stagiaires ou de jeunes employés qui portaient des t-shirts Hüsker Dü, Replacements, Monster Magnet, Soundgarden, Butthole Surfers et qui étaient très cools avec nous. Puis une fois que Troublegum a explosé, on s'est retrouvé avec des types en bombers Janet Jackson. Une fois que l'on a commencé à vendre des disques, ce sont les personnes haut placées des labels qui venaient nous voir et c'est là que les critiques sur notre look sont arrivées. On se retrouvait dans le viseur de ceux qui vendaient Janet Jackson, Bryan Adams ou Sting.
Au milieu des années 90, vous représentiez en quelque sorte l'anti britpop avec les Wildhearts ou encore Terrorvision.
Quand la britpop est arrivée, c'était un peu comme le Brexit. Les medias ne pouvaient pas juste dire, ces groupes sont du classic rock à l'ancienne et écrivent de bonnes chansons. L'approche anglaise a été de dire "La britpop c'est le futur de la musique et tout ce qui possède des grosses guitares et trop de poils sur la figure appartient au passé". On allait dans les festivals quand la britpop était la mode et les journalistes avaient la coupe au bol et les lunettes à la Oasis. On leur disait "je ne comprends pas, l'année dernière, vous aviez tous des t-shirts Nine Inch Nails, qu'est-ce qu'il se passe ?". La britpop a monopolisé la culture anglaise. On sortait alors l'album Infernal love dans la précipitation. Le directeur artistique de A&M nous disait "Il faut faire vite. Dans peu de temps plus personne n'écoutera de groupes à guitares. La britpop est le futur". Ce qui était bien sûr un avis de merde puisque peu de temps après Green Day a débarqué et est devenu le plus gros groupe de la planète avec The Offspring tandis qu'AC/DC sortait son plus gros album depuis des années.
Qu'as-tu fait de ton premier gros chèque de royautés après le carton de Troublegum ?
Le premier vrai chèque que l'on a eu a été pour l'album Nurse en 1992. Je m'étais acheté une voiture, une petite Jeep, et une Fender Stratocaster parce que je n'avais jamais pu m'en acheter une avant. Puis une enceinte Marshall. Le reste, je l'ai mis à la banque. J'étais jeune, j'aimais faire la fête et je me suis dit que si je ne plaçais pas cet argent, j'allais le dépenser dans mes excès (rires).
Puisque tu parles d'excès, le livre ne cache pas tes problèmes d'alcool et de drogue. A une époque, il semblait que tu étais incapable de fonctionner sans.
Oui. La pire période a été Infernal love. Notamment parce que je suis tombé dans les amphétamines et la cocaine. L'alcool a toujours fait partie de ma culture. Depuis un jeune âge, je buvais. C'était qui j'étais. Mais une fois que j'ai compris que les amphétamines me permettaient de boire encore plus longtemps, j'ai foncé. Mais on n'avait accès qu'à du vin et de la bière. Ce n'est qu'une fois que le groupe a commencé à fonctionner que l'on a eu accès aux alcools forts notamment la vodka. Puis est arrivé un point où j'étais incapable de monter sur scène sans avoir bu au moins cinq bières. Puis c'est devenu cinq bières et de la coke. Puis je prenais encore de la cocaine quand j'avais des jours off ou des jours d'interview pour effacer ma gueule de bois. C'est devenu un enfer. C'était incontrôlable sur Infernal love. Je ne savais pas comment m'en sortir. Je pensais que si j'arrêtais la drogue et l'alcool, je serais mal à l'aise et surtout en manque d'inspiration et en manque de confiance. Alors j'ai continué. Sur la tournée qui a suivi Infernal love, il m'en fallait toujours plus pour monter sur scène. C'était de la merde absolue. Je me mentais comme le font les addicts. Je me persuadais que j'étais incapable de faire de la musique sans être défoncé. Alors que c'était l'inverse.
Qu'est ce qui t'a permis de sortir de cette spirale autodestructrice ?
J'ai fini par prendre conscience que la drogue me freinait. Entre Infernal love et Suicide pact - you first, soit pendant quatre ans, mon jeu de guitare n'a pas évolué. Ma voix aussi était désastreuse et mes idées rares. Ce sont la drogue et l'alcool qui me paralysaient. Je me souviens être revenu d'une longue tournée américaine et de m'être retrouvé chez moi à Dublin où je résidais à l'époque sans une goutte d'alcool ou la moindre drogue. Epuisé, je me suis couché et j'ai dormi 24 heures d'affilée. Je tremblais, j'étais en manque, j'avais des hallucinations. Un ami est venu me voir en me mettant au défi de ne pas prendre de bière ou de drogue et de voir où cela me mènerait. J'ai passé deux semaines chez moi à regarder des films puis à renouer avec ma famille sans alcool ou drogue. Au bout d'un moment, j'ai pris conscience que je n'en avais pas besoin. Puis qu'il était agréable de me lever le matin sans me détester.
Plus les années passent, plus Therapy? est accepté par le public metal. On vous retrouve dans des magazines de metal, à l'affiche de festival de metal alors que vous n'êtes pas du tout un groupe de metal. Comment expliques-tu cela ?
Oui c'est marrant. Il y a deux ans on a joué à Bloodstock, le plus gros festival de metal du Royaume-Uni. On était placé au milieu de l'affiche. Tout le monde avait les cheveux longs et ressemblait à Zakk Wylde. Quand on a joué, les plus jeunes se sont exclamés "Mais qui sont ces types ?" avant de se dire "Mais je connais cette chanson, celle-là aussi...". Les vieux eux nous disaient qu'ils ne nous avaient pas écouté depuis des années mais qu'ils seraient là au prochain concert. Ce qui est bien avec les concerts de metal, c'est l'ouverture d'esprit. On pourrait croire que tout est dans le look mais en réalité ce n'est pas le cas. Comme les punks, ils te jugent non pas à ton look mais à ce que tu donnes sur scène. On aime jouer pour la scène metal.
Et vous avez quand même repris un titre de Black Sabbath avec Ozzy au chant.
Oui. Les gens oublient ça (rires). C'était dingue.
Comment était-ce en 1994 d'enregistrer "Iron man" avec Ozzy ?
J'ai grandi en écoutant du punk mais aussi du hard rock via mes potes. J'aimais Iron Maiden et les premiers Black Sabbath. Pour Michael, le bassiste, c'était l'inverse. Il a grandi sur le metal mais a découvert le punk par ses amis. Lui adule Ozzy au plus haut point. C'est un Dieu pour lui. On a rencontré Ozzy à Los Angeles où l'on devait enregistrer cette reprise avec Terry Date. Entrer dans cette pièce et entendre Ozzy nous dire "Hello, je suis Ozzy, ravi de vous rencontrer" nous a sidéré. Michael était paralysé (rires). C'était vraiment drôle. Ozzy a été super. Il lui a fallu que deux prises pour enregistrer la chanson. La première prise était bonne mais comme il portait tous ces bracelets en metal, on les entendait cliqueter dans le micro (rires). Il les a retirés et en une prise supplémentaire, c'était dans la boite. On était stupéfaits mais il nous a dit "Cela fait à peine 25 ans que je chante ce titre" (rires). Il a vraiment été sympa et drôle.
Dans le livre, tu évoques le festival Monsters Of Rock à Donington au milieu des années 90 où la mode était de balancer des bouteilles remplies de pisse. C'était un signe d'affection ?
