L'histoire de Primus est étroitement liée à celle de son frontman et co-fondateur, Leslie Edward Claypool. Ce bassiste hors-pair né en 1963 près de San Francisco est élevé au son des Beatles dans une famille modeste recomposée après le divorce de ses parents. Alors adolescent, un ami proche lui fait découvrir la basse et lui inculque les bases du slap, technique utilisée notamment par Stanley Clarke et Larry Graham, deux musiciens qui accompagneront l'éducation musicale de Les. En 1981, il fait la connaissance de Kirk Hammett, futur guitariste de Metallica, à la De Anza High School. Ce dernier lui ouvre les portes du rock avec le légendaire Jimi Hendrix. 1982 sera l'année de la formation de ses premiers groupes : Blind Illusion (métal progressif) avec le guitariste Mark Biedermann puis le Tommy Crank Band. Alors qu'il travaille en tant que charpentier, son jeu de basse commence au fil des années à prendre forme avec la découverte du blues, du R&B, du funk, du disco, du jazz, du métal et du rock-prog à travers les différents musiciens qu'il fréquente. En 1986, à la mort de Cliff Burton, son ami Kirk Hammett lui propose d'auditionner pour prendre la place de bassiste de Metallica. James Hetfield, impressionné par son niveau, lui refuse le poste prétextant qu'il est tout simplement "trop bon" pour jouer avec eux. Les Claypool comprend assez vite qu'il doit monter son propre groupe pour arriver à ses fins et fonde Primate en compagnie de son ami guitariste Todd Huth et divers batteurs dont Jay Lane. En 1989, après 3 ans de succès local, ses deux copains le quitte pour diverses raisons et sont remplacés par le guitariste Larry LaLonde, membre de Possessed et de Blind Illusion (où officie toujours Les) et le batteur de Major Lingo, Tim Alexander. La formation change de nom et devient Primus.
Nous sommes donc en 1989, le trio ne perd pas de temps puisqu'il livre d'entrée un album enregistré live au Berkeley Square intitulé Suck on this, financé par le père de Les et signé sur le label Prawn song fondé par le bassiste. Le talent et l'expérience des musiciens étant déjà prouvés sur la côte Ouest, le groupe ne peine donc pas à se lancer. Preuve en est son style singulier à base de lignes de basse slapée et funky à souhait, de phrasés de guitares rock complètement psychédéliques, d'ambiances rythmées aussi étranges qu'efficaces et de chants sortis de nulle part. En 1990, Frizzle fry marque les grands débuts studio de Primus sur Caroline Records et la confiance du groupe pour le sculpteur Lance Montoya qui illustrera, par ses différents travaux, les pochettes des albums du groupe jusqu'à Animals should not try to act like people. Les années 90 sont synonymes de succès pour Claypool et sa bande, et ce en crescendo, à commencer par la signature chez Interscope Records pour la sortie du deuxième album Sailing the seas of cheese comprenant le tube "Tommy the cat" avec Tom Waits en featuring. Cette décennie où tournaient en boucle les tubes rock sur MTV fut une chance incroyable pour Primus dans son développement à l'international. La prise de risque pour les industriels de la musique était alors réelle car le style était assez hors du commun et inclassable. Le groupe est amené à jouer avec les plus grands (U2, Rush, Public Enemy) et sort en 1992 Miscellaneous debris, un EP de reprises de chansons de diverses formations dont les excellents XTC et les mythiques Pink Floyd. En 1993 arrive Pork soda dans les bacs, album dévoilant la face sombre du groupe qui atteint la 7ème place au Billboard. La même année, Primus est en tête d'affiche du festival Lollapalooza puis rejoint celle de Woodstock l'année suivante. Autre aspect de sa réussite, le soin apporté à tout ce qui touche à son univers visuel avec des clips souvent énigmatiques et humoristiques où les protagonistes sont souvent déguisés en personnages loufoques.
En 1994, la formation initiale constituée de Claypool, Huth et Lane sort un album intitulé Riddles are abound tonight sous le nom de Sausage, clin d'œil au titre de la démo qu'ils avaient enregistré ensemble juste avant de se quitter. L'année qui suit, Primus signe un quatrième opus, Tales from the punchbowl, dont fait partie "Wynona's big brown beaver", tube primé d'un Grammy Awards qui a fait la controverse par son double sens, le bassiste répétant à maintes reprises qu'il n'avait aucun rapport avec la pilosité pubienne de l'actrice Wynona Ryder. En 1996, Les Claypool sort son premier album en solo et le défend sur scène avec, entre autres, le polyvalent batteur Brian Mantia (Praxis, Godflesh, Buckethead). C'est d'ailleurs ce dernier qui prend la place de Tim Alexander au sein de Primus la même année pour cause de divergences musicales et qui avait également refusé de remplacer Jay Lane en 1989 à cause d'un pied blessé. A la même époque, le trio compose le titre du générique d'une série animée devenue culte : South Park. En 1997, la sortie du Brown album divise les fans de la première heure avec pour sujet de discorde la production et les compositions plus linéaires. C'est le début d'une nouvelle ère, le néo-métal est à son apogée et le groupe perd peu à peu de crédit, en témoigne les mauvaises ventes d'Antipop en 1999, sixième album crédité d'une ribambelle d'invités de luxe : James Hetfield de Metallica, Jim Martin de Faith No More, Tom Morello de Rage Against The Machine, Fred Durst de Limp Bizkit et Tom Waits. Malgré un EP de reprises de bonne facture un an auparavant (Rhinoplasty), Primus annonce son hiatus après la tournée d'Antipop en 2001. Claypool confirme à la presse son ras le bol et la stagnation de Primus à cette époque.
