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Ambitieux, hallucinant, incroyablement osé, les superlatifs ne manquent pas lorsque l'on évoque, ne serait-ce que sur le papier, le projet NASA (ou N.A.S.A). Et pour cause, entre 2003 et 2008, deux DJ's/producteur/remixeurs fous et compositeurs répondant aux pseudos de DJ Zegon et Squeak E.Clean mènent de A à Z un projet hip-hop/indie/rock/electro un peu fou réunissant une pléiade d'artistes (Tom Waits, David Byrne, Chuck D, John Frusciante, Kanye West, MIA ou George Clinton) sur un seul et même disque, baptisé à sa sortie par la presse spécialisé anglo-saxonne "Album of the Year". Un concept osé mais casse-gueule conçu et réalisé par un duo qui voit grand, très grand, tout en laissant parler une créativité sans limite. Dans le commerce, le disque s'intitule plus sobrement The Spirit of Apollo et voit le jour le 16 février 2009 via Epitaph.

NASA / Chronique LP > The spirit of Apollo

N.A.S.A - The Spirit of Apollo "The album of the year", comme l'a déjà clamé partout la presse anglo-saxonne ? Un Everest hip-hop indé aux textures électro et à l'esprit par instants presque rock ou la trop classique montagne qui aurait accouché d'une souris ? La métaphore est facile certes, mais les clichés ont la dent dure et les premières plages que nous soumettent les deux têtes pensantes de N.A.S.A ne sont pas vraiment là pour nous rassurer. Samples de musique brésilienne, omniprésence de David Byrne (Talking Heads), des recettes un peu paresseuses, quelques clichés musicaux éculés, l'ensemble se laisse écouter mais sans plus et The Spirit of Apollo ne décolle réellement qu'à partir de "Money", en grande partie grâce au flow salvateur de Chuck D (Public Enemy) et à l'héritage brésilien signé Seu Jorge. Hip-hop da fuckin' groovy, la participation de Method Man à "N.A.S.A music" veut enclencher la marche en avant et faire turbiner la planche à billets, le résultat ne donne tout au plus qu'un titre de hip-hop basique et pas foncièrement inspiré. Sympa mais pas vraiment transcendant donc.
Après quatre titres seulement, on se dit qu'il y a un problème de fond avec ce disque. On attendait un choc, une révélation, "the next big thing" et finalement on a droit à un disque de hip-hop indé avec une pléiade de guests de luxe comme seul véritable intérêt, les deux compositeurs ne s'étant apparemment pas trop trituré la soupière pour pondre des tubes dignes du casting de The Spirit of Apollo. Et là, c'est le clash, le "truc" qu'on n'attendait plus vraiment : NASA nous lâche un "Way down" atomique. Une nonchalance lascive, des arrangements qui font dans la subtilité, The RZA et John Frusciante (RHCP) discrètement indispensables : la classe en sommes. Désormais en orbite géosynchrone, le projet gagne en caractère et l'album semble se libérer du poids médiatique sans doute encombrant qui avait tendance à l'enserrer jusqu'à là. "Strange enough", "Spacious thoughts", le duo de DJ's/producteur/arrangeur enchaîne et ne fait pas les choses à moitié. Karen O (Yeah Yeah Yeahs) jouant les muses de luxe d'après un canevas signé par le trop tôt disparu Ol' Dirty Bastard (Wu-Tang Clan) sur le premier, quand N.A.S.A n'orchestre pas une rencontre quasi fantasmée sur le second. En l'occurence sa majesté Tom Waits vs monsieurr Kool Keith (a.k.a Dr.Octagon) pour une bombe à retardement qui fait imploser toute une galaxie à elle seule. Pouce levé.
Même si la collaboration avec Kanye West ("Gifted") est surtout là pour rameuter du monde autours de l'album (comme si ça ne suffisait pas encore), on ne peut pas reprocher au duo Squeak E.Clean/DJ Zegon de ne pas être des bêtes de marketing doublés de sérieux arrangeurs ("Samba soul"). Et si The Spirit of Apollo n'a pas grand chose de "l'album de l'année", il n'en reste pas moins un disque gorgés de hits en puissance ("Whachadoin' ?" avec M.I.A et Spank Rock), à peine éclipsés par quelques morceaux complètement quelconques ("O pato"). Quelques plages anecdotiques et une poignée de coups de maître, on avait beau s'attendre à quelque chose qui sortirait définitivement de la norme, on doit se contenter d'un disque qui n'est que "plutôt réussi". A trop susciter d'attente autours de sa personne, l'entité NASA a perdu la maîtrise de son ambition et s'est parfois brûler les ailes. Néanmoins, le résultat étant tout de même de bonne facture, la possibilité de ce voyage inter-stellaire mérite assurément que l'on se laisse tenter.