Oui (rires). On nous avait programmé sur une affiche avec Aerosmith et des quantités d'autres groupes (Extrême et Pantera notamment). On montait en second sur la grande scène après Zakk Wylde. On était en 1994. Les seuls groupes associés au metal qui avaient les cheveux courts était Faith No More, Helmet et Therapy?. Beaucoup de fans de metal étaient perplexes devant Therapy? parce qu'ils nous voyaient comme un groupe indie rock. A Castle Donington, les gens avaient pris l'habitude de pisser dans des bouteilles d'eau vides et de les balancer sur les groupes. Phil Alexander, rédacteur en chef de Kerrang, nous avait dit "Vous allez jouer Monsters Of Rock avec les cheveux courts ? J'adore votre groupe mais ce concert pourrait vraiment mal se passer". On est montés après Zakk Wylde et son groupe Pride and Glory soit des types qui font le tourniquet ave leurs cheveux longs et qui balancent des solos. On est arrivés sur scène comme des condamnés qui se dirigent vers l'échafaud (rires). Au final, le concert a été génial. Kerrang nous avait beaucoup soutenu et "Screamager" et "Nowhere" étaient entrés dans le top singles en Angleterre. Après deux chansons, le public a pris conscience que l'on était capable de riffer comme les autres groupes. Mais oui, on pensait que ce concert serait notre fin et que l'on finirait couvert de pisse (rires).
Le Brexit vous affecte-t-il en tant que groupe ?
Absolument. Je vis en Angleterre depuis presque 25 ans. Je me suis marié ici. On a toujours aimé l'Europe et nos amis en Europe. Le Brexit nous affecte financièrement. A chaque frontière, on est obligés de payer des taxes et des frais supplémentaires. Mais on fait ça depuis assez longtemps pour l'accepter et jouer dans les règles. Le plus difficile depuis le Brexit, c'est le racisme. Le Brexit a été une excuse pour tous les racistes de s'exprimer à voix haute. On m'a dit à plusieurs reprises "Tu ne devrais pas rentrer chez toi ?" Mais c'est ici chez moi. La femme de Michael est Hollandaise. Ils vivent dans la partie anglaise d'Irlande du Nord. On lui a dit qu'elle devrait rentrer chez elle. C'est insensé. Le Brexit était supposé exister pour des raisons économiques pas pour être une excuse pour les racistes. J'habite à Cambridge, dans un quartier middle-class, et lors d'un repas, on m'a dit "tu devrais rentrer chez toi". C'est insensé. On est Irlandais mais on se sent européen. On aime l'Europe, on aime voyager, rencontrer les gens. C'est un aspect important dans nos vies depuis 1991. On a des amis partout en Europe. Pourquoi faut-il être divisé ? On vient d'Irlande du Nord. On sait ce que la séparation fait aux gens. Il y en a assez des séparations.
Quels sont vos rapports avec la France ? Therapy? a toujours été aimé chez nous.
Le public français me manque. De notre première tournée en 1991 avec Mega City Four jusqu'à Infernal love, les concerts en France était géniaux. Le public nous aimait vraiment. Puis, il a semblé qu'il est devenu moins enthousiaste en ce qui nous concerne. Mais à chaque fois que l'on joue à Paris, l'ambiance est géniale. Les Français me manquent car c'est le premier public en dehors de l'Irlande et de l'Angleterre qui nous ait acceptés. On a appris à connaître les Burning Heads, les Sheriff... On aimait tous Téléphone ainsi que le cinéma français. Puis les journalistes français étaient vraiment sympas tout comme les gens chez Polydor. Mais après Infernal love, il s'est passé trois ans avant Semi-detached et on a perdu pas mal de fans en route. Pourtant on aime toujours autant venir en France. On aimerait pouvoir plus y tourner.
Quelle est ta position vis à vis du streaming ? J'imagine que vous êtes loin de vendre autant de disques qu'à une époque. Le business musical change parallèlement aux habitudes de consommation. Vous arrivez à vous adapter ?
Oui. J'ai un fils de 23 ans qui adore la musique mais n'en possède pas. A l'arrière de ma maison, j'ai une dépendance avec toutes mes guitares, tous mes amplis, mes vinyles, mes CDs. Il me fait "Papa, pourquoi tu as besoin de garder toutes ces merdes ? Tu n'en pas besoin" (rires). Je lui ai dit "J'aime écouter ce live des Ramones en décryptant la pochette, pareil pour "What's going on" de Marvin Gaye". Il ne comprend pas. Je sais que le monde fonctionne ainsi et je l'accepte. Il faut savoir s'adapter. Ce qui m'énerve cependant c'est de croiser des fans de Therapy? qui nous disent une pinte à 8 euros dans la main "le concert était génial mais je n'ai pas encore votre dernier disque car il est trop cher" alors qu'il est à 10 euros. Mais je sais que le monde fonctionne désormais avec le streaming et je ne veux pas passer pour un vieux monsieur (rires).
Quelle est la suite pour Therapy? ? Vous pensez déjà à un successeur de Cleave ?
On a enregistré un nouvel album de 10 titres. On a répété 24 morceaux et on a choisi les 10 meilleurs avec Chris Sheldon, le producteur de Troublegum. On a enregistré en décembre 2021. Mais on va repartir en tournée ces prochains mois pour la tournée des 30 ans qui a été repoussée. On jouera un best of de notre carrière ainsi que quelques nouvelles chansons. Cette tournée se terminera avec des festivals à la fin de l'été. Puis le nouveau disque devrait paraître en octobre 2022.
Vous êtes toujours en contrat avec Marshall Records ?
Oui, le disque sera disponible sur Marshall Records. On a enregistré dans un tout nouveau studio à la pointe de la technologie qu'ils ont construit dans l'usine où ils fabriquent leurs amplis. En tant que guitariste, c'était un rêve. Je pouvais essayer tous les amplis.
Imaginons que le livre sur Therapy? soit adapté en film. Quel acteur verrais-tu jouer Andy Cairns ?
Il est mort malheureusement mais j'aurais bien vu Robin Williams me jouer. Et Donald Sutherland interpréter Fyfe, Keither Sutherland Neil Cooper et Ryan Gosling Michael. Michael est le mignon dans le groupe.
Dans le livre, tu mentionnes qu'en 2012, vous avez dû revoir votre manière de tourner et en finir avec les tour bus.
On avait tourné pendant 2 mois et demi en Europe. Le public était présent, on jouait dans de beaux endroits mais les tour bus coûtent très chers. C'est environ 1800 euros par jour, tu payes le chauffeur 250 euros par jour, tu dois prendre deux chauffeurs parce que les trajets sont longs puis il y a les frais de nourriture, l'équipe technique à payer, 120/150 euros par personne. On est revenu de cette grosse tournée en se rendant compte que tout l'argent était parti dans les frais. On s'est dit que si on arrêtait de tourner en tour bus, on économiserait beaucoup d'argent. Le tour bus est un peu un luxe rock'n'roll. Les jeunes groupes veulent des tour bus surtout pour faire la fête. C'est un hotel sur roues. C'est aussi une question d'apparence pour beaucoup de groupes. Tu es un groupe de rock, tu dois arriver en tour bus à la salle, cela te donne l'impression d'être une superstar. Je préfère arriver dans un véhicule ordinaire et rentrer chez moi avec de l'argent pour ma famille. Parce que les économies faites sont vraiment dingues. Ce n'est pas le tour bus qui va rembourser mes prêts (rires). De plus au bout d'un moment, tu n'as plus envie de marcher sur une moquette pleine de bière et mal dormir. On se réveille désormais dans un vrai lit en tournée et de bien meilleur humeur.
