Il n'y a pas que les albums qui peuvent être longs à sortir, les interviews peuvent l'être aussi ! Celle des Suisses de Puts Marie l'a été, à l'image de son album aussi facile que difficile à appréhender. Quoi qu'il en soit, cela nous fait grand plaisir de recueillir les sentiments de Max, frontman de cette formation qui puise large musicalement, entre pop, jazz, blues, hip-hop et rock, bien entendu.
Pour commencer, je voulais vous demander si c'est vrai que votre nom de groupe a été choisi un peu à l'arrache, juste avant votre premier concert. Si tout ça est vrai, alors qui est cette Marie ?
Oui c'est vrai. Je n'étais pas encore avec eux à ce moment-là. Je suis presque sûr que c'était une fille que quelqu'un aimait beaucoup à ce moment là. Obligé, ça doit être ça.
Avant la sortie de votre nouvel album, je n'avais pas jamais eu vent de votre musique. Pourtant, vous existez depuis 20 ans et votre cinquième album est sorti l'année dernière. Est-ce que vous pensez que Puts Marie a trouvé son public en France depuis le temps ?
On a commencé à jouer en France en 2004. À ce moment-là, plutôt semi pro encore. On jouait plus dans la rue où beaucoup de gens nous voyaient et nous écoutaient. On jouait souvent au festival d'Avignon. Là aussi on avait une grande visibilité. Jean Paul Gaultier nous a même vus au Délirium !
Mais clairement, depuis que nos disques sont sortis officiellement en France avec Yotanka, plus de la distribution, on a eu beaucoup plus de visibilité et beaucoup plus de gens nous ont connus ces six dernières années.
Est-ce que vous avez compté le nombre de concerts que vous avez effectué depuis le début avec Puts Marie ?
Oui, on a une liste. Il y en a eu plusieurs milliers ! Il y avait des moments où en a vraiment beaucoup joué. On aime toujours beaucoup jouer.
Vous êtes capable de jouer pas mal de styles, du jazz au rap en passant par le rock. Et le tout avec brio. Quelle est votre éducation musicale à vous tous ? École de musique ? Autodidacte ? Et quels sont les artistes qui vous ont accompagnés toute votre vie ?
Certains d'entre nous ont fait des écoles de musique mais pas tous. Les autres sont autodidactes. On écoute tous plein de musiques différentes : classique, rap, musique du monde, salsa, arab, jazz, pop et beaucoup plus. Pas vraiment de rock même si on en joue. On écoute surtout la musique "morte". Il y en a tellement à découvrir encore. Les musiques actuelles sont dures à suivre. Il y en a trop.
Ce qui est bluffant, c'est qu'en vous écoutant, on a clairement l'impression d'entendre un groupe anglophone. D'où vous vient cette aisance avec l'anglais ?
J'ai passé beaucoup de temps aux États-Unis. J'aime cette langue. J'aime les langues en général. Mais l'anglais pour moi c'est la langue de la musique. J'aime comme ça sonne et le rythme que ça exprime. C'est logique pour moi et pour notre musique.
"Catching bad temper" s'oriente notamment vers un chant et un phrasé rap, ce qui vous ferait presque passer pour un groupe de hip-hop par moments, alors que sur scène, c'est le côté rock qui ressort le plus. Vous le sentez comme ça ?
Non. Pas vraiment.
Le chant rappé ressemble notamment à l'un des membres de Puppetmastaz. J'imagine que vous connaissez. Du coup, quels sont les groupes de hip-hop qui ont pu influencer ton flow ?
Kool Keith, Madvillan, Mos Def, Saul Williams, Madlib, MF Doom, Boom Bip & Dose One, Mobb Deep, Wu-Tang Clan, GZA, Pharcyde, A Tribe Called Quest, Nas, D.I.T.C., Gang Starr, Dr. Octagon, Edo G...
Je vous ai vu en live récemment, et j'ai remarqué que tu as tendance à pas mal surjouer le mec bourré, il y a un peu de nonchalance dans ton attitude également qui pourrait en rebuter certain. C'est totalement naturel ? Ou c'est une attitude qui fait partie du show car les paroles exigent cette attitude, comme du théâtre ?
Je ne joue pas le mec bourré, non. Tout est et reste très conscient et précis. On se donne la peine. C'est du naturel, comme tu dis. Ça sort comme ça. Les paroles peuvent vraiment exiger ça. Très bien observé. Dès que le concert est terminé, cet état se termine aussi.
35 minutes pour un album, finalement ce n'est pas énorme. Pourquoi n'avez vous pas proposé plus de 7 titres ?
C'est la qualité qui compte pas la quantité ! Sur un vinyle 33 tours, tu mets pas plus que 35 minutes sinon tu perds en qualité de son. On aurait pu mettre 12 titres de 3 minutes mais on en a mis 7 de 5 minutes.
Est-ce qu'il y a des faces B de Catching bad temper qui ne sont pas encore sorties ? Ou que vous jouez en live ?
Oui, il y a des titres qu'on a enregistrés mais pas sortis sur l'album. Deux titres viennent de sortir il y a un mois. "Kiss them goodnight" et "A boy called Monkey". Ce sont deux titres qu'on aime beaucoup et qu'on joue live depuis le début de la tournée. Il y a encore d'autres.
Vous êtes amateurs de reprises de chansons avec Puts Marie ?
Bien sur. Par exemple sur le dernier album Masoch I-II on a enregistré le titre de Sun Ra, "Tell her to come on home". Il y a plus que dix ans sur l'album Le drame du pastis il y avait plusieurs reprises qu'on aimait bien faire.
La scène musicale suisse est énorme et de qualité, dans tous les styles, est-ce qu'il y a un ou des groupes avec lesquels vous vous suivez depuis le début ? Des groupes amis avec qui vous partagez la scène encore par moments ?
Il y a clairement une scène de plusieurs groupes et musiciens Biennois dont on fait partie. Plusieurs nous ont encouragés et accompagnés depuis le début. On a joué pas mal de fois avec les Peter Kernel on apprécie leur travail.
Max, tu connais bien l'Amérique du Nord, c'est pour quand la tournée là-bas ?
Crois-moi, j'ai trop envie de te répondre mais je ne le sais pas malheureusement. Après il y aussi d'autres pays, plus proches, où on aimerait bien aller jouer. En Europe. L'ambiance change d'un pays à l'autre. Pas besoin d'aller si loin. Va à l'est, va au sud. Ce sont des mondes différents qui changent beaucoup. Particulièrement quand tu y fais du live.
Pour terminer, l'avenir de Puts Marie, c'est concerts, repos ou compositions ?
On veut continuer de créer. À fond. On en a beaucoup envie. On est curieux de voir où ça va nous amener et surtout ce que ça va donner. Personne ne sait jamais comment ça va sonner. Rien n'est jamais prévu à l'avance. On essaye de se surprendre nous même et on y arrive.
Merci à Vincent de Yotanka Records.
Photo : © D.R.
Publié dans le Mag #38