La première fois que j'ai entendu parler de Opium du peuple ("sans le putain de L'" dixit Mika ex-guitariste du groupe) c'était lors d'un concert, quelques jours avant la fin du monde et le confinement avec Darcy au Rackam. Et je me souviens avoir dit à mon binôme, "si ce n'est pas bien on se casse". Et on est resté et on y revient tant il est impossible de cantonner ces troubadours à un simple groupe de reprises version punk-rock de chansons de variété française.
Malgré plus de 17 ans aux compteurs (bientôt la majorité et l'âge de raison ?) la vraie drogue qui endort le peuple c'est toujours la variété... ce qui ne les empêche pas de jouer à la fête de l'Humanité ou sur la Warzone du Hellfest. Alors qu'attendre de ce nouvel opus ? Ed que certains parmi les rédacteurs du W-Fenec adulent pour ses formations plus sérieuses (UMFM ou Not scientists) apporte un nouvel élan à la guitare (même si les chanteuses Opiumettes doivent lui mettre des roustes de temps à autres) et c'est presque un album de mash-up qui nous est proposé ici. Rencontre du 4ème type entre un Sabotage des Beasties Boys et un medley par les opiumettes de NTM par exemple.
Mais revenons au premier titre, "Santiano" qui commence par des bruits de mouettes et une section rythmique frénétique. Nous montons sur le pont du Black burne, nous sentons les embruns et nous voguons avec le septet sans savoir si nous ferons une transat ou du simple cabotage et sans savoir si ce sont réellement des embruns ou des chiures de mouettes qui nous fouettent le visage. Ce qui met tout le monde d'accord, ce sont les références prises qui en dessous des 4 grammes dans le sang feraient fuir la moitié de nos lecteurs. Ici NTM, Brassens, Cabrel, Piaf, Gainsbourg, Village People, Henri Salvador ou encore Jeanne Moreau se transforment en autant de raisons de headbanger et de pogoter gentiment avec son voisin ou comment une intro de Motorhead peut sublimer "La mauvaise réputation". Vous me direz où est le talent, ce ne sont que des reprises ? Le talent est dans l'interprétation. Reprendre du Françoise Hardy sur une mélodie de The Offspring c'est un peu osé mais tout ce qui est improbable paraît brillant avec Opium. Slobodan le fondateur du groupe n'y est pas étranger, son grain de voix chaud sait se faire salace quand il le faut pour aller chercher l'auditeur. Un vrai tour de force tant les originales ne s'y prêtent pas. Que dire également de ce "Tourbillon de la vie" en mode Toy Dolls ? Une belle trouvaille qui dépoussière le titre original. Il y a un gimmick une sorte de comique de répétition chez Opium du peuple qui est de reprendre le "Rock collection" de Voulzy mais en mode actuel et vraiment rock : ici Breeders, Pink ou encore Blondie pour le bonheur de tous. Opium du peuple nous rend addict. Leur écosystème c'est vraiment le live mais ils arrivent sur cet album à nous donner envie de l'écouter dans notre salon, notre voiture ou même de pourrir son ado avec ses copines qui reprennent à tue-tête un "Santiano" complètement dévoyé.
Il est difficile de ne pas aimer ce groupe qui marque ici la fin d'année 2023 avec un album très inspiré et on ne cherche finalement pas à savoir si c'étaient ou non des embruns...
Publié dans le Mag #58