Vous êtes amateurs de reprises mais de quels groupes actuels aimeriez-vous entendre des versions de vos chansons ?
J'adorerais entendre Neil Young reprendre "Summer of hate". Ou Iggy Pop "Bowels of love" d'Infernal love. Bon, ce ne sont pas vraiment des groupes actuels (rires)...
Tu disais que ton fils avait 23 ans. A-t-il lu le livre et te pose-t-il des questions sur Therapy? ?
Pas vraiment. Il est branché electro et hip hop. Il a commencé avec le hip hop vers 10 ans avant de se tourner vers l'electro plus obscur et underground. Il venait à nos concerts quand il était plus jeune. Désormais il s'en fout (rires). Il est à l'université et il me dit qu'il croise régulièrement des étudiants qui connaissent Therapy?. Pendant longtemps il ne disait pas que son père était dans Therapy?. Mais quand ses potes fans de metal découvrent qui je suis, ils hallucinent. Et lui leur dit "Mais pourquoi ?" (rires). C'est sain. Il faut toujours se rebeller en réaction à ses parents et écouter sa propre musique. Pas étonnant qu'il n'aime pas le rock (rires).
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Therapy? discographie sélective
Liens Internet
- kicycol : graphiste indépendant
- Music Productive : Association pour la promotion des artistes belges.
- L'oreille à l'envers : webzine
Rock > Therapy?
Biographie > Tout ça pour une Therapy? (mars 2022)
Biographie > de la musique pour se soigner
L'histoire de Therapy? commence en 1989, deux jeunes irlandais se rencontrent à un concert, Andy Cairns (chant, guitare) et Fyfe Ewing (batterie) s'entendent bien et décident de monter un groupe, ils répètent dans la chambre de Fyfe quand il a terminé ses cours et qu'Andy n'est pas à l'usine. Après quelques mois, ils vont dans un studio de Belfast pour enregistrer leur première demo, (4 titres) Andy ne pouvant assurer les parties basse qu'en studio, ils demandent à un pote de Fyfe de les rejoindre, Michael McKeegan intègre donc le groupe et va livrer avec eux leur premier concert au "Belfast Art College". Le trio enregistre une nouvelle démo (4 titres) et enchaîne quelques concerts. Au début de l'année 90 ils sortent le single "The meat abstract" sur leur propre label Multifuckingnational Records. Ils en éditent 1.000 exemplaires qui se vendent très rapidement. Le buzz prend forme avec les concerts qu'ils donnent en compagnie de The Beyond, Fugazi, Teenage Fanclub et Tad. Ils signent chez Wiiija Records et retournent en studio pour enregistrer leur premier EP. Babyteeth (7titres) sort en juillet 1991, malgré un son assez faible, Therapy? entre de plein pied dans le paysage musical anglo-saxon, ils participent aux prestigieuses John Peel Radio Sessions et continuent d'ouvrir pour des groupes renommés comme Babes In Toyland par exemple. Le succés étant au rendez-vous, le groupe part à Londres pour bosser sur la suite de ses aventures, ce sera d'abord un nouvel EP : Pleasure Death (6 titres) qui sort en janvier 1992 avec le célèbre "Potatoe junkie" pour séduire les masses. Therapy? débarque sur le continent et s'incruste au Reading Festival ! Mais ils ne passent pas l'été à jouer et couchent sur bandes leur premier véritable album : Nurse sort en octobre avec "Teethgrinder" et "Nausea" qui font un carton et "Gone" qui montre que le groupe peut faire autre chose qu'un mix batard de punk, de métal et de rock (et dont la caisse claire résonne comme dans une piscine). Nurse leur ouvre les portes des Etats-Unis où ils donnent quelques concerts dont un avec les Screaming Trees. L'année suivante se passe entre sortie de CDs (Shortsharpshock EP, Opal Mantra, Face the strange EP) et tournées (avec Helmet et The Jesus Lizard !).
1994 est une année charnière pour Therapy?, c'est l'année de Troublegum, le groupe change de statut passant de "bon groupe indé" à "stars internationals", le monde entier découvre Therapy? avec cet album, moi aussi, sans anti-sèche, difficile à réécouter l'album quels titres étaient sortis en single, tous sont des bombes, Therapy? propose un rock différent, un rock agressif, rugueux, réel, sombre et aussi aguicheur qu'une poubelle de toxico. "Nowhere", "Die laughing" (i think i've gone insane, i can't remember my own name), "Screamager" (screw that, forget about that, i don't wanna know about anything like that i'got nothing to do...), les riffs sont simples, basiques, les rythmiques également, le chant a certes un peu de particularité mais rien n'indiquait que le groupe aurait un tel succés, on peut encore se demander pourquoi on aime tant ce groupe sans avoir de réponses... Pas d'explications mais peu importe puisque c'est bon ! Therapy? vient de réussir un coup de maître, ils retournent aux USA avec Henry Rollins, Tad et Swervedriver, et reviennent en Europe pour enregistrer l'album suivant avec Al Clay. Martin McCarrick (guitariste et violoncelliste) les aide à bosser les arrangements et ajoute des cordes "classiques" à quelques titres dont la reprise de Hüsker Dü "Diane". Infernal love sort en 1995 alors que la radio n'a pas terminé de diffuser les tubes de Troublegum. Le son est encore amélioré et le premier single "Stories" rassure, Therapy? ne s'est pas enflammé, ils font toujours ce qu'ils savent faire. L'album sera pourtant décrié par une partie des médias qui n'acceptent pas que le groupe fasse un Troublegum 2, il y a pourtant sur ce Infernal love de nombreux ajouts/changements (des choeurs, des cordes, des arrangements, un son très propre). Et encore une fois, la plupart des titres sont sublimes : les calmes et torturés "A moment of clarity" et "Bad mother", le rancunier "Jude the obscene", le nerveux "Loose", l'électrique "Epilepsy", les tubes efficaces de par leur beauté ou leur simplicité "Misery", "Stories" et "Diane". Infernal love est un bon album.
Mais après le rêve Troublegum, le réveil est dur, en janvier 1996, Fyfe Ewing ne supporte plus la pression et décide d'arrêter. Graham Hopkins est recruté pour le remplacer et Martin McCarrick devient le quatrième membre du groupe à part entière. La tournée les emmène outre Atlantique où ils se retrouvent sur scène avec Girls Against Boys puis Ozzy Osbourne. Ils enregistrent deux reprises pour des tribute albums (une des Misfits, une autre des Smiths) et revisitent les salles européennes. Après avoir pris un peu de repos et joué avec Idlewild et les Deftones, ils sortent en août 1998 Semi-detached mais leur label (A and M Records) les lache. "Church of noise" fera son petit bonhomme de chemin dans nos oreilles mais l'album ne reste pas dans les annales, les expérimentations sonores ("Tramline") et les petites folies noisy ("Stay happy") prennent le pas sur le rythme et les fredaines. La traversée du désert continue et si un label les prend sous son aile pour qu'en 1999 sorte Suicide pact-you first, ils ont de la "chance" car sur cet album s'affirme un rock indé plus formaté, moins coupant et osé, où les bons titres sont rares "He's not that kind of girl" qui lance l'album sur un bon rythme, dommage que tout ne soit pas du même tonneau et que l'ensemble sonne un peu brouillon ("Hate kill destroy") et hétérogène (quel point commun entre la balade "Six mile water" et la bravade punk "Other people's misery" ?), tout comme son morceau caché, Therapy? semble perdu, grisé, loin de chez lui.
