the_mars_volta_de_loused_in_comatorium.jpg En 2000, l'explosif et très abouti Relationship of command avait réussi à créer un consensus autour de la qualité des musiciens qui composent At The Drive-in. Par la suite, des divergences musicales ont eu raison, du plus que prometteur groupe d'El Paso : les désormais Sparta souhaitaient continuer dans la même trajectoire, The Mars Volta, quant à eux, se sentaient trop à l'étroit dans ce carcan "Post-hardcore-emo" et voulaient s'orienter dans une direction plus progressive en s'inspirant du Piper at the gates of dawn de Pink Floyd. Après une période de transition avec un projet qui aura eu le mérite de contribuer à leur quête d'identité (De Facto) et un EP Tremulant annonciateur d'un avenir plus consistant, The Mars Volta livre en 2003 son premier long effort avec De-loused in the comatorium.
A l'instar du Year Zero de Nine Inch Nails où du From Mars to Sirius de Gojira, The Mars Volta a adopté la forme du concept album pour ce De-loused in the comatorium : il conte l'histoire d'un homme, Cerpin Taxt, qui va essayer de mettre fin à ses jours en se suicidant à la morphine. Sa tentative va aboutir à un coma qui va durer une semaine au cours duquel il aura des visions sur l'humanité et sur sa propre personne. A son réveil, désappointé par le monde réel, il se suicide pour mourir cette fois (l'histoire est inspiré par la vie de Julio Venegas, artiste mort d'El Paso et ami de Cedric Bixler-Zavala). Comme ce personnage, la rupture avec le passé, c'est aussi ce qui semble motiver la musique du duo Bixler/Lopez. Exit les Fugazi, Drive Like Jehu et autres Stooges, influences majeures d'At The Drive-in. De ce groupe, il reste la fougue et l'envie de proposer quelque chose de foncièrement différent et novateur à la fois. The Mars Volta, c'est un espace fictif et un carrefour où se croisent, s'entremêlent et se confrontent une multitude de références bien ancrées dans les 70's voir les 80's prenant pour le coup des allures de panthéon dédié à la musique rock au sens large du terme. On pense bien sûr à Syd Barrett et les Pink Floyd pour les expérimentations aventureuses, ce travail minutieux sur les ambiances et les arrangements mais aussi à Led Zeppelin pour ces compositions volcaniques et pour le chant démonstratif, exubérant, souvent extatique de Cedric Bixler-Zavala. Autres compères dans l'espace-temps kaléidoscopique de The Mars Volta, Jimi Hendrix et Carlos Santana qui rodent également dans les parages, Omar Rodriguez-Lopez partageant ce goût pour les soli chaotiques/casse-gueules pour l'un et le brassages des genres pour l'autre dotant ce groupe d'une empreinte stylistique particulièrement redoutable. Dernier invité de ce festival de musiciens brillants et pas le moindre, Fela Kuti (empereur de l'afro beat) à qui TMV semble emprunter les ingrédients (travail sur les percussions, les rythmes endiablés) qui rendent le tout particulièrement hypnotique et propice à une certaine transe communicative, laissant augurer d'une musique prenant une toute autre dimension en live. Le piège quand l'on évoque toutes ces influences seraient de n'avoir finalement affaire qu'a un vulgaire patchwork et un plagiat sans saveur mais c'est ignorer la maestria atteinte par le duo d'El Paso : The Mars Volta recycle et réinvente avec pour résultat un De-loused in the comatorium très convaincant nourri à la fois par une période musicale particulièrement fertile mais aussi par l'ambition de deux musiciens hors-normes soucieux d'apporter une plus value constante à leur musique. Balèze, jouissif, donc clairement indispensable.

A noter que De-loused in the comatorium bénéficie de la participation surprenante de deux musiciens studio de luxe : Flea (basse) et John Frusciante (guitare) des tristement moribonds Red Hot Chili Peppers, peut-être l'une des rares occasions (en dehors de la carrière solo de Frusciante) de les entendre jouer une musique qui soit encore digne de leurs énormes talents.