Quel plaisir de retrouver Prohom en chansons mais aussi autour de questions car on le sait très "bon client" en interview, tant il ne cherche pas à se cacher ou à simplement paraître, le bonhomme est. Et donc on l'a mis au pied du mur face à des choix impossibles...
Confinement créateur ou confinement destructeur ?
Confinement prise de conscience : "tiens en fait ce truc ne change rien à ma vie, en fait je n'ai aucune vie sociale au-delà de mes rencontres de boulot". Qui dit prise de conscience dit création, donc on va dire : confinement salvateur et carrément créateur.
Guitare ou machines ?
Les machines toujours. Et vu que j'ai récemment laissé un bout d'annulaire gauche dans une tondeuse à gazon, j'ai comme l'impression que pour les accords majeurs à la guitare il va y avoir un petit souci. Au-delà de ça, j'avoue toujours majoritairement composer aux machines, et parfois sur des accords grattés à la guitare. Comme j'ai bossé avec plein de groupes new wave récemment, cela m'a inspiré et j'ai ressorti une basse pour composer quelques titres old school new wave. Comme je joue toute ma basse au médiator sur la corde de Mi, je n'ai besoin que d'un doigt, on est raccord avec mon actualité tondeuse !
Humour ou mélancolie ?
Je tâche de court-circuiter ma mélancolie latente avec mon humour. Je vis avec l'une et cultive l'autre pour ne pas sombrer.
Composer ou produire ?
Ah... les deux aussi ! C'est indissociable pour moi. Si j'aime composer c'est aussi parce que je vais produire derrière. Mélanger les sons et les harmonies est mon kif absolu. Je crois bien que quand j'ai commencé la musique, c'était pour devenir producteur. J'adore exploiter mes idées ou les idées des autres pour en faire quelque chose.
Ecrire pour soi ou écrire pour d'autres ?
J'écris pour moi majoritairement, mais c'est aussi parce qu'on me demande rarement d'écrire pour les autres. J'adore écrire, que ce soit pour moi ou pour les autres, donc je suis ouvert à tout. Je note que pour écrire pour les autres, j'ai besoin de parler, d'échanger, de sentir un peu la personne et ce qu'elle veut exprimer au fond. Sans cela je me sens un peu à vide.
La fille du train de Tate Taylor ou La fille du train de Paula Hawkins ?
Ni l'une ni l'autre, je ne veux plus jamais entendre parler de la fille du train, j'ai été traumatisé par un cyber harcèlement lié à la chanson et à la série de photos qui a suivi. J'ai mis 2 ans à m'en remettre, je vais laisser la fille du train à Tate et Paula.
Loïs ou Mélodie ?
Oh la la ... les deux. Mélodie pour sa générosité, son humanité et sa voix divine. Loïs parce que j'ai la sensation d'avoir enfin trouvé le partenaire studio de mes rêves. Je n'en parle pas trop parce que je n'ai pas envie qu'il bosse trop et qu'il ne soit plus dispo pour moi. C'est un magicien du son, et un artiste extrêmement talentueux, que trop peu de monde connaît. J'adore ces deux personnes.
Mélodies ou beats ?
Je commence souvent par les beats. Je voulais être batteur au départ. Je commence souvent mes sessions de travail par un clic, un tempo, j'aime sentir quel est le tempo idéal du jour pour moi. Voir si ça résonne avec ce que je suis au moment où je m'y mets. Ou alors je commence par des boucles rythmiques, je les écoute les unes après les autres, et j'attends que l'une d'elle fasse écho à mon état du moment. Puis viens l'harmonie. Alors parfois c'est l'inverse bien entendu. Mais majoritairement je commence par le rythme.
Clip video ou lyric video ?
Je crois que je préfère le clip. J'ai récemment mélangé les deux sur 2 productions. Il n'empêche que je note que quand je vois des lyrics vidéo, le texte me touche de manière plus évidente, je note que je comprends le texte différemment, plus précisément, comme si cela touchait deux zones différentes de mon cerveau. Même si ce n'est pas forcément pertinent artistiquement, au niveau de la compréhension du propos, je trouve qu'il se passe quelque chose.
Contre-jour ou contre-plongée ?
J'ai commencé la photo argentique il y a un peu plus d'un an. Je dirais "contre-jour" car "contre-plongée" me fait penser au cinéma, domaine que je ne maîtrise absolument pas, bien que je puisse indiquer ce que j'ai envie de voir ou pas à un réalisateur. Et puis "contre-jour" me fait penser à ces journées que je passe enfermé chez moi devant mon ordinateur, quand les oiseaux chantent et que le soleil brille dehors. Il y a un petit goût de "contre nature", que l'on retrouve aussi dans les sessions de travail nocturnes.
"Brille pour toi" ou "Un monde pour soi" ?
Ce sera "Et". je les adore tous les deux, ils défendent des choses si différentes. Ils sont le témoignage de mon évolution personnelle. "Un monde pour soi" : Mr Ouin ouin se plaint parce qu'il s'est fait larguer, que le monde va mal et que les autres ils sont méchants. "Brille pour toi" : Mr Prohom a enfin réalisé qu'on était toujours absolument responsable de la merde dans laquelle on est, et que pour changer le monde il faut se changer soi, ou le regard que l'on porte sur lui. C'est bien, avec mes chansons, je peux constater aussi bien les progrès accomplis, que ma désespérante propension à reproduire des schémas auto destructeurs. On est bien.
Spotify ou Deezer ?
Vu les rétributions dont ils nous gratifient, je m'en cogne absolument.
Facebook ou Instagram ?
Tik Tok ?
Roulé au fromage ou bugnes ?
Vous êtes quand même hyper bien renseignés ! J'ai effectivement une petite passion pour le roulé au fromage. Ça vient de mon enfance, j'avais une maman qui détestait faire à manger et fuyait les légumes. J'ai été élevé au poulet purée et au roulé au fromage.
No future ou l'espoir fait vivre ?
Bon. On va pas se mentir hein, c'est no future, on le sait. On va se le prendre le monde dans la gueule, à force de lui cracher dessus. Mais j'ai grand espoir en l'espèce humaine et en son évolution. Par contre je vois ça sur le très long terme, quelques milliers d'années. Quand on voit l'humanité aujourd'hui, on voit bien que nous sommes l'espèce vivante la moins évoluée du monde vivant. Nous sommes des sauvages ignorants, méprisants, profondément égoïstes et extrêmement limités. On mérite de s'en prendre plein la gueule, c'est indéniable. Mais personnellement et face à ce constat, je reste convaincu que l'être humain saura tirer des leçons magnifiques du chaos qu'il nous assure. Un jour nous saurons exploiter plus de 10% de nos capacités cérébrales, j'en suis certain. Mais ce n'est pas l'heure, aujourd'hui c'est l'heure de l'être humain qui vote Macron, qui voile les femmes, qui détruit ce qu'il ne connaît pas, qui préfère vivre vacciné dans la peur plutôt que libre dans l'acceptation de la mort, qui se bat pour un pot de Nutella, ou qui influence le monde avec des tutos ongles et maquillage, pendant que d'autres crèvent de faim ou se prennent des bombes sur la gueule. Bref, l'espoir fait vivre oui, mais chaque chose en son temps.
Merci Philippe, merci Julien (MathPromo).
Photo : Anne Rivière.