The Somnambulist - Moda borderline Les ingrédients, cela est indispensable pour arriver à ses fins (faims ?) et prendre du plaisir par la suite. Le disque aussi. Ce midi, c'est The Somnambulist, un trio rock stupéfiant de Berlin composé d'Italiens et d'un Français (l'ex-violoniste des Hurlements D'Léo). Original, non ? Enfin, tant que la musique l'est, c'est le principal. Avant d'appuyer sur "play", je sors tout : le chocolat, les œufs, les ustensiles comme le fouet (NDR : je suis dans ma cuisine là), les deux saladiers pour séparer les jaunes des blancs. Parce que ce n'est pas une fois les doigts englués d'ovalbumine que je vais dégueulasser le trackpad de mon Mac. Soyons sérieux.

"Red carpet" démarre. Un tapis rouge ? Sympa l'accueil ! Toi, tu veux être le premier à la goûter !!! Bref, j'accroche de suite, la batterie qui marque le pas, le violon qui fait son effet, les grattes incisives, l'envolée et tout. Bonne pioche ! Je casse ma tablette de chocolat dans le saladier sur l'air d'un "Don't you want to devour this war ?" dérangeant. Mais qui est cet homme qui chante ? Tom Waits ? Arno ? Il me donnerait presque envie de me délecter d'un whisky et de crapoter un cigare, ce con ! J'ouvre le micro-onde pour faire fondre mes carrés de chocolat préalablement imbibés d'eau et là, ca s'emballe complètement. Vraiment dérangeante cette chanson. A peine je ressors mon saladier de chocolat fondu que je retombe avec "Luce" sur la voix obsédante de ce gars. Cela m'effraie un peu, mais comme je suis fan des premiers dEUS, je suis blindé. Je ne cèderai pas. On dit toujours "jamais deux sans trois", je m'en fout, je suis concentré sur l'opération la plus délicate : la séparation du jaune et du blanc d'œuf. Faut pas se tromper, le jaune va avec le chocolat fondu et le blanc reste à part dans un saladier vide. Tiens, avec ces conneries, je viens de zapper le titre éponyme de cet album. Comment s'appelle-t'il déjà ? Ah oui, Moda Borderline. Ce titre, c'est comme sa musique, difficilement compréhensible. Encore un truc d'italiens parlant de nana "borderline" ? Je demanderai l'explication à Cactus à qui je pense en écoutant cet album d'ailleurs. Un gars qui a la voix éraillée sur une musique énigmatique, ca ne peut être que pour lui. Je mélange mon chocolat fondu et mes jaunes sur le rythme effréné de "80's violence" en reniflant les relents de cette exquise mixture. Tout d'un coup, voilà que mon chat essaie d'attirer mon attention pendant que je laisse reposer mon mélange. A l'instar de l'aventureuse et non moins post-rockeuse "Quinto mistero della Gioia", je lui dégote un truc auquel il ne s'attend pas : une boite de sardines coincées entre les huiles et les aromates. Tranquille désormais, je vais pouvoir passer à l'étape suivante, la plus éprouvante : faire monter les œufs en neige. Une pincée de sel dans le liquide visqueux et c'est parti. Je tiendrai exactement la même cadence que la noisy "Go is not a good shot" vibrante à la fois par sa tranquillité et sa folie, un peu comme si les Melvins rencontraient Sonic Youth. Du lourd quoi ! Faut faire des pauses ou ralentir avec le fouet, la crampe n'est jamais loin si on veut faire son malin. Je verse les œufs en neige (c'est d'actualité en plus) dans l'autre saladier par intermittence et mélange avec délicatesse à l'aide d'une spatule. Je pose de fines lamelles de chocolat dessus en guise de touche finale. Voilà, ma potion va pouvoir se reposer pendant trois à quatre heures dans le frigo. Pour cela, je lui laisse en fond sonore le dernier titre de l'album, "Alice never". Ce sera parfait.

Cette recette aurait très bien pu s'appeler la Moda Borderline mais on lui a donné le nom de "Mousse au chocolat". Peu importe le nom en fait, puisque les deux ont une saveur unique et se digère carrément bien.