En ce début d'année, je disais beaucoup de bien du The blackbird and the dying sun de Seeds of Mary qui continuait d'affirmer ses influences tout en construisant des titres assez fouillés et pointus, refusant toujours la facilité dans un genre (entre le post-grunge et le stoner alternatif) où certains cherchent davantage à atteindre l'efficacité par la facilité plutôt qu'autre chose. Pour conclure une tournée d'une vingtaine de dates cet automne (de Nantes à Grenoble et d'Amnéville à partout autour de Bordeaux) en mode à la cool (quelques showcases et bars), concert avec une belle affiche (partagée avec El Royce ou Klone) ou grosse soirée (avec AqME et Dagoba au BT59, release party avec Bukowski...), les Bordelais offrent un EP (dispo sur Bandcamp) un peu particulier. C'est en effet un double duo qui nous est proposé, d'abord deux titres qui sont des "chutes" de studio, ensuite deux titres qui sont des covers.
Avant d'aller plus avant dans la découverte de ce mini album, je tiens à saluer, comme je le fais souvent, le magnifique travail réalisé pour l'artwork, si l'œil/fleur au verso est un peu énigmatique, la main/arbres sur le recto est sublime, et la couleur, bien qu'inattendue, donne un côté surnaturel et beaucoup de classe. J'adhère. Idem pour les 4 plages, c'est parfois évident de comprendre que telle ou telle chute ne soit pas gardée, ici, "This is where it hurts" ou "A place to disappear" auraient très bien pu se retrouver sur l'album sans l'affaiblir. D'ailleurs si les deux sont à l'origine de l'EP, c'est bien qu'ils valent le coup (et le coût), sinon, autant les laisser dans le placard à archives. Le break avec les effets sur le premier morceau peut déstabiliser mais l'ensemble et les refrains sont suffisamment lourds pour faire pencher la balance du bon côté. Le côté un peu planant (très ou trop Alice in Chains peut-être ?) fait le sel du deuxième qui a ma préférence avec son petit solo en son clair très Gilmour...
Transition absolument pas téléphonée pour aborder la question des deux covers... puisque la première met à l'honneur Pink Floyd et son "Hey you" (même si c'est Roger Waters qui écrit toute la chanson, sur The wall, il ne laisse que des miettes à ses comparses dont le déchirant "Comfortably numb"). Ici, la reprise est excellente car elle garde l'esprit du morceau tout en n'essayant pas de copier l'originale, le son, c'est celui de Seeds of Mary, la disto qui se traîne, le chant qui survole le tout et cette éclaircie magique (but it was only a fantasy, the wall was too high as you can see...) et la reprise déchirante du "Hey you". C'est un des titres les plus forts de l'œuvre personnelle de Waters, elle conserve ici toute sa force. Broken n'est pas le plus emblématique des albums de Nine Inch Nails mais précédant The downward spiral, il témoigne de l'énergie punk de Trent Reznor (très proche à l'époque des productions de Ministry dans le son), très industriel, ce "Wish" sauce bordelaise est plus surprenant par son choix que par son interprétation qui laisse moins de place à la touche perso tant on est marqué par son rythme. Il n'altère pour autant pas la qualité de cet EP remarquable.
Publié dans le Mag #35