Pili Coït est un duo qui ne s'accommode pas des formats établis. Leur deuxième album Love everywhere est un puits sans fond de créativité, à tel point qu'il est difficile de cibler le genre dans lequel ils évoluent. Pop ? Folk ? Electro ? Rock ? Un peu tout ça à la fois, et même plus encore ! En couple à la ville, Jessica et Guilhem ont gentiment accepté de nous parler de leur nouveau bébé musical.
Bonjour Pili Coït, votre deuxième album Love everywhere est sorti en novembre dernier. J'imagine qu'il fait aussi partie des albums qui ont été retardés par le Covid ?
Jessica : Salut, oui et en même temps, il en a profité puisque c'est en confinement que nous avons commencé à travailler dessus...
Le premier album était né d'un crowdfunding. De quoi est né Love everywhere ?
Jessica : Ce nouvel album est né de l'envie d'en remettre une couche. Guilhem est le compositeur du groupe. C'est une machine d'invention, un génie de la compo, il ne s'arrête jamais.
Êtes-vous parti sur des idées bien précises en tête avant de composer ce disque ?
Guilhem : Oui, j'ai une nouvelle guitare à 12 cordes, ce qui donne beaucoup d'idées. C'est principalement une évolution sonore, où le monde acoustique vient se mêler à l'électrique. Ça nous inspire un champ émotionnel plus vaste.
Pourquoi ce titre Love everywhere ? À quoi fait-il référence ? Une ironie ? Quelque chose de plus personnel ?
Guilhem : C'est tiré de la chanson "Endless make love everywhere", qui parle de l'interaction entre les êtres, les objets, où tout se mélange, rien n'est complètement distinct, et toutes nos cellules se frottent les unes aux autres en permanence et partout. On peut appeler ça de l'amour, car de cette interaction naissent les choses. Reste à leur donner une intention bonne ou mauvaise.
Il paraît que vous l'avez enregistré dans un château ? Ça devait être assez spécial comme atmosphère ? Vous pouvez nous en dire plus sur cet enregistrement ?
Jessica : Le studios de l'Hacienda se trouvent au rez-de-chaussée d'un petit château. S'y côtoient deux ambiances : celle du studio, avec Steph l'ingé son qui fait partie clairement de notre monde, et celle du château, avec sa châtelaine qui est un personnage haut en couleur et le balai des vacanciers qui dorment au gîte du château, une clientèle plutôt bourgeoise. Nous y étions en famille au moment de l'enregistrement, avec les enfants et leur mamie ce qui conférait une dimension singulière supplémentaire. C'était dense, improbable et loufoque parfois, mais la rencontre avec Stéphane a été précieuse, puisque Guilhem y est retourné avec PoiL, et que j'y retourne moi même en juin pour enregistrer du Schoenberg.
Je trouve ce nouveau disque plus direct et concis que Pink noise. C'est surement dû à sa durée. Y a-t-il une raison qui explique que votre deuxième disque comporte beaucoup moins de titres que le premier?
Jessica : Oui, c'est une volonté de mettre en valeur les morceaux. Pink noise est notre premier album, on avait envie de dire beaucoup de choses, et on s'est rendu compte que ça pouvait être indigeste pour des estomacs sensibles. Et on a envie que tous nos morceaux soient goûtés et savourés !
Est-ce que "I can't scream" a un lien quelconque avec le "I can scream" de Pink noise ?
Jessica : "I can't scream" est effectivement une relecture douce car c'est exactement la même mélodie du titre nerveux "I can scream", à la manière de "Morning bell" de Radiohead qui apparaît dans Kid A et transformé dans Amnesiac. Chaque morceau peut être une mine d'inspiration, on pourrait faire plein d'album avec un seul titre relu différemment.
Justement, "Conveyor belt" me rappelle beaucoup les travaux de Radiohead époque Kid A, j'imagine que vous êtes fans de cet album qui a place un peu particulière dans la discographie des anglais ?
Guilhem : Effectivement ! Pili Coït est le groupe où on laisse fleurir notre naturel et instinctif son anglo-saxon.
Vous évoluez déjà les deux dans ICSIS et le Grand Sbam, peut-on dire que cela facilite grandement votre cohésion dans Pili Coït ?
Jessica : C'est plutôt l'inverse. Notre cohésion dans la vie nous emmène à travailler ensemble. Nous avons beaucoup de désirs et d'attentes artistiques en commun. Comme nous nous admirons mutuellement, dès qu'une envie émerge, nous nous en parlons toujours très vite et nous nous y projetons ensemble. C'est une déformation du couple.
La particularité de Pili Coït, c'est que vous deux ne jouez pas de vos instruments de prédilection, excepté le chant peut-être, au moins pour Jessica. Est-ce que l'approche d'écriture change beaucoup par rapport à vos autres formations ?
Jessica : Guilhem, étant surtout batteur, a un jeu de guitare très personnel et une approche harmonique qui lui est propre. Il ne joue pas selon les codes habituels des guitaristes. Cela teinte énormément son jeu et son écriture et c'est ce qui rend le son et l'identité du groupe si particuliers. Je suppose que c'est pareil pour moi. N'étant pas batteuse, j'ai développé une technique de jeu bien à moi qui rend impossible toute comparaison stylistique avec un jeu de batteur classique !
Parlons de la pochette du disque, changement de tonalité graphique puisqu'il s'agit cette fois d'une photo assez drôle qui l'illustre, cette mise en scène était-elle préméditée ?
Jessica : Non. C'est une photo personnelle que nous avons pris en vacances. Une photo de rando. Je suis asthmatique ce qui rend les randos très laborieuses. En arrivant tout en haut de cette montagne, fourbue, le cardio à son niveau max et la peau brûlante, j'ai eu envie de m'aérer le haut du corps en poussant un cri lyrique, un peu comme dans le refrain de "Taïra no to momoriga". L'immensité du décor, la hauteur, l'acoustique que confère ces grandes vallées entourées de montagnes : quoi de plus inspirant ? Guilhem a immortalisé ce moment de grâce. L'enfant consternée à mes côtés n'est autre que notre fille.
Peut-on imaginer un jour Pili Coït accueillir de nouveaux membres ?
Jessica : Un nouveau projet est justement en maturation. On projette un nouvel opus avec 5 musiciens en plus ainsi qu'un instrument très particulier, avec une thématique très forte et très ancienne... mais on n'en dit pas plus pour le moment !
Quelles sont les prochaines échéances de Pili Coït ? Avez-vous prévu de refaire des dates prochainement ?
Jessica : Oui, nous avons une semaine de tournée en mai qui s'articule autour du 25 à Besançon à l'Antonnoir (en co-plateau avec Ni !) et le 27 à la Péniche de Châlon (avec Odessey & Oracle) et le 28 à la Petite Maison Rouge de Felletin, un lieu associatif. Nous repartons jouer autour de Tours et Angers la semaine du 13 juin, et terminerons la saison en beauté avec le Barge Rock Tour, une tournée en péniche de 15 jours sur les eaux du canal du centre entre Digoin et Châlon sur Saône à la mi-Juillet !
Merci à Clément et Judith de Dur et Doux
Photos : Judith Saurel