Papier Tigre - Recreation Troisième album pour les Nantais de Papier Tigre. Et le moins que l'on puisse dire c'est que la formule fonctionne à plein sur ce Recreation, chantre d'une mécanique math, power pop à l'énergie créatrice. On les avait quittés avec "l'infant" noisy The beginning and end of now qui révélait la puissance d'un trio technique, on retrouve ici une œuvre aiguisée, fruit d'une production plus propre et d'un travail mélodique mis en avant.

On attaque par le single "Home Truth", puissant, qui, parfois impatient, semble brûler un peu les étapes, pressé d'en découdre d'une certaine manière. Si le pont laisse présager une ouverture vers un temps, un rythme plus aérien, bien rapidement la ferveur du trio reprend le dessus. "This and that and more of this and that" se construit autour d'un riff semblable à une ritournelle écourtée, empêchée. On retient l'énergie d'un morceau aux couleurs presque exotiques par endroits, en tous cas résolument optimistes. "Demands" et dans une moindre mesure "Parent neighbours" empruntent ces mêmes sentiers, tout juste défrichés, avec finesse.

"The later reply" s'ouvre sur une embardée sourde, très Battles. Proche dans sa construction des productions de 31 Knots, le morceau se compose de trois chapitres bien distincts, comme de longues tirades sous forme d'extasiants. La guitare en son clair laisse échapper des trilles salvatrices. Et ce chant incantatoire : If I'm going somewhere would this be better ?!... qui s'achève dans un brasier sonore abrupte. Cette piste figure comme la forme aboutie de la brouillonne "I'm someone who dies".

Et on en vient au deux sommets de cet album : "Chimera" et "Afternoons".
La première laisse éclater le talent de composition de groupe, sans jamais toutefois abandonner la puissance qui en fait la marque de fabrique. Accords augmentés en son clair, croisés guitares-voix et un thème d'une précision éclatante, comme des notes suspendues, dont au hasard, quelque-unes auraient été passées sous silence. La seconde se dévoile dans une introduction parfaite. La deuxième guitare rentre, d'abord discrète, avant de sonner la charge. Le chant n'est pas forcé, coïncide avec des contre-chants inédits. Le refrain explose dans une saillie enragée très Deftones.

"Wandering cage" clôture l'album avec ses mimiques guitare-voix confondantes "get up and go... " dans une libre improvisation aux teintes finalement plutôt sombres, qui laisse penser à un Blues-calypso des temps modernes. Certainement un des meilleurs albums de 2012 en rock français, exigeant et devrait-on presque s'excuser "créatif", signé d'un groupe qui allie désormais parfaitement le style et la puissance.