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Interview : Pili Coït, Interview d'amour partout (mars 2022)

Pili Coït / Chronique LP > Love everywhere

Pili Coit - Love everywhere Love everywhere est très certainement l'album sorti en 2021 qui m'a le plus séduit. Le duo lyonnais Pili Coït composé, on le rappelle, de la chanteuse et percussionniste (pour l'occasion) Jessica Martin Maresco (ICSIS, Le Grand Sbam, Saddam Webcam et récemment Ez3kiel) et de son acolyte Guilhem Meier (batteur de PoiL, PinioL, Ukandanz, LFant) à la guitare et au chant, poursuit son aventure grâce à un deuxième album aussi aventureux que jouissif. Cette formation a la particularité de voir les deux prendre le contrôle d'instruments qui ne sont pas forcément ceux qu'ils utilisent habituellement. Le danger, les deux connaissent bien cela : il suffit d'écouter leurs discographies (dont certains groupes complètement barrés qu'ils partagent en commun comme ICSIS ou Le Grand Sbam), pour s'en rendre compte, et le moins qu'on puisse dire est que Pili Coït n'échappe pas à la règle.

Faire de la musique en duo demande une extrême vigilance, surtout lorsqu'elle est exigeante. Jessica doit gérer de son côté le chant et un ensemble de percussions (tom basse, bidon, synthé-drum, de pédales d'effets, et tambourin), tandis que Guilhem doit arriver à synchroniser son chant avec ses parties de guitares. Sauf qu'ils ne font pas du folk ! Il est même compliqué de qualifier le genre de ce projet, son style étant un mélange subtil de rock, de lo-fi, de chorale, de pop, de trip-hop/électro et de grunge. Mais c'est surtout beaucoup de mélodies et de riffs enchevêtrées dans un marécage de rythmes disparates et de vocalises polyphoniques. En somme, Pili Coït est un véritable travail d'équipe.

L'inaugurale et déraisonnable "Rain napalm" le démontre bien, cette chanson comporte tous les aspects susmentionnés. A contrario, "Conveyor belt" est semblable à un petit chérubin. Angélique, ses airs électro-mélancoliques ne sont pas loin du Radiohead de la période Kid A, pour notre plus grand plaisir. "Make my papillae blusing" est plutôt dans la lignée de Pink noise, leur premier disque sorti en 2017, et surement la plus accessible pour le commun des mortels. "Disowner" est, quant à elle, la plus profonde. Dans une lenteur morne mais berçante, le dialogue des voix est de toute beauté. "I can't scream" est sensiblement du même acabit, mais la psychose paraît plus présente. La folie à souligner dans ce disque est sans conteste "Taïro no tomo momoriga", un titre en langue japonaise que j'imagine difficile à jouer et qui durant presque 6 minutes montre à quel point l'écriture des structures et les arrangements des voix sont juste spectaculaires. Il s'agit de l'un de mes titres préférés de ce Love everywhere, si bien qu'"Endless make love everywhere" paraît honteusement anodin à côté, et pourtant ce morceau est entrainant et tout bonnement génial. Comme cet album que je vous recommande de découvrir très rapidement.

Publié dans le Mag #50

Pili Coït / Chronique LP > Pink noise

Pili Coit - Pink Noise On le sait, on n'est pas avare de compliments envers le collectif et label lyonnais Dur et Doux (PoiL, Ni, Chromb!, PinioL, ICSIS, Saint Sadrill, Ukandanz). Une entité qui bichonne ses artistes et musiciens et qui fait le choix répété de lancer des groupes avec des membres de formations déjà présentes dans son équipe. L'un des cas les plus récents est PinioL avec la réunion complète des gars de Ni et PoiL. Pili Coït, puisque c'est le sujet ici, regroupe un duo composé de Guilhem Meier, le batteur de PoiL et Ukandanz notamment, et la musicienne multitasks Jessica Martin Maresco, aperçue dans des formations aussi diverses que Meï Teï Shô, ICSIS (groupe dans lequel se trouve aussi Guilhem), Saddam Webcam ou Mercurial. Cette dernière est équipée d'un tom basse, d'un bidon, d'un synthé-drum et de sa voix profonde, intense et frémissante, quant à Guilhem, il se charge, non pas des percussions (son domaine de prédilection) mais d'une guitare et apporte également sa contribution par un chant se mutant par moments en talk-over en langue anglaise.

Ces deux-là ont sorti Pink noise, un premier album passionnant à écouter, sans véritable barrière, qui montre l'étendue du talent de ce duo pour nous confiner dans un univers sonore imprimé de sentiment de vacillation constant. Ni vraiment pop, encore moins expérimental, ce fantasme musical tortueux peut autant mettre mal à l'aise qu'il enivre. L'intimité et la complicité de ce couple ressortent énormément dans cet album très personnel. L'enchevêtrement et l'harmonie des voix en sont le meilleur exemple, même si instrumentalement cela est un peu moins perceptible, comme si les voix avaient été davantage travaillées que l'instrumentation. Et pourtant, de très bons titres sont issus de ce Pink noise, à commencer par l'excellent titre éponyme mais également l'explosif "I can scream" ou le turbulent "Bumble bee" et ses techniques de percussions soignées. En résumé, les Pili Coït se fichent un peu des conventions, prennent un peu de leurs backgrounds respectifs pour balancer un univers peu familier à tendance lo-fi dont le patronyme n'a rien à voir avec une partie de jambe en l'air (notez que le duo est en couple dans la vie extra-musicale). En fait, il s'agirait tout simplement de la prononciation avec l'accent alsacien de "Billy goat", leur première composition. Ça ne m'étonne pas d'eux !

Publié dans le Mag #34