Si pour le public le double best of So much for the ten year plan qui sort en 2000 rappelle combien Therapy? nous a apporté, cet album n'existe que pour terminer le contrat signé quelques années plus tôt avec Mercury... On y retrouve les tubes du groupe mais aussi quelques inédits ("Bad karma follows you around", "Fat camp"), des raretés ("Evil Elvis", "Summer of hate"...) et une somptueuse version de "Lunacy booth". Il faut dire que les irlandais ne sont pas avares de reprises, de version unplugged et de compositions non éditées sur album... En 2001, le combo part s'installer aux USA, à Seattle, pour travailler avec Jack Endino. Ils sont sur place pour enregistrer mais insatiable groupe de scène, ils en profitent pour jouer avec Mudhoney, The Melvins ou Nebula. Le nouvel opus s'appelle Shameless, il sort à la fin de l'année, moment choisi par Graham Hopkins pour quitter le groupe. Ce Shameless apparaît comme la suite logique du pacte suicidaire mais "en mieux", ici se détachent du lot "Dance" et "I am the money" titre trés haché possédant cependant un refrain très efficace. Les autres titres sont tous de très bonne facture (sauf peut-être "Tango Romeo") avec des attaques punks, des petits solos, des lignes de chant tantôt hargneuses tantôt charmeuses... Seuls sont peu à leur place les choeurs présents un peu partout ("This one's for you" par exemple), même si on s'y fait, ils sont vraiment pénibles sur "Alrite". Enfin, on trouvera toujours un peu de délires sur l'album avec des morceaux un plus expérimentaux comme le criard "Joey" ou le loufoque "Body bag girl". Therapy? semble avoir trouvé l'équilibre entre noisy déjanté et chansons efficaces... mais n'a plus de batteur et leur nouveau label les lache également. Keith Baxter (3 Colours Red) prend la place derrière les futs quelques temps, celui de recroiser la route de Neil Cooper (ex-The Beyond, Cable), l'année 2002 se termine donc mieux qu'elle n'a commencé, le groupe est à nouveau au complet et Spitfire les a signé (pour combien de temps ?)
Review Concert : Therapy?, Therapy? Boule Noire (mai 2022)
Therapy? / Magazine > Mag #50
Un 50ème numéro, ça se fête ! Alors on s'est fait plaisir avec un des groupes les plus importants des années 90 (celles de notre jeunesse pour beaucoup dans l'équipe) : Therapy? ! Au menu, une superbe interview menée par Olivier Portnoi (et ouais !) et l'intégralité de la discographie du groupe ! On a invité quelques autres loustics à prendre part à la fête, on te laisse découvrir tout ça comme les interviews de Supermunk, Jack And The Bearded Fishermen, Darcy, You Said Strange, Effervescence Records, Athlete, Brns, Burning Heads, Pili Coït, Mopa, des photos et des live-report de Nada Surf, Lice, Gaelle Buswel, Australian Pink Floyd, des tas de chroniques et notamment celles de Saxon, The Quill, Insolvency, Dead Horse One, Seven Eyed Crow, Quietus, Freaks And Clowns, Volbeat, Hypno5e, Matrass, L'effondras, Villa Fantôme, Néfastes, A Terre, Pipi Tornado, Wonderflu, Jim Lindberg, La Nébuleuse D'hima, Except One, Paul Péchenart, Rougegorgerouge, Membrane, Slash, Goodbye Meteor, The Ocean... Et y'a des autres trucs sur plus de 200 pages, alors trève de blabla et commence la lecture et les partages !
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Interview : Therapy?, Therapy en question (nov. 2018)
Therapy? / Magazine > Mag #20
20 ans pour No One Is Innocent, 20 numéros pour le W-Fenec version Mag digital (sinon, on se rapproche doucement de nos 20 ans aussi) avec donc une interview de Kémar qui ne fait pas que de la Propaganda mais aussi des interviews de Therapy?, Dirty Shirt, Wheelfall, Watertank, Shiko Shiko, un peu de temps de parole donné à Solar Flare Records et à La Malterie. Parmi les nombreuses chroniques, tu retrouveras les dernières sorties de Hangman's Chair, The ARRS, Vesperine, Revok, General Lee, Zuul Fx, Membrane, Refused, Enablers, The Prestige, Kid Francescoli, Talia, Tank, And So I Watch You From Afar, ACOD..., des reportages sur les festivals de l'été (Dour, Xtreme Fest, Motocultor Fest), une grosse vingtaine de chroniques plus courtes avec notre avis sur les albums de Crazy Town, L'Objet, Dance to the End, Pro-Pain, Alabasterds, Smash Hit Combo, Kill Me This Monday, Defeater, Ina-Ich, Asian Dub Foundation, Porn, Bullet For My Valentine mais aussi un coup d'oeil dans le rétro (l'album qui tuait tout il y a 10 ans, c'était celui de ...)...
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Interview : Therapy?, Therapy et points d'interrogations (août 2015)
Chronique Livre : Therapy?, Tout ça pour 30 ans de Therapy?
Therapy? / Chronique LP > A brief crack of light
Pour être tout à fait franc, et pour rempiler pour une deuxième chronique, j'aurais préféré évoquer l'album Disquiet paru en 2015 car pour moi (attention, spoiler), c'est le retour de la grande foire aux mélodies pop punk. Mais comme l'article a déjà été écrit par un respectueux membre du W-Fenec, je vais me pencher sur la question de A brief crack of light paru en 2012 et succédant à Crooked timber. Et tout comme son prédécesseur, celui-là n'est pas vraiment mélodieux non plus ! Avec les basses bien en avant, A brief crack of light bénéficie d'une prod' semblable au disque précédent (à l'exception toutefois de ce son de caisse claire), et se révèle également d'un excellent niveau, clairement au-dessus d'un Shameless (2001) par exemple. Je vais être moins bavard que pour la review précédente, et me prêter au jeu d'un titre un mot (ou deux, faut pas déconner non plus).
1. "Living in the shadow of a terrible thing" : riffs et refrains accrocheurs, morceau noisy et mélodieux en même temps. 1er single complètement mortel
2. "Plague bell" : un morceau surprenant, bourré d'effets chelou et bourrin à souhait
3. "Marlow" : ça chinoise à fond, avec une guitare qui semble assumée
4. "Before you, with you, after you" : c'est tout sauf une chanson d'amour celle la ! Le refrain est cool.
5. "The buzzing" : les Melvins sous acide
6. "Get your dead hand off my shoulder" : tout est dit dans le titre, aussi flippant qu'un épisode de Walking Dead ! Une sacrée réussite.
7. "Ghost trio" : on pourrait croire à un morceau de Ministry mais lorsque le chant arrive, c'est mélodieux et donc c'est Therapy? tout craché. Un grand cru
8. "Why turbulence?" : un morceau bourrin avec paradoxalement un un jeu de batterie d'une finesse inégalée
9. "Stark raving sane" : un morceau de punk rock teinté de noise
10. "Ecclesiates" : morceau vraiment étrange, quasi instrumental.
