Quand mon rédac chef m'envoie un disque, il omet souvent d'y joindre la biographie du groupe. Du coup, je fais mes petites recherches tout en écoutant le disque en question. Mais il a toujours le chic pour me faire un résumé au préalable. Pour Naked Six (à ne pas confondre avec Nikki Six, le bassiste de Mötley Crüe), j'ai eu droit à : "Naked Six. Fils du chanteur de Saxon". Emballez, c'est pesé ! Je vais avoir droit à un disque de heavy metal et j'en suis ravi. Sauf qