Le trio franco-suisse Sooma a délivré tout récemment un troisième album de noise rock teinté d'une saveur punk et chanté en français qui nous a agréablement surpris. Un disque bouillonnant à l'énergie communicative, tout en étant poétique. On a pu échanger avec Yannick (guitare/chant) pour en savoir un peu plus sur eux et ce nouvel album.
Salut Sooma, pouvez-vous vous présenter en rappelant un peu la genèse et les étapes d'évolution du groupe ?
Sooma a été créé en 2015. On a enregistré trois albums à ce jour et joué plein de concerts un peu partout en Europe dans de superbes salles et dans des lieux miteux, parfois devant personne, parfois devant des centaines de personnes.
J'ai cherché la signification de Sooma. Je n'ai rien trouvé d'autre que le nom d'un traitement contre la dépression ? Vous êtes dépressifs ?
Si le groupe, en tant qu'entité, est dépressif ? Non.
Alors, vous venez de Zurich, une ville germanophone, et vous chantez en français... C'est assez curieux, non ?
Pas plus curieux que de voir une grande partie des groupes, venant de régions non-anglophones, chanter en anglais, non ?
Chanter en français sur du rock à tendance noise-rock/grunge, c'est plutôt rare. Pourquoi ne pas s'être tourné vers l'anglais plutôt ?
Vu qu'on avait utilisé l'anglais depuis nos débuts, on voulait essayer quelque chose de nouveau sur Drü.
Drü, le nom de votre nouveau disque, veut dire "trois" en suisse allemand. Trois comme le troisième album, mais aussi comme le trio que vous êtes. Est-ce que cette formule en trio n'est-il pas finalement la meilleure pour jouer du rock brut ? On distingue bien les instruments de tout le monde, personne ne se marche dessus, ça facilite la composition et les décisions, et ça évite trop de rajouter des artifices sonores. Vous en pensez quoi ? Vous auriez pu vous imaginer en quatuor ?
Je ne sais pas si c'est la meilleure formule pour du "rock brut" mais, pour nous, ça a toujours très bien fonctionné. On avait déjà pensé à plusieurs reprises à ajouter une quatrième personne pour les parties synthé en live, mais finalement, on y a toujours renoncé.
Votre nouvel album est sorti chez Gluttony Records, le label de votre bassiste. C'était la manière la plus évidente pour sortir Drü ?
Tout l'album est fait de manière DIY. Il nous paraissait donc naturel de sortir l'album sur le label de Luc.
L'album a t-il été fait maison ? Vous avez un studio ?
Oui, tout a été fait maison dans notre salle de répète à quelques mètres sous terre, dans un abri aérien de la ville de Zurich. Sauf le mastering qui a été réalisé par notre ami Adrien Pallot chez Chab Mastering à Paris.
Vous affirmez qu'il s'agit là de votre album le plus doux, sensible et poétique. Que vouliez-vous dire par là ? Car la douceur, par exemple, n'est pas forcément très présente. Dans Drü, il y a une tension permanente je trouve.
On a tendance à croire que quelque chose est "négatif" ou "dark" quand c'est bruyant ou abrasif. Mais il y a souvent une forme de douceur, de poésie, peut-être même d'espoir, cachés dans la tension, le bruit. Pour nous, en tout cas.
S'il y en a eu, quelles erreurs avez-vous commises sur vos précédents disques que vous avez corrigés sur Drü ?
Chaque album représente un instant T dans l'existence de Sooma. Un album sonne donc comme on voulait qu'il sonne au moment de sa création, même si on pouvait changer certaines choses quelques années plus tard. Alors, on ne peut pas vraiment parler d'erreur, mais plutôt de changement.
Victor, votre ancien bassiste, a quitté le groupe en début d'année, remplacé par Luc de Scrtch et Future EXES. Pourquoi ce départ ? Et a-t-il enregistré le disque ? Comment s'est passé l'intégration de Luc ?
Drü est le dernier travail de cette formation qui a longtemps été Sooma. Les choses changent, nos envies aussi. C'est beau de pouvoir finir cette étape avec cet album que nous avons composé et enregistré tous les trois. Luc est un ami du groupe de longue date, ainsi qu'un magnifique musicien donc aucune intégration n'a donc été nécessaire.
Vous suivez un peu la scène française rock ? Avez-vous eu des coups de cœur ces derrières années ?
Il y a plein de groupes intéressants sur la scène rock française. Lysistrata reste pour nous l'un des meilleurs groupes live de France.
Comment s'est passé votre tournée avec Zeal & Ardor en 2022 ?
C'était une expérience inoubliable. Tant sur le plan humain que musical. De pouvoir jouer chaque soir devant 400 à 1200 personnes, dans de magnifiques salles, voire même des salles historiques pour certaines, pour un public aussi accueillant et ouvert à un son si différent de celui du groupe qu'il était venu voir, a été une chance incroyable pour nous. En plus, tout ça avec un groupe comme Zeal & Ardor, composé de personnes d'une extrême gentillesse, aussi bien au sein même du groupe que tous les acteurs autour.
Quand on parle de rock un peu bruyant et hypnotique, ça m'évoque l'actualité avec le décès récent de Steve Albini. Que retenez-vous de cet artiste et producteur qui a fait tant de chose pour cette scène rock ? Cela vous aurait intéressé d'enregistrer avec lui par exemple ?
Steve Albini a clairement façonné la scène alternative. In utero fait notamment partie de nos albums préférés. Il a même façonné, sans le savoir, le son de Drü. Car ce sont ses tutos sur YouTube qui nous ont montrés où positionner les micros et comment enregistrer la batterie. Pour ce qui est d'enregistrer avec lui, cela aurait été bien sûr très beau. On y avait même pensé à plusieurs reprises, mais on a fait d'autres choix.
Dernière question : quel est l'avenir à court, moyen et long terme pour Sooma ?
On verra bien...
Qué será, será
Whatever will be, will be
The future's not ours to see
Qué será, será
What will be, will be
Merci à Floriane de Shake Promotion.
Photos : Pascal Burger
Publié dans le Mag #61