Dix titres pour un album bien construit, peut-être moins accessible que Crooked timber mais néanmoins de grande qualité. Le côté obscur de la force, en quelque sorte.
Dans une récente biographie (je ne parle pas du livre mais de ce qu'on peut trouver dans les annonces de concert ou de disque), il était mentionné que groupe avait tout traversé : l'arrivée du CD, le développement d'Internet, l'effondrement de l'industrie du disque, la création des plateformes musicales numériques.et pourtant, le trio Irlandais est toujours là. Ces gars sont passionnés et constants. Ils ont divisé les fans tellement leurs disques sont différents mais ils s'en battent les couilles. Ils jouent ce qui les fait vibrer, au gré du vent et des époques, sans aucun opportunisme puisque, selon moi, c'est toujours cohérent. Therapy?, à jamais les premiers.
Therapy? / Chronique LP > Crooked timber
Les bons gars de la team du W-Fenec me laissent carte blanche pour parler de Therapy?. Quelle aubaine ! Ceux qui me connaissent bien sont déjà au courant : j'ai 12.000 "mon groupe préféré". Mais s'il ne fallait en choisir qu'un, j'opte sans hésitation pour Therapy?. Un groupe qui m'a donné envie de jouer de la musique lorsque j'étais boutonneux, au même titre que Nirvana. Ce que j'adore chez eux, c'est ce coté "cul entre deux chaises" ultra assumé, à la fois mélodique et à la fois bourrin, avec ce mélange de Punk, Pop, Metal, Noise...
J'aurais pu chroniquer tous les disques, mais je vais notamment me focaliser sur Crooked timber. Et pourquoi cet album-là ? Mais parce qu'il est monstrueux pardi ! A l'époque de la sortie de ce disque (en 2009 donc), Therapy? est déjà devenu un groupe de seconde zone qui joue dans de très gros festivals, mais dans les pays de l'Est !!! Et alors ? Rien à branler pour la bande à Andy, toujours fidèle au poste. A l'époque, Therapy? met clairement la mélodie de côté. Les deux précédents albums sonnent quand même vraiment noise, loin, très loin de l'immense Troublegum taillé "fm" ! Je me vois encore chez le disquaire choper Crooked timber sans avoir encore rien entendu de son contenu. La pochette est simple et efficace : logo sur fond noir. Je me souviens m'être demandé si ils allaient relancer la machine à tubes ou envoyer un disque qui bourre en mode bien malsain. Pour la machine à pop punk, il faudra attendre 2015 et l'immense Disquiet mais la réponse à ma question est paradoxale... Ca bourre plus que jamais, le son est énorme, c'est froid, voir glacial quasi tout au long du disque. C'est accordé très bas ("Enjoy the struggle" est plus grave qu'un groupe de death), la basse est ultra devant dans le mix sur l'ensemble des morceaux ("Somnambulist"). Il n'y a pas beaucoup d'accords majeurs qui donnent le smile (moi qui adore ça aussi) et pourtant ça me met une taloche tellement dingue que je vais saouler tous mes potes avec ce disque pendant un certain temps ! Et le mieux dans tout ça, c'est que l'on garde bien en tête les morceaux qui sont hyper bien construits (le single "Crooked timber" qui est le morceau le plus mélodique du disque ; "Bad excuse for daylight" qui aurait pu se retrouver sur Bleach de Nirvana ; "Exiles", mon titre préféré avec un le basse/batt' en osmose, aussi audacieux que réussi). Clairement mon album préféré de toute la discographie, dans la même veine que Nurse ("Clowns galore"). Ça sonne 90's tout du long mais avec la modernité du millésime 2009 dans l'approche.
Voilà un disque que je réécoute souvent et que vous le conseille vivement. Therapy? n'a que faire des codes et barrières à respecter. Crooked timber peut paraître difficile d'accès mais je vous jure, on se met dedans très vite, et il faudra plus que du subutex pour s'en défaire. Si vous aimez ce groupe et que vous ne comprenez pas ce skeud, je vous conseille de revendre votre unique album Troublegum pour deux euros et de retourner écouter Limp Bizkit ou The White Stripes !
Therapy? / Chronique LP > One cure fits all
Si la qualité d'un album se mesure à l'aune de sa pochette, il va être difficile de pouvoir prétendre que One cure fits all est un bon disque. L'artwork n'a certes jamais été la priorité de Therapy? (en même temps c'est un groupe de musiciens, pas d'artistes peintres ou de photographes) mais là c'est... hum... particulier. Je vous laisse juger.
Musicalement ça démarrait pourtant plutôt bien avec "Sprung" aux guitares bien lourdes et bien grasses, à la batterie sèche et au refrain plus mélodique... la marque de fabrique de Therapy? en somme. Et la formule magique était reprise juste après, dans "Deluded son". C'est ensuite que les choses commencent à se gâter. Les chansons défilent, sans retenir mon attention et j'ai même plutôt envie d'appuyer sur next au bout d'une minute. Jusqu'à "Dopamine, seratonin, adrenaline", dont les mots répétés à l'envie dans le refrain me renvoient au "Feel good hit of the summer" des Queens Of The Stone Age ("Nicotine, valium, vicodin, marijuana, ecstasy and alcohol, cocaïne !") mais en beaucoup plus fade. Peu après le riff de "Our white noise" me sort de ma torpeur - bah voilà, c'est ce son là que je veux entendre ! - pour vite me faire replonger ensuite, avec quand même un nouveau sursaut lors de "Rain hits concrete". "Can you feel it" y chante cette vieille carne d'Andy. Alors déso pas déso mais je ressens pas grand-chose, même si c'est un des rares morceaux qui se démarque. C'est dire le niveau du reste. Next. Re-next et on termine (qui a dit enfin ?) sur la chanson la plus poppy de l'album, "Walk through darkness" mais qui n'a absolument pas la puissance tubesque dont le groupe est souvent capable.
Bref, vous l'aurez compris, ce n'est pas franchement une pièce maîtresse de leur discographie et ce n'est pas étonnant que personne parmi mes camarades ne se soit bousculé pour en parler. Pour être complètement honnête, on m'a même refilé le bébé. Arf, c'est difficile d'être toujours au top et vu la régularité et la rigueur dont ont fait preuve jusqu'alors (et après) nos Nord-Irlandais, je leur pardonne bien volontiers cet album en tiers-teinte.
Therapy? / Chronique LP > Never apologize never explain
Je ne sais pas si cela a été suffisamment évoqué jusque-là dans ces pages mais Therapy? est un groupe monstrueux. Point. Il n'est pas mis à l'honneur, en couv' du Mag avec un traitement discographique spécial pour rien. Et ce monstre caméléon peut revêtir plusieurs têtes au gré des albums, tantôt vicieux, torturé, plus heavy, tantôt davantage mélodique et la plupart du temps, mélangeant habilement tout cela. Avec un titre pareil, Never apologize never explain, je te laisse imaginer l'ambiance qui prédomine ici.
