Onsloow-LP2 Lille Venn est née en Norvège, a vécu à Singapour, déménagé en Australie et vers neuf ans, son frère lui offre des billets pour Avril Lavigne. Là, touchée par une révélation quasi divine, elle sait qu'elle veut devenir une pop star. Elle vivra ensuite à Londres et étudiera à New York. Ce sont ces nombreux déménagements aux quatre coins du monde qui vont la construire, elle et l'artiste qu'elle deviendra.

Revenue fraichement en Norvège, son pays natal, Lille Venn découvre toute une scène qui lui correspond par essence. La radio nationale NRKP3 la cite comme la nouvelle actrice de la scène emo norvégienne, mais loin de se contenter d'adopter le genre (emo), elle l'a assimilé, en a compris les subtilités, les excès, les préjugés et l'image parfois caricaturale qui lui colle à la peau depuis plus de deux décennies. Pourtant, si vous penchez une oreille sur les chansons de Lille Venn (nom de son projet solo), vous aurez plutôt affaire à une pop punk sucrée aux histoires adolescentes avec une bonne grosse dose de fun dans la lignée Blink-182.

Afin d'éviter toute assimilation erronée, j'ai re-visionné des vidéos d'Avril Lavigne à différentes périodes de sa carrière et je n'ai pas pu faire de rapprochement musical entre ces deux artistes, au cas où vous vouliez par paresse en faire le raccourci. Vous vous demandez sûrement pourquoi je vous fais la bio de Lille Venn alors que nous sommes là pour chroniquer l'album d'Onsloow ? Tout simplement parce que lorsque j'ai découvert que c'était elle qui officiait au chant de leur dernier album, ça a complètement changé mon angle d'écoute. Une fois encore, pour éviter toute assimilation et pour cette chronique, je n'utiliserais plus Lille Venn mais Helene.

Exit donc l'imagerie mini kilt, cheveux teints et l'ambiance copines sur un terrain de skate. On va plutôt agiter le drapeau à damiers pour parler de Full speed anywhere else, qui appuie plusieurs de ses titres en utilisant un jargon mécanique, à commencer par "Riding on the lies" qui démarre l'album. Le second titre, "Taxi", ne vous emmènera pas à toute allure comme dans le film de Luc Besson, mais vous baladera à vitesse moyenne. Vous aurez le temps de profiter du paysage en vous arrêtant sur le solo de guitare aussi beau qu'une station-service américaine des années 70. Sur "Brakes", le morceau prend un coup d'accélérateur à l'accent pop punk, ça freine sur la fin du morceau, non pas pour faire crisser les pneus, mais plutôt pour s'arrêter sur le constat d'une relation terminée "à deux pâtés de maison d'ici, il y a une ville dans la poussière, autrefois je t'y enlaçais, maintenant je ne vois plus où c'était". "Body parts", 3eme single tiré de l'album qui possède un refrain mémorisable instantanément, traite de la guérison après un accident de santé.

Après l'écoute des quatre premiers morceaux, vous aurez surement collectionné assez de points pour obtenir un cadeau. Pas d'illustré ni de queue de tigre en peluche ici, Onsloow vous offre "You from before" avec en featuring Truls Hegerro de Lukestar (étais-tu à leur concert du 21 novembre 2008 à la Flèche d'Or ?). Sa voix toujours aussi singulière oscille entre lumière mat et cristal, et une fois encore le songwriting de Mathias (guitare) fait mouche de sensibilité : "Efface tout, je te le dis en tant qu'ami, c'est le genre de film où tout le monde meurt à la fin". Même si la chanson "Nothing is like the nothing we share" aurait tendance à sonner comme une pop punk légère, elle traite d'une relation destructrice, où les excès d'alcool, de violence minent deux personnages au fort caractère : "Réinventer Axl Rose, tous les inconvénients sans les avantages, c'est une histoire sans fin". "Muscles memory" contient une belle envolée de décibels et Helene nous dévoile sa voix plus douce, on fondrait presque comme une tablette de chocolat oubliée sur une plage arrière en été. "Now I get it" clôture cet album tout en douceur, et quelques notes de guitare jouées en slide me font penser à de l'americana. Décidément, on est toujours dans l'univers de la route, la 66 peut être...

À la sortie du péage, on peut dire que Full speed anywhere else évoque un road trip dans une voiture à moteur thermique, où l'asphalte défile sous nos roues en ravivant des souvenirs enfouis à travers différentes périodes de nos vies. Des mélodies accrocheuses, riffs de guitares percutants, la voix chaude et aérienne d'Helene s'accorde parfaitement avec l'univers d'Onsloow, et c'est probablement ce qui fait la réussite de cet opus : ce pont entre la génération des musiciens d'Onsloow et celle représentée par Helene alias Lille Venn.