Sathonay - Addio Al Passato À l'origine projet solo du musicien et activiste lyonnais Nico Poisson (fondateur du label SK Records ayant joué pour Ned, Total Eclipse ou encore The Rubik's), Sathönay s'est peu à peu agrandi en accueillant notamment en son sein un artiste que l'on connait bien dans notre tanière, à savoir François Virot (Clara Clara, Reveille (le groupe français), La Féline) qui prend ici le poste de batteur dans cette formation qui a fait paraître son troisième album - maintes fois repoussé - en novembre 2022 : Addio al passato. Enregistré à quatre, avec Léonore Grollemund au violoncelle et Franck Testut à la basse, dans une maison située dans le Vercors, ce nouveau disque livre toute sa magie au fur et à mesure que les écoutes de ses six titres défilent et s'imprègnent dans notre encéphale comme de l'eau dans une éponge.

Sathönay est une entité un peu particulière dans le paysage indé français puisque sa musique est portée par les errances d'un saz (un luth turc bien connu pour être également utilisé par Altin Gün) qui la revêt logiquement de sonorités orientales. Cela nous rappelle certaines ambiances des quartiers d'Istanbul, et pourtant, le style de la formation lyonnaise n'a pas grand-chose à voir avec la musique anatolienne. Ici, on baigne plutôt dans un mélange de rock vagabond qui puise autant dans la musique des années 70, dont le rock psychédélique et le krautrock, que dans l'audace d'une pop progressive sans barrière teintée de folklore. Par moments représentatives d'une transe au charme capiteux ("Long long walks"), les compositions d'Addio al passato peuvent se révéler être également plus directes, comme des petits virages pas trop brutaux sur la trajectoire de notre voyage en immersion ("Find another use for it", "Le tour du jardin"). C'est souvent dans ces cas-là qu'on perçoit mieux la qualité et la force des chants de Nico et François.

Enregistré par Guillaume Toullec et Matthieu Gaud grâce à leur studio mobile (le "Schwifty audio") entre les deux confinements de 2020, puis mixé par Stéphane Laporte (Centenaire, Karaocake), cet album bénéficie d'un son à la hauteur de la qualité émérite de ses chansons. Il retranscrit magnifiquement bien le travail important des cordes (saz, guitare, violoncelle) qui reste, selon moi, la quintessence de Sathönay. Sans volonté de figurer dans la grandiloquence ou de jouer au bord du précipice, les lyonnais, avec de l'ambition et d'audacieuses idées, garde le cap de bout en bout pour nous emmener loin, très très loin même. Chapeau bas !