Queens Of The Stone Age - Era vulgaris Le voilà donc ce très attendu successeur de Lullabies to Paralyze, signé Josh Homme et toute une famille de musiciens qui gravitent autour de lui et que l'on retrouve variablement sur les albums des Queens of the Stone Age ou sur leur projet parallèle : les Desert sessions, voire ponctuellement du côté des Eagles of Death Metal. Soyons clairs, il sera sans doute bien difficile aux QOTSA de faire mieux que Rated R et Songs for the Deaf. Mais après un Lullabies to Paralyze qui a tendance à se bonifier avec le temps, voilà qu'Era Vulgaris débarque dans les bacs précédée d'une aura consécutives aux annonces d'un casting grand luxe. C'est ainsi que l'on retrouve autours de l'inénarrable Josh Homme, un gang de mercenaires composé de Troy Van Leeuwen, Michael Schuman, Dean Fertita et Joey Castillo, mais également la traditionnelle paire composée par Chris Goss (Kyuss, Masters of Reality, Goon Moon) et Mark Lanegan (Screaming Trees, Soulsavers), mais également pour cette occasion Julian Casablancas (The Strokes) et Trent Reznor (NIN), ce-dernier ayant participé au morceau éponyme de l'album... mais qui n'y figure pourtant pas ([NDLR : le morceau a finalement été retiré car il n'était selon Homme trop différent du reste de l'album). En clair, un cast cinq étoiles pour un album qui allait forcément valoir le détour.

Après un Lullabies to Paralyze à l'efficacité démente et un Death by sexy (des EoDM) à la folie contaminatrice, on a droit à un disque qui change son fusil d'épaule ; les premiers titres de cet Era Vulgaris lorgnant bien volontiers du côté des expérimentations incantatoires des Desert sessions avec une prod bien moins ronde que d'ordinaire. Plus rèche, rugueuse, presque lo-fi..., elle donne à cette nouvelle livraison des reines de l'âge de pierre un côté "roots" bienvenu. Et dès les premières secondes de "Turning on the screw", les QOTSA nous envoient droit dans les écoutilles une première salve de ce riffing inimitable cher au groupe, le tout sur un rythme nonchalant, un psychédélisme "Crimsonien" et une mélodie plutôt facile mais toujours efficace. Josh Homme et son gang enchaîne en faisant parler la puissance sur un "Sick sick sick" complètement "rock in your face", brut de décoffrage, ultra-saturé et ravageur, avec en guise de petit plus qui fait la différence, un Julian Casablancas échappé de The Strokes le temps d'une furtive apparition. Un single pas forcément évident mais qui se fait l'écho d'une volonté de la part du groupe de ne pas céder face à la pression des majors et de la médiocrité crasse. Plus classiques dans leurs formes et dans l'esprit des tubes de Lullabies to Paralyze, des titres tels que "I'm designer" ou "Into the hollow" montrent un groupe désireux de balader son groove "desert rock" le temps d'un album aux instrumentations plus prog' et aux reliefs plus bluesy que ses prédécesseurs. C'est avec cet esprit guerillero et une coolitude phénoménale, que les QOTSA balancent sur la platine un "Make it wit chu" hypnotisant et inspiré, issu des Desert sessions ; ou un "Misfit love" lancinant, crasseux et écrasant sous un soleil de plomb typiquement stoner rock.

Era Vulgaris est un album brut de décoffrage, un disque où l'on ressent complètement l'apport évident d'un Chris Goss, éminent spécialiste du rock "stone" qui est, comme d'habitude, venu aider Josh Homme et ses potes à sculpter quelques pierres blues psyché rock du plus bel effet. Autre single, plus évident cette fois, "3's & 7's" est le théâtre d'une furieuse leçon de rock rugueux et devastateur, couillu et salvateur, dans la plus pure tradition des reines de l'âge de pierre... Techniquement béton, inspiré, inventif et mêlant morceaux savamment taillés misant sur une efficacité sauvage et des velléités plus expérimentales, les Queens of the Stone Age livrent avec ce nouvel opus un disque plus difficile d'accès qu'un Songs for the Deaf par exemple, mais dans le même temps exceptionnellement varié et à la créativité étonnante ("Suture up your future", "Run pig run"). Petit bémol toutefois, l'absence du titre éponyme sur la version simple (il figure notamment sur les version UK et japonaises) et qui aurait pourtant largement sa place sur le tracklisting d'Era Vulgaris. Mais en l'état, cet album racé et tranchant, paradoxalement décevant à la première écoute et exaltant dès la troisième, ne poura que combler les amateurs de rock pur et dur...