Pendant deux ans, le bassiste ne chôme pas et va former Oysterhead en compagnie de Trey Anastasio de Phish et Steward Copeland de The Police et continue sur la lancée de ses projets solos. A la fin 2003, le bassiste reprend du service avec Tim Alexander et Larry LaLonde pour enregistrer avec Primus un EP de titres inédits accompagné d'un DVD compilant tous leurs clips intitulé Animal should not try to act like people. Entre tournées et projets solos durant 6 ans, Les Claypool annonce le grand retour du groupe en 2010 avec Jay Lane à la batterie, parti à l'époque de Primate, soit 22 ans d'absence ! Une tournée plus tard et Primus revient sur le devant de la scène avec un nouvel album, Green naugahyde, sorti en septembre 2011.
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Liens pour Primus
- primusville.com: Site officiel (310 hits)
Primus discographie sélective
lp :
Green naugahyde
...
bestof :
They can't all be zingers : the best of primus
...
dvd :
Blame it on the fish
...
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Biographie > Op Primus Prime
Primus / Chronique LP > Green naugahyde
Bon voilà, Green naugahyde, c'est d'abord l'histoire d'une chronique qui a failli (qui aurait du même...) ne jamais voir le jour. La faute à l'incompétence d'un chargé de promo missionné par le distributeur français du label Prawn song pour assurer le relai auprès des médias. Le délire habituel : on envoie une requête auprès du label (qui est intéressé) qui transmet au distributeur (qui est intéressé) qui transmet au chargé de promo (qui ne répond pas). Un mois passe (on s'agace) puis un second (on s'agace encore plus), une relance plus tard et rebelote avec un mail un brin ironique envoyé par votre serviteur (qui n'a pas que ça à foutre non plus) auprès du distributeur (toujours intéressé) qui décide de prendre les choses en main et d'envoyer un CD par lui-même. 2 jours plus tard, le CD arrive, encore 3 jours plus tard, le CD est écouté, encore 10 jours plus tard, le CD est chroniqué. Voilà, tout ceci aurait donc pris largement moins de temps et occasionné bien moins d'agacement si seulement, il n'y avait pas eu de chargé de promo paumé au bon milieu d'une équation qui semble le dépasser.
Bon sinon, Green naugahyde, c'est également et surtout l'histoire d'un album qui marque le "retour" aux affaires d'un groupe quelques douze années après son dernier "long-play" en date (Antipop) et qui n'a donc rien produit depuis une bonne décennie à l'exception d'un EP Animals should not try to act like people paru en 2003. Les retrouvailles sont d'autant plus excitantes que l'on aborde ce nouvel opus avec un regard "neuf" sur l'œuvre d'un Primus qui reste assurément l'une des entités majeures des trois dernières décennies (en réalité 27 ans). Mettre de côté ce qu'a pu produire Les Claypool et sa bande est donc préférable, même si les comparaisons les plus hasardeuses ne manqueront pas. Normal. Toujours est-il qu'ici, le casting réuni autour de maître Claypool a plutôt de la gueule puisque si Tim "Herb" Alexander n'est plus de la partie, le génial bassiste/vocaliste est ici entouré par des membres de longue date de la tribu Primus : Larry LaLonde et Jay Lane. Et le résultat est au rendez-vous puisqu'après une intro on ne peut plus minimaliste ("Prelude to a crowl"), le trio met en branle le grand barnum funky avec un "Hennepin crawler" au feeling imparable et aux lignes instrumentales échevelées en même temps que Les Claypool fait ses "pattoneries" vocales, lui qui ne partage du reste pas que son jeu d'inflexion vocales avec Mike Patton mais également son goût prononcé pour la multiplication de side-projects (Frog Brigade, Oysterhead, Colonel Claypool's Bucket of Bernie Brains, Sausage, etc...). Un premier titre complètement décomplexé et déjà, la Primus-touch fait des ravages. Normal.
Les morceaux défilent et le groupe transforme son Green naugahyde en véritable "freak-show" sur lequel les titres virevoltent, passant de la fantaisie brillamment funky ("Tragedy's a' comin'") de très haute volée à la bizarrerie grand-guignolesque aux atmosphères troubles ("Last salmon man", "Eternal consumption engine"). Primus n'a plus rien à prouver depuis bien longtemps et son seul retour suffit à combler toute une communauté d'adeptes. Mais en grand gourou d'une certaine idée de la musique, Claypool fait bien mieux que se contenter de cachetonner et le fait d'autant plus que cet album sort par l'intermédiaire de sa propre structure et non une major. Même si tous les titres ne sont pas aussi aboutis (un "Eyes of the squirrel" en demi-teinte), d'autres sortent complètement de la norme à l'image du délirant "Jilly's on smack", petite merveille d'expérimentations barrées parsemées de fulgurances funky ou "Lee Van Cleef", hommage respectueux au monstre sacré du cinéma et notamment figure tutélaire du culte qui entoure le western-spaghetti cher à Sergio Leone. Mais point de référence évidente à un Ennio Morricone passé à la moulinette funk/rock/métallique ici, on penserait en fait plutôt à du Mr Bungle en un peu moins outrancier et borderline quand la suite, avec "Moron TV", repart sur les ressorts les plus électrisants d'un rock organique et exigeant, mais jamais verbeux ni inutilement égocentrique. Passant d'une ambiance à une autre, tout en restant fidèle à une ligne de conduite funambule, le trio se laisse aller à ses penchants les plus "sombres" avec l'énigmatique mais fascinant "Green ranger" avant de poser deux belles mines heavy funky sur l'addictif "HOINFODAMAN" puis un "Extinction burst" à la fois complexe et brutalement volubile. La dernière piste de l'album est une formalité qui tient en une petite minute ("Salmon men") et conclue avec classe un album de funk rock mutant et expérimental (mais pas que) littéralement ébouriffant. La grande classe.