Southerly - Youth Pas besoin de chercher midi à quatorze heure, la pop des années 90 était quand même mille fois plus inventive et enthousiasmante que celle que l'on pratique au XXIe siècle. Celle-là même si souvent aseptisée et codée pour plaire fatalement au plus grand nombre. Ou pire, pour déplaire politiquement au moins de monde possible. Par voie de conséquence, un groupe qui sort en 2011 un disque de pop aux accents rock/shoegaze/folk des nineties a un peu tout compris à la notion de prise de risques artistiques. Et donc rien à celle du marketing musical actuel. Mais Southerly n'est pas vraiment là pour penser à ça et veut simplement laisser parler sa musique sans autre prétention que celle de la diffuser auprès du plus grand nombre. Quitte à déplaire. Ou pas. Mais... si parfois quand même un peu...
Un artwork enneigé, un disque enveloppé dans un digisleeve tout ce qu'il y a de plus simple, comme à son habitude Arctic Rodeo Recordings soigne le support sans avoir besoin d'en faire trois tonnes. Et par chance (ou plutôt par choix), le label allemand est tombé sur un groupe dont la musique sied parfaitement à l'objet que l'on tient entre les mains. "Suffer", titre inaugural de Youth, est ainsi un premier morceau mélangeant habilement les codes de l'indie-rock des nineties et de la pop de la même époque avec un son qui navigue entre les époques et une mélodie aussi monochromatique qu'efficace. "Do we believe ?" passe en mode pop exclusive et suit la même logique. Pas besoin de vouloir la jouer arty et démesurément prétentieux avec des aspirations auteuristes absconses pour faire de la bonne musique. Plus ambitieux, l'éponyme "Youth" met un peu plus de finesse et de subtilité dans ses arrangements et s'en sort d'autant mieux qu'il précède un "All abandonned" qui est l'une des très belles pièces de l'album. Folk/pop, intimiste et raffinée, elle permet ici à Southerly de se sublimer et de confirmer tout le bien que l'on pensait de lui depuis quelques titres.
Trop facile de se laisser aller et de se reposer sur ses lauriers alors le groupe continue de soigner son écriture avec un "Her name is forward" en forme d'un hymne pop avec un sens de la maîtrise rare. Tellement du reste que la suite déçoit par son inconstance et son incapacité à se hisser au même niveau d'écriture ("Lust","Sacrifice", "Goin down"), si ce n'est sur "So you' re right". Comme si Southerly avait eu du mal à se remettre d'une première moitié d'album en forme de sans-faute et qu'il cherchait désespérément à trouver le moyen de faire aussi bien. Et s'il y parvient par moments ("Breaking in"), le groupe peine à exister sur la durée : un disque paradoxal parsemé de quelques très belles fulgurances mais plombé par quelques titres insipides. A la fois talentueux et inconstant. Verdict mitigé.