Un an à peine après le déjà très bon High anxiety, voilà le désormais redevenu power trio (exit le deuxième guitariste) de retour, pour un album bien plus frontal et froid. Pas de circonvolutions, dès le début Andy Cairns et sa bande sont en mode vénère, bien tendus. "Rise up", live like a fucker and "Die like a motherfucker" posent le décor. S'ensuit "Perish the thought" qui démarrant de manière très noisy, se veut finalement plus groovy, avec à nouveau ce refrain accrocheur, reconnaissable entre tous, la Therapy? touch, quoi. Peu après "So-called life" nous rappelle que Songs for the deaf des Queens Of The Stone Age, sorti récemment n'est pas tombé dans l'oreille d'un sourd. Mais on ne peut décemment pas accuser les Irlandais de suivre la mode stoner, leurs premiers albums, desquels se rapproche beaucoup Never apologize never explain avaient déjà quelques accents rocailleux dans les guitares. Je ne vais pas détailler individuellement les chansons mais elles ont toutes leurs particularités. Et une similitude : Neil Cooper, le nouveau batteur arrivé deux ans auparavant, a très rapidement pris ses marques avec le groupe et notamment Michael McKeegan, bassiste originel. On a donc droit à une rythmique bien en place, comme sur "This ship is sinking" (tout en tension) ou encore l'envoûtant, prenant et puissant "Polar bear", étonnant single tiré de l'album au final apocalyptique. Étonnant car c'est loin d'être le morceau le plus calibré, à l'inverse des suivants, "Rock you monkeys" (autre single) et "Dead" dont l'équation est simple : bon gros riff + bonne grosse mélodie = bon gros tube !
Ce dixième album marque donc un retour du groupe à ses premiers amours, plus sombres (la pochette en atteste également), délaissant quelque peu les mélodies même si elles ne sont jamais bien loin mais sans perdre une once en efficacité. Il a aussi une saveur particulière plus personnelle car c'est sur cette tournée que j'ai vu Therapy? en live pour la première fois, après avoir fait tourner les disques en boucle pendant près de dix ans. Depuis je n'ai jamais raté une seule occasion et jamais été déçu, tant le groupe est toujours généreux sur scène. RDV est donc pris le 4 mai à la Boule Noire !
Therapy? / Chronique LP > Shameless
Au début des années 2000 et après un Suicide pact - you first qui n'a pas convaincu les foules et alors que le Neo Metal s'abat sur la planète, Andy Cairns veut faire ce qu'il appelle un disque de "rock 'n' roll déglingué". Une session chez Jack Endino, le célèbre producteur de Seattle/Sub Pop, est programmée et le groupe s'attèle à composer ce fameux disque de rock. Ni plus ni moins. Enregistré au Studio Robert Lang qui a entre autres vu passer devant la table de mixage Foo Fighters, Alice In Chains et Nirvana, Shameless est un disque garage rock brut de décoffrage, un disque simple et efficace. Peut-être trop simple et finalement pas aussi efficace pour un groupe de la trempe de Therapy? habitué à brouiller les pistes et à mélanger sans concession le Punk, le Metal ou la Noise.
Comptant quelques invités prestigieux (Barrett Martin des Screamin Trees, Neil Fallon de Clutch, Rich Jones des Black Halos et futur Ginger Wildheart Band et Michael Monroe Band), ce disque démarre sur les chapeaux de roue avec le single punk rock sans concession "Gimme back my brain", le lancinant puis fulgurant "Dance" au refrain accrocheur et la petite bombe "This one's for you" aux gimmicks noise et au refrain percutant. Un sacré début. La suite de l'album se révèle toutefois un cran en dessous et finalement assez inégale, avec des titres catchy mais quelque peu fouillis ("Wicked man", "Endless psychology" aux sonorités à la Queens Of The Stone Age et son pont noise, le garage "Alrite" et ses chœurs qui gâchent un peu tout, "Tango romeo" aux refrains inférieurs aux couplets) et des réussites qui dénotent toutefois du répertoire "classique" du -alors- quatuor Irlandais ("Theme from Delorean" aux accents surf, "Joey" punk rock pied au plancher).
Considéré par le groupe lui-même comme un album non abouti, et malgré son allure de disque patchwork qui tape dans les sous-genres du rock, je l'aime bien ce Shameless. Il fonctionne, même s'il manque de consistance et de fulgurance. Il ne tient pas le comparatif avec les trois premiers albums devenus des classiques, c'est un fait. Il part dans tous les sens, peut-être. Mais je l'aime bien quand même.
Therapy? / Chronique LP > Suicide pact - You first
Pour le numéro spécial, on ferait pas l'intégrale de la discographie de Therapy? ? Euh... Ca va être du boulot tout ça... Ouais mais on aura quelques belles plumes en renfort, ça peut le faire. Gui de Champi n'a pas eu de mal à me convaincre de participer à cette aventure et me replonger dans les albums de Therapy? mais très honnêtement, c'est avec un peu d'appréhension que je réécoute Suicide pact - you first pour cet article. L'âge d'or du groupe et sa Sainte Trinité (Nurse, Troublegum et Infernal love) correspond peu ou prou à ma période de teenager (de 15 à 18 ans, cet âge où tu dessines le logo du groupe un peu partout, il est encore sur ma trousse). Passé cette époque, un temps chargé de bons souvenirs comme ce temps passé chez les disquaires de Canterbury (comme Third eye) à fouiner pour trouver une rareté, un bootleg ou un TShirt introuvable en France, j'ai un peu décroché et si j'ai continué à écouter leurs albums, ils ne m'ont pas toujours emballé, notamment celui-ci.
Une fois n'est pas coutume, ils ont placé le meilleur titre en premier, "He's not that kind of girl" lance donc l'album sur un bon rythme, le son est "propre", le chant varie les tonalités mais dès "Wall of mouths", on perd en énergie, c'est avec celle du désespoir qu'Andy envoie ses lignes et ses riffs, on le sent moins concerné, cherchant derrière quel masque se dissimuler, il multiplie les aspects de sa voix comme les distorsions de guitare ("Jam jar jail") mais cet ensemble assez rock ne prend pas, "Hate kill destroy" sonne même comme si le morceau n'était pas achevé. Le groupe aurait-il improvisé en studio (le caché "Whilst I pursue my way unharmed" le laisse penser) ou a tenté des choses qu'il n'a pas réussi ? Ce qui reste, encore aujourd'hui, c'est que Therapy? ne semble pas savoir où aller, leur talent pour mélanger les ambiances est bien peu visible, que ce soit sur un titre ("Big cave in") ou sur plusieurs (la belle balade "Six mile water" vs la bravade punk "Other people's misery"), on se perd à essayer de les suivre et de comprendre où ils veulent en venir. Le label Ark 21 ne sort qu'un "single" (en tirage ultra limité pour l'Allemagne) pour "Hate kill destroy" (avec "Sister" et "Six mile water" en live) et le groupe ne tourne qu'un clip, c'est pour "Little tongues first", titre qui reste moins dans les mémoires que "He's not that kind of girl". Allez, je vais ranger l'album et le laisser dormir sur mes étagères, c'était certainement la dernière fois que je l'écoutais.
Therapy? / Chronique LP > Semi-detached
Jamais Therapy? n'aura mis aussi longtemps à sortir un album (3 ans) mais on ne remplace pas Fyfe Ewing comme ça, en deux roulements de caisse claire. Et puis il faut dire aussi qu'ils étaient sur un rythme plus que soutenu auparavant : 5 disques en 5 ans, des concerts et festivals incessants, des hits fulgurants, un succès hallucinant. Il y a moults groupes du Rock'n'Roll of Fame qui se sont cramés les ailes (ou la tête) pour moins que ça mais nos Irlandais sont toujours dans le game et entendent bien le rester.
