Tagada Jones-TRNT Si, pour le franchissement de ses deux premières décennies d'existence, le gang breton avait marqué chacun de ses jubilés par un combo CD+DVD live (L'envers du tour en 2005 puis 20 ans d'ombre & de lumière en 2013), Tagada Jones célèbre le troisième de bien belles manières, à la fois sur scène et chez ton disquaire.

À l'heure où sont écrites ces lignes, l'actualité du quatuor est foisonnante, entre participation à la Tournée du siècle avec Les $heriff, Dirty Fonzy et, selon les dates, Not Scientists ou Darcy (dont l'ultime épisode Strasbourgeois vous sera narré par votre Gui de Champi préféré) et, lui emboîtant le pas, la nouvelle édition du festival Fontenaisien On n'a plus 20 ans où la tête d'affiche jouera chaque soir dans une configuration différente ("Circus", avec les Bidons de l'An Fer et "Orchestra"), non sans avoir offert à plusieurs autres groupes la possibilité d'ouvrir les hostilités... Moments que l'on rêverait de voir immortalisés en vidéos pour qui ne pourra se rendre à l'une ou l'autre de ces soirées.
Ça, c'est coté scène. Coté studio, les Tagada Jones n'ont pas non plus chômé. Puisque après avoir délivré le clip d'un titre inédit il y a plusieurs semaines ("Le poignard"), ils refont parlé d'eux depuis ce 1er mars avec les sorties concomitantes d'une autre vidéo et d'un nouveau disque, dénommé Trnt, comme "Trente" (succombant à la mode des voyelles en moins), sujet de la présente bafouille.
Si la mention "Best-of" figure bel et bien sur le digipak, le groupe, à la fois artisan d'un écosystème depuis des décennies, le cœur sur la main et sachant se remettre en cause, ne s'est pas contenté de regrouper des morceaux extraits de sa discographie haute, sans compter EP's et lives, d'une dizaine d'albums studio. Niko, Stef, Job et Waner, formant les Tagada depuis environ 10 ans (un anniversaire dans l'anniversaire ?), ont fait bien mieux que cela : ce sont tout bonnement 15 titres du corpus Tagadien, ajoutés au "Poignard", qui ont été ré-enregistrés pour l'occasion ! Autant à 4 ("Zéro de conduite", "Je suis démocratie", "Cargo", "Le feu aux poudres", le sauvetage de "Elle ne voulait pas"...), qu'à bien plus nombreux car c'est accompagnés d'un quatuor à cordes que l'on redécouvre, pour le plus bel effet, "Combien de temps encore ?" (objet du nouveau clip), "Thérapie", "Tout va bien" et "SOS dub", en compagnie des Bidons de l'An Fer que sont revisités tambours-battants "Le dernier baril" et "Nation to nation", et aussi -ce qui a dû donner quelques sueurs froides lors du mixage-, que tout le monde (éloge de la force du collectif, si chère au groupe) est invité à jouer sa partie afin de ré-explorer "ensemble" le terrible "Vendredi 13" et l'excellent "Mort aux cons".

Seul bémol : la tracklist de Trnt, 16 pistes en plus de 50 minutes, expose que Le feu aux poudres (2006), La peste et le choléra (2017) et le petit dernier À feu et à sang (2020) en constituent plus de sa moitié. Ainsi, les aficionados de la première (et de la deuxième) heure en resteront sans doute sur leur faim de n'avoir qu'un nouveau "Hold-up" à se mettre dans les esgourdes (seul titre à rappeler les diverses productions d'avant l'an 2000) tandis que les remises au goût du jour -aussi réussies soient-elles- de "Manipulé" et "SOS dub" peuvent faire regretter de ne pas avoir davantage de matériau en provenance de la séquence composée par les aussi géniaux qu'incontournables Manipulé (2001) et L'envers du décor (2003).

On connaissait le groupe pour sa vindicte acérée, ses engagements, sa générosité et son ouverture à "d'autres sonorités". Avec Trnt, preuve est faite que le quatuor sait se réinventer et s'installer dans la durée. Jusqu'à imaginer Tagada Jones en haut de l'affiche lors d'une future Tournée du siècle dans 10 ans ? Sans conteste, ce serait mérité.