Ça fait des mois que j'ai cet album dans mon disque dur et que les chansons tournent sans arrêt quand je fais du ménage (un peu), du gainage (parfois), du glandage (souvent)... mais n'allez pas croire que c'est la bande son idéale pour les trucs en -age. Non, c'est la bande son idéale pour tout et je peux enfin en parler.
J'ai déjà bien divulgâché en intro, tout ce qui va suivre n'est que superflu mais embarquons quand même. Direction Toronto car c'est là que sévit Talk Show Host depuis plusieurs années maintenant (2015), power pop trio, qui a pris le temps de sortir quatre EPs avant de passer l'épreuve du long format. Il a ainsi pu maturer sa musique et combiner au mieux l'alchimie des trois individualités qui le composent, à savoir Chris, guitariste/chanteur friand de Weezer dont la voix se rapproche parfois de celle d'Alkaline Trio, Fab, bassiste français, plus grand fan de Bad Religion que je connaisse (dans les pages de ce Mag pour en parler) et Sean, batteur féru d'indie rock à la King Gizzard & The Lizard Wizard. Vous voyez le genre ? Le genre de groupe un peu le cul entre deux chaises, trop punk pour les poppeux, trop pop pour les punx mais qui n'en est pas moins posément et brillamment ancré dans les 90's et sur des bases solides pour pondre de sacré tubes. Je suis TSH depuis ses débuts, je les ai vus et entendus évoluer constamment, avec des EPs qui sont passés de sympa à très cool, jusqu'à ce Mid-century modern que je n'ai aucun complexe à qualifier d'excellent. La signature sur Wiretap aux US et Disconnect Disconnect pour le UK, après des années en mode DIY, n'en est donc qu'amplement méritée car cette bonne parole (et musique) doit être propagée.
Fût un temps où j'animais une émission radio hebdomadaire et il y avait une rubrique "album de la semaine" avec trois titres desdits albums. Quand j'avais du mal à n'en sélectionner que trois, car beaucoup plus trouvaient grâce à mes oreilles, c'était plutôt bon signe et on est en plein dedans ici. Ok, allez je me lance et propose le très fun et efficace "Blood in the sand" avec ses who-oh-oh contagieux, le non moins efficace lui aussi "Syntax error OK", peut être le morceau le plus rapide de l'album et "Crisis actors", davantage sombre avec des paroles non dénuées de sarcasme et d'ironie, une des marques de fabrique du groupe, que Chris manie très bien, apportant ainsi une petite touche caustique à l'ensemble. J'ai choisi ces trois chansons mais si j'avais rédigé cette chronique à un autre moment, ça aurait tout aussi bien pu être le très entraînant "Warmest condolences" ou encore "You asshole!", premier morceau qui pose le ton d'entrée. Rassurez-vous, ce n'est pas nous qui sommes insultés mais eux, dans une sorte d'introspection et déconstruction masculine salutaires et nécessaires. Ce thème d'alliés n'est pas nouveau chez eux, c'était déjà le cas dans la chanson "I hate men (I hate all men)" sur l'EP Not here to make friends en 2017, qui leur avait attiré quelques commentaires bas du front de masculinistes fragiles ("ouin ouin ouin #notallmen"), les mêmes qui poussent des cris d'orfraie quand il est question de Black Lives Matter.
Malgré les liens d'amitié qui me lient à Fab, en toute transparence et objectivité je dois dire que c'est pour moi le meilleur disque sur lequel il joue de la quatre cordes. Mieux donc que Maladroit, Mon Autre Groupe, For A Second, The Larry Davids (malgré le nom cool) et plein d'autres que j'oublie. La seule critique négative que je pourrais faire c'est sur le track-listing, avec la face A qui est trop bien, quand la face B n'est juste que très bien. On a connu pire et ça va donc continuer à tourner lors de mes nombreuses sessions glandage. Avec tout ça je n'ai même pas parlé de la prod' qui déchire, de la pochette qu'on dirait sortie d'un épisode de la série Mad Men, ni du nom du groupe qui est le titre d'un morceau inédit de Radiohead dans la B.O. du film Romeo + Juliet. Ah bah si, maintenant ruez-vous sur Mid-century modern !
Publié dans le Mag #47