Nouveau batteur, donc (Graham Hopkins), un deuxième guitariste / violoncelliste (Martin McCarrick) qui devient membre du groupe à part entière et un Chris Sheldon, déjà aux manettes de Troublegum, à nouveau producteur. On ne peut pas dire que ça leur avait porté préjudice par le passé. Tout ceci pour un résultat qui sonne... comme du pur Therapy? ! Le ton est donné d'entrée avec le tonitruant et efficace "Church of noise", tube en puissance, encore très fréquemment joué en live, c'est plutôt bon signe. De la noise il en est question également dans le morceau suivant, "Tightrope walker", au refrain néanmoins hyper accrocheur et c'est vraiment ce qui prédomine dans Semi-detached. Sans avoir cédé à la facilité et cherché à tout prix à écrire un morceau susceptible de passer à nouveau en boucle sur les télés et radios, il n'en reste pas moins que c'est leur album qui est peut-être le plus mélodique, avec son côté pop à grosses (mais alors très grosses) guitares saturées. Celui où l'influence Hüsker Dü / Sugar / Bob Mould se fait la plus ressentir (ce n'est pas par hasard s'ils avaient repris "Diane" dans le disque précédent) et qui leur réussit carrément sur "Lonely, cryin' only", "Stay happy" ou encore le parfait "Heaven's gate". Dans l'ensemble, il y a quasiment toujours un petit truc qui va t'accrocher et rester en tête, que ce soit au niveau des riffs de guitare ou des envolées lyriques au chant, même sur les morceaux un peu plus sombres, comme "Born too soon" ou "Safe". Chassez le Démon, il revient au galop.
Trop peu souvent mis à l'honneur, à mon goût, quand il s'agit de mentionner la discographie du groupe, il s'agit pourtant d'un de ceux que je ressors le plus souvent et je suis pas prêt de m'en détacher, même à moitié. Après je conçois qu'il soit moins prisé par celles et ceux davantage attirés par le versant plus heavy et noisy de Therapy?.
Therapy? / Chronique LP > Infernal love
Infernal love sort en juin 1995 alors que la radio n'a pas terminé de diffuser les tubes de Troublegum, le label veut profiter du moment, Therapy? est omniprésent (meilleur album de l'année et disque d'or en 6 mois au Royaume-Uni...), comme il faut battre le fer quand il est chaud, le groupe accepte de retourner en studio sans prendre de vacances. Cette fois-ci, c'est Al Clay, qui vient de produire Frank Black, qui s'occupe du son et va faire en sorte que le groupe sonne différemment de ce qu'il a fait par le passé.
Même si ça nous semble étrange aujourd'hui, à l'époque, certains haters critiquent les Nord-Irlandais qui, en enchaînant les albums, auraient fait un "Troublegum 2" avec les chutes du premier, histoire de s'enrichir un peu plus à peu de frais. C'était mal connaître le combo qui est un des rares dont on peut louer l'intégrité. D'ailleurs, cet opus ne ressemble pas à son grand frère. De par la production d'abord, beaucoup plus lisse et travaillée, de par l'apport de Martin McCarrick ensuite. Le guitariste et violoncelliste intègre le trio pour bosser les arrangements, ajouter des cordes "classiques" et des chœurs à quelques titres et si le musicien (qui a débuté avec This Mortal Coil) est encore très attaché à Siouxsie & The Banshees, il restera auprès de Therapy? pendant près de 10 ans. Et sans pousser jusque la balade acoustique dominée par les cordes qu'est devenue la reprise du "Diane" de Hüsker Dü (je t'encourage, si tu ne l'as pas déjà fait d'écouter la version originale pour voir combien Therapy? s'est approprié la chanson en sortant de ses habitudes et sans trop suivre le modèle) ou l'autre délicatesse qu'est "Bowels of love" (composée par Michael McKeegan), on découvre tout au long de la galette de vraies mélodies dans "Me vs you", des lignes de basse très pures sur "A moment of clarity", des effets assez polis sur "Bad mother"... Et même sur le premier tube/single qu'est "Stories" qui semble sortir du même moule que Troublegum dans l'engagement et la dynamique, on se prend à chantonner le refrain ultra catchy (Happy people have no stories). Pour assurer la liaison avec son passé (et une partie de son futur), le groupe envoie l'électrique "Epilepsy", le rancunier "Jude the obscene", le nerveux "Loose", le punk "30 seconds" ou l'aussi simple qu'efficace "Misery".
Therapy? chante à la fois le pouvoir de l'amour et cet amour infernal qui lui cause des problèmes, les introductions sont toutes travaillées et donnent parfois un sens plus lourd à de simples chansons. En mettant un peu de sirop dans son whisky, Therapy? s'ouvre aussi un public encore plus large, expérimente de nouveaux sons et instruments, s'aventure dans l'acoustique et prend une nouvelle dimension.
Therapy? / Chronique LP > Troublegum
Au-delà d'être un album indispensable dans la discographie Therapy?, cet opus est culte pour toute une génération. N'y allons pas par 4 chemins, pour moi (et de nombreux autres), c'est l'équivalent d'un Nevermind, du Black album ou de Tostaky. Un marqueur de son époque, une porte d'entrée vers un autre univers, une révélation, un amour de jeunesse qui ne s'oublie pas. Je ne sais pas combien de fois j'ai écouté ce Troublegum dans ma vie mais "beaucoup" me paraît pas assez, au moment d'en écrire la chronique. J'ai voulu lui chercher un défaut, un titre un peu plus faiblard, une faiblesse pour déconstruire le mythe... Je l'ai donc écouté une fois de plus. Et réécouté. Et je n'ai pas trouvé. Ouais, je suis amoureux. Chaque riff, chaque ligne de texte, chaque frappe sur la clinquante caisse claire, je connais trop ces titres pour y trouver des maladresses. 45 minutes de sans faute, c'est possible.
La violence du son et des accords balancés dès "Knives" montre que le groupe a franchi une étape, même si c'est parfois encore très "noise", le bordel est diablement plus structuré, les grattes envoient un son métallique, le tempo est diabolique, les sonorités changent rapidement au cœur de morceaux assez courts, c'est un travail d'orfèvre. Une des plus grandes qualités de ce Therapy? là, c'est qu'il ne tient pas en place ! Et au sentiment d'agression permanente, Andy ajoute des mélodies incisives incroyables comme ce "Screamager" qui est devenu un des morceaux phares du combo (celui le plus joué en live et un des plus repris par d'autres). On retrouve cette puissance des harmonies vocales croisant des guitares pointues sur presque tous les morceaux mais l'entêtant "Die laughing", le pointilleux "Lunacy booth" et le vénéneux "Turn" sont certainement les plus marquants. Une des astuces du groupe pour nous tenir en haleine, ce sont les effets sur le chant, Andy varie les plaisirs et les effets faisant ainsi ressortir certaines phrases sans avoir besoin de les répéter (comme Jesus without the suffering de "Hellbelly", On my own de "Unbeliever" ou Femination generation de "Femtex"...) ou de les mettre en titre ("Stop it you're killing me", "Trigger inside"). Des lyrics qui ne s'oublient pas et procurent des frissons quand on les entend même quand ça part dans tous les sens ("Brainsaw"). Et en plus, ils subliment un titre d'un groupe que je n'aime pas, leur "Isolation" en hommage à Joy Division est tellement bien remaniée que certains ne savent pas que c'est une cover...
