Soundgarden - Down on the upside Superunknown a consacré Soundgarden grâce à une flopée de singles excellents en guise de teasing de luxe à un album tout aussi excellent. Deux après, le quatuor de Seattle revient avec un disque nommé Down on the upside : pas de "Black hole sun" bis à l'horizon mais un p#@%*n d'album qui confirmera l'état de grâce dans lequel se trouve le groupe à cette époque.
Une introduction marécageuse, une voix au grain reconnaissable entre mille, un riff et un refrain tenace qui saura se faire une place de choix dans vos neurones : c'est le menu déjà fort alléchant de "Pretty nose" qui se déclinera tout au long des 16 pistes que contient Down on the upside. Un menu copieux, profitez-en, ce sont les Soundgarden qui régalent. Avec "Rhinosaur", on se dit déjà que l'on a affaire à une composition banale : grossière erreur, le rythme s'emballe, un solo de guitare en zigzag qui convie à l'orgasme musical où comment monter de la division d'honneur en première ligue en deux temps-trois mouvement. Les morceaux suivants, "Zero chance" et "Dusty" continuent de propager le venin "Soundgarden" tandis que "Ty cobb" se démarque comme l'un des titres qui déménagent réellement dans un disque qui navigue plutôt sur un océan mid-tempo ombrageux que sur une mer déchaînée : une mandoline frénétique, un flux tendu et un rythme soutenu à vitesse grand V, un Chris Cornell survolté qui nous ramène au temps ou Soundgarden c'était aussi des brûlots nerveux à la manière d'un "Jesus Christ posse". Le calme relatif après la tempête, "Blow up the outside world" fait cohabiter durant 6 minutes une douce escalade d'intensification et de sublimes lignes de chants par un musicien au sommet de son art. Connecté avec "Blow up the outside world" dans cette recherche de zone tempérée, "Burden in my hand" confirme la tendance générale au changement de ton : du jus d'orange dans leur vodka, les Soundgarden en ont ajouté mais avec goût et nous proposent une pièce de choix à l'irrésistible penchant pop enjolivé par un Chris Cornell encore une fois très inspiré vocalement. Après une trilogie de morceaux ou Soundgarden a côtoyé les astres, c'est un "Never named" beaucoup plus basique mais tout autant réussi qui renoue avec un climat plus agité alors qu'"Applebite" semble un instant reprendre contact avec le fantôme de la facette la plus assombrie de Superunknown via une ambiance plus malsaine et lancinante, où Chris Cornell se mute en oiseau de mauvais augures. 9 titres se sont écoulés et les Soundgarden ne sont toujours pas pris en défaut. Ne comptez pas sur eux : les types sont expérimentés. A la course de vitesse, ils préfèrent pratiquer le marathon. Ils franchiront d'ailleurs la ligne d'arrivée largement en tête, à peine essoufflés. Les "Never the machine again", "Tighter & tighter", "No attention" et consort montrent les Soundgarden encore plus en lévitation qualitative notamment au travers d'un Kim Thayil habité par les dieux du rock'n'roll, pourvoyeur de phases musicales grandioses et de solos imprégnés d'un feeling de classe mondiale. Enfin (déjà ?), "An unkind" et "Boot camp" clôt Down on the upside : des morceaux chloroformés avec des sursauts de nervosité qui invitent à l'apaisement de soi.
Les Soundgarden nous livrent un album faux-jumeau de Superunknown : jumeaux parce qu'il lui est équivalent en qualité, faux parce qu'il se distingue de ce précédent opus par de nettes velléités pop et l'adoucissement général d'un ton qui se fait moins sombre et par conséquent plus calibré. Kim Thayil le reprochera d'ailleurs à Chris Cornell, ce qui provoquera des tensions et la fin du groupe. Soundgarden s'est éteint avec cet album, influençant encore actuellement la musique d'un paquet de formations diverses (Black Stone Cherry, Seemless, Honcho, Loading Data etc...,)