Nosfell : Kälin bla lemsnit dünfel labyanit Fin 2006, Nosfell continue de faire l'iconoclaste et de nous surprendre. Avec dans son balluchon, des sonorités toujours à la croisée du rock, de la chanson et du folk, Labyala et Pierre se permettent même, à l'occasion, d'entrouvrir les portes du free-jazz (la fin de "Majodilo tepü jaredü") ou de la pop la plus noble ("Path of green (memory of a crimson door under the waves)"). Car ne pouvant se contenter d'une simple redite de Pomaïe klokochazia balek, Nosfell a su agrémenter son univers de nouveaux éléments, quitte à en laisser d'autres de coté.
Au premier rang, les apparitions fugaces d'une batterie donnant un peu de tonus à quelques pistes et d'un piano apportant à "Oh ! it's been a long time, but we're glad you came" une trame délicieuse. En revanche, les borborygmes samplés de Labyala se font plus rare, ou sont moins mis en exergue et le groupe a moins souvent recours à des rythmiques chaloupées qui faisaient l'entrain de plusieurs morceaux du premier album. Ceci ayant sans doute pour but d'éviter tout systématisme. Il y a quand même "Your elegant hat", "I jaün bebdeï" et "Likade liditark" qui sont là pour me faire mentir ! Le premier pour son mordant qui ne demandait qu'à s'échapper et les deux autres, pour renouer avec quelques borborygmes bien sentis. Mais les variations du chant de Labyala allant de graves en aigues, contrastant ou non avec les cordes de Pierre sont toujours là. Tout comme cette volonté de créer une bulle reliant l'artiste à son public, incluant tout autant l'aspect musical que visuel. Et aussi ces textes en klokobetz, cet émerveillement permanent pour les ambiances éthérées ou encore cette folie créatrice d'un monde parallèle.
En seulement deux opus, c'est déjà devenu une habitude, mais rien n'est à éviter sur un album de Nosfell. Je ne vais pas décortiquer chaque titre mais indiquerai mes préférences pour le grandiose crossover "folk/country/bluesy" intitulé "Jalin madaz" et "The gorgeous hound" qui, à mon avis, lui sert d'intro (tout comme " BlØwtilan" à "Günel", d'ailleurs). Gros coup de chapeau aussi à "Majodilo tepü jaredü" audacieux comme pas deux, à "Hope ripped the night" beaucoup plus subtil mais d'une noirceur à peine dissimulée, à "Ta main, leurs dents" que l'on se surprendra à fredonner assez rapidement ou à "Le long sac de pierres" et ses choeurs réconfortants. Mais bien sûr, c'est "Your elegant hat" qui obtient le plus rapidement les suffrages du morceau incontournable et vous comprendrez pourquoi en l'écoutant !
Le son plus étoffé que son prédécesseur, l'ouverture sur de nouveaux horizons, la co-écriture de Pierre Le Bourgeois sur quelques titres, la participation de musiciens venus d'ailleurs (le saxophoniste Peter Corser sur deux titres et le multi instrumentiste Bertrand Belin, ici à la guitare, sur un autre) font de Kälin bla lemsnit dünfel labyanit un album abouti, sensuel, réussi (cela va sans dire) et toujours à mille lieues des immondices suggérés par le petit écran rentable et loin de toute vraie poésie.
Ultimes remarques, au sujet de l'emballage de l'objet. Comme vous l'aurez remarqué, c'est un titre marketté à mort (Kälin bla lemsnit dünfel labyanit) et un visuel spécialement étudié pour séduire les midinettes qui ont été choisi pour élargir la cible des télé-fans de Nosfell. Je plaisante, bien sûr ! Le travail visuel prend une place particulière chez Nosfell puisqu'on retrouve en plus du livret contenant les paroles en anglais, français et klokobetz (écrites grâce à l'alphabet klokobetz et ses caractères uniques !), un dépliant en 4 volets constitué d'une jolie illustration, prolongement féerique de la pochette.
Il ne reste plus qu'à croiser la route de Nosfell pour prendre toute la mesure de ce deuxième opus sur scène mais ceci ne sera pas un souci, vu le nombre de dates déjà annoncées...