Ce disque a bientôt 30 ans mais n'a pas pris une ride et il m'est toujours très difficile de n'écouter que un ou deux morceaux, j'ai tendance à toujours vouloir écouter les autres... et ne plus m'arrêter. Bien des versions de ces compos sont sorties (des lives et des acoustiques notamment) mais comme toujours avec les morceaux d'exception, c'est un régal. C'est un monument, une partie de l'Histoire du Rock.
Therapy? / Chronique LP > Nurse
Nurse est le premier véritable album de Therapy?, pour mémoire, il sort en octobre 1992 (donc en même temps que Automatic for the people de R.E.M., Liar de The Jesus Lizard, Piece of cake de Mudhoney ou encore Grave dancers union de Soul Asylum, le rock alternatif ricain domine la planète et les Irlandais apportent une réponse européenne sacrément tranchante ! "Nausea" comme "Teethgrinder" (tous deux placés en début d'album) font un carton et "Gone" montre que le groupe peut faire autre chose qu'un mix batard de punk, de métal et de rock. La caisse claire résonne comme dans une piscine mais Harvey Birrell est une pièce importante dans la signature sonore du combo, pas question de remettre en question ses choix. Tant pis si aujourd'hui, certains trucs peuvent sonner crado (le non moins sublime "Disgracelands" par exemple). Les petits gars de Belfast font ce qu'ils veulent et parmi les trucs qu'ils aiment, il y a cette idée de mélanger des tubes supersoniques qui provoquent une excitation immédiate à des morceaux bien plus tordus et difficiles d'accès comme "Deep sleep". Même si les Ricains les plus alternatifs soignent déjà bien plus leur production, Nurse ouvre les portes des Etats-Unis aux Européens qui y donnent quelques concerts dont un avec les Screaming Trees. Surfant sur son succès, le combo (et le label à savoir A&M Records qui est détenu par Polygram) passe l'année 1993 à sortir des disques de différents formats : le single "Accelerator", un split (avec Peace Together, projet formé entre autres par Peter Gabriel et Sinead O'Connor pour récolter des fonds pour aider la jeunesse d'Irlande du Nord), une compilation (Born in a crash) et plusieurs EPs : Opal Mantra (avec l'éponyme inédit et trois live dont "Nausea"), Face the strange EP (avec "Neck freak", deux inédits parus sur la compil' et "Turn" qu'on retrouvera sur Troublegum) et Shortsharpshock EP (avec "Accelerator", deux inédits et "Screamager" qu'on retrouvera aussi sur Troublegum). Le planning est chargé, le combo occupe le terrain des ondes et des scènes qu'il enchaîne notamment avec Helmet et The Jesus Lizard.
Nurse place donc bel et bien ce point d'interrogation dans l'œil (et l'oreille) du rocker averti, quelques morceaux deviennent vite des incontournables ("Teethgrinder" ou "Nausea" sont encore très régulièrement joués en concert) et préfigurent de ce que sera le cultissime Troublegum.
Therapy? / Chronique LP > Pleasure death
Boosté par le bon accueil de Babyteeth par la presse anglo-saxonne et des ventes plus que raisonnables, le label Wiiija pousse le trio irlandais à enregistrer un autre mini-album, cette fois-ci en compagnie d'un des producteurs plébiscités par la nouvelle vague anglaise, Harvey Birrell (plus tard, celui-ci permettra aux Sheriff, Skippies, Cry Babies et autres Specimen d'obtenir le son catchy qu'ils ne trouvaient pas dans l'Hexagone). En deux jours, auxquels s'ajoutent deux de mixage, la paire accouche de six titres campant sur les acquis récents de Therapy?, tant et si bien que si Babyteeth n'avait été gravé que sur une face, Pleasure Death en serait la face B toute logique (les deux sortiront d'ailleurs sur le même CD aux États-Unis).
La production est plus rêche, ce qui accentue la teneur Indus du groupe, le climat général est également plus froid, mais le cahier des charges reste identique. Le rythme est roi, les effets nombreux, les ruptures plus que jamais de rigueur et pourtant, la complexité de ces nouvelles compositions n'a d'égale que leur aplomb mélodieux. "Skinning pit" est ainsi une introduction parfaite à Pleasure Death. Tout Therapy? est dans ce morceau entraînant (le riff principal), envoûtant (le refrain halluciné) et déroutant (les changements de rythmes). Que le trio soit marqué par la scène noise américaine (les productions de Amphetamine Reptile et Touch And Go en tête) ne fait aucun doute, c'est même une certitude que le groupe confesse bien volontiers dans le livre Tout Ça Pour 30 Ans de Therapy?. Mais à force de côtoyer des compatriotes comme Loop, Silverfish, Fudge Tunnel ou Th' Faith Healers, le trio s'entiche aussi de nouvelles obsessions qui le transcende. Pop hybride ("Potato junkie"), élucubrations soniques (l'instrumental barré "DLC"), rythmique martiale ("Prison breaker"), mood torturé ("Shitkicker"), Therapy? confectionne un amalgame noise/indie rock singulier qui fait mouche. Pur produit de l'International Underground dans son aspect (la pochette) et son attitude (l'extravagance), Pleasure Death atteste que Therapy? a définitivement trouvé la formule magique.
Therapy? / Chronique LP > Babyteeth
À la fin des années 80, l'Angleterre est, elle aussi, secouée par le punk/hardcore américain et ce, malgré son passé prestigieux en la matière. Une nouvelle génération de musiciens s'ouvre au son fiévreux de Hüsker Dü, Big Black, Fugazi, Tad, Butthole Surfers, NoMeansNo et autres Jesus Lizard (pour ne citer que les groupes les plus emblématiques). Des formations très différentes sur le plan musical, mais qui avancent toutes sous l'étendard d'une musique indépendante, personnelle, inventive et protéiforme. Ce leitmotiv, infusé dans la culture British, donnera naissance à des groupes comme Mega City Four, Bomb Disneyland, The Birdhouse, Senseless Things, Swervedriver, Snuff, Loop, Silverfish, Ned's Atomic Dustbin et bien sûr Therapy?.
Pour certains d'entre eux, l'ascendance pop sera toujours primordiale. Pour d'autres, la vitesse ou l'agressivité seront des éléments essentiels. Therapy? choisit une voie plus complexe, assurément plus ambitieuse, en voulant synthétiser toutes ses nombreuses envies en une seule et même entité artistique. Babyteeth est l'incarnation de cette prétention. Ainsi, si le trio de Belfast se démarque de ses collègues par sa noise rugueuse ("Skyward", "Meat abstract") et dévergondée ("Dancing with Manson"), voire carrément expérimentale (le foutraque "Loser cop"), il n'oublie jamais le gimmick accrocheur (dans le chant, les refrains, les chœurs, les riffs) qui le rend de fait abordable "malgré tout". S'il jongle constamment avec les ambiances, les sons, les rythmes et les effets de style, Therapy? réussit son pari de façonner une œuvre composite, à la fois unique et référencée (en gros, un mix entre Killing Joke et Big Black). Même quand son propos apparaît quelque peu confus à vouloir trop en faire (comme sur "Animal bones" où il s'aventure en terre Indus), Babyteeth conserve une bonne tenue générale et compose l'ADN sur lequel le trio s'ancrera à l'avenir. L'essai est largement transformé car ce premier effort de 1991 demeure riche, intense - son format court, 7 titres pour 28 minutes, jouant probablement en sa faveur - et particulièrement bluffant, même en 2022.
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