Rock Rock > Rocket Juice and the Moon

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Enième (super)projet initié par l'insaisissable Damon Albarn qui après Gorillaz, The Good, The Bad and The Queen puis DRC Music (entre autres) à rameuté sa tribu artistique pour un nouveau jouet, Rocket Juice and the Moon est donc l'association du frontman de Blur et de Tony Allen, pape de l'afrobeat, batteur de Fela Kuti et déjà membre de The Good, The Bad and The Queen, le tout arbitré par un nouveau venu au sein de la "famille" musical d'Albarn : Michael Peter "Flea" Balzary, surtout connu pour être le génial bassiste d'un petit groupe absolument confidentiel : Red Hot Chili Peppers, mais pas que (il a joué avec Jane's Addiction, The Mars Volta et quelques autres et est également actif au sein d'Atoms for Peace aux côtés de Thom Yorke mais c'est une autre histoire).
En bref, tout ce petit monde se retrouve dans un avion, en direction de Lagos (Nigéria), un beau jour de printemps 2008, où les trois musiciens sont conviés à jouer et échanger avec Africa Express Collective dont ils sont très proches depuis des années. Une rencontre fortuite qui va faire naître chez le trio une volonté commune d'initier un projet commun, lequel prendra quelques années à se monter du fait des emplois du temps particulièrement chargés de chacun. Si bien que ce n'est qu'en 2011 que les trois parviennent à faire coïncider leurs agendas respectifs afin de se retrouver au studio de Damon Albarn pour mettre sur pied, trois semaines durant, ce qui constituera un album composé à six mains. D'autres sessions de travail seront organisées au cours de l'année, à Paris, Berlin ou Chicago et ce n'est qu'en octobre que le projet est officialisé... sous le pseudo d'Another Honest Jon's Chop Up! (du nom du propre label de Damon Albarn Honest Jon's) sous lequel le groupe fait quelques dates. Une poignée de jour plus tard, c'est sous le nom de Rocket Juice and the Moon que le trio fait part de son intention de livrer un album studio. Eponyme, celui-ci sort au printemps 2012 via Honest Jon's.

Rocket Juice and the Moon / Chronique LP > Rocket Juice and the Moon

Rocket Juice and the Moon Sur le papier Damon Albarn qui enregistre de nouveau aux côtés de Tony Allen et pour la première fois avec Flea des Red Hot Chili Peppers, ça fait, pour peu que l'on soit un peu sensible à l'éclectisme du garçon et ses penchants hyper-créatifs hors-normes, tout de même pas mal envie. Oui, "mais" on peut aussi rester sur la réserve en se souvenant du très pénible The Good, The Bad and The Queen au sein duquel on retrouvait déjà, bien que dans sur un concept quelque peu différent, Tony Allen et aussi (surtout) une poignée d'invités de marque (dont DangerMouse) pour un résultat plus que décevant.

L'un était centré sur Londres, son univers et ses atmosphères urbaines multiculturelles, celui-ci se tourne vers le continent africain, ses sonorités atypiques et son exubérance en forme de source inépuisable d'inspiration pour Albarn (qui lui a déjà consacré plusieurs albums avec Mali Music puis DRC Music notamment). Et l'amour que porte l'anglais à l'Afrique est l'évidence-même qui fait de ce Rocket juice and the moon un disque pour le moins... particulier et déstabilisant. Une oeuvre particulièrement hétérogène, enregistrée en partie à Paris, Berlin, Chicago et bien entendu au Studio 13 londonien de Damon Albarn himself, soit une collection de dix-huit pièces ayant parfois peu avoir les unes avec les autres et qui sert surtout de prétextes à toutes sortes d'expérimentations, tentatives et collaborations diverses et variées.

On y croise ainsi la grande prêtresse de la soul Erykah Badu, honorant le projet de sa présence sur l'hypnotique "Hey, shooter" ; la chanteuse malienne Fatoumata Diawara et son compatriote Cheick Tidiane Seck, le rappeur ghanéen M.anifest et l'ensemble de cuivres chicagoan Hypnotic Brass Ensemble, "protégés" d'Albarn qui l'héberge sur son label Honest Jon's (également derrière ce Rocket Juice and the Moon), entre-aperçu sur l'album Plastic beach de Gorillaz. Autant d'"associations" ponctuelles, aussi prestigieuses soient-elles, mais qui donnent des résultats pour le moins variés : plutôt convaincants sur "Lolo" ou "Follow-fashion", Cheick Tidiane Seck et M.anifest se ratent ainsi dans les grandes largeurs avec "Chop up", livrant le morceau de trop sur lequel la cohérence artistique est aux abonnées absentes. Ou alors c'est un concept. Et encore, là ce n'est rien à côté d'"Extinguished". Un titre avec Tidiane Seck, qui vire rapidement au grand n'importe quoi sans que les pourtant expérimentés musiciens aux commandes du projet ne daigne rattraper ce début d'accident industriel que l'on entrevoit trop souvent au cours de l'album (même sur la bonus-track "Manuela" avec pourtant Erykah Badu, c'est dire).

Entre quelques grappes de titres plus ou moins expérimentaux, quasi exclusivement instrumentaux et partiellement réussis ("Forwards sweep", "Check out", "Rotary connection"...), ou pas, Damon Albarn se paie également le luxe de se planter sur un "Poison" pour lequel il est pourtant largement mis en avant et brise de nouveau le semblant de "logique" que commençait à posséder l'album. Les morceaux s'enchaînent donc tant bien que mal, formant un "tout" régulièrement bancal, parfois parsemé de fulgurances afro-beat funky délicieusement foisonnantes, entourant une poignée de "rencontres" musicales inspirées ("Benko" avec Fatoumata Diawara en duo vocal avec Albarn, "The unfadable" avec M.anifest...) et d'une bonne grosse moitié de titres à jeter à la poubelle. Avec la comète musicale qu'est Rocket Juice and the Moon, ton hyper-créativité a trouvé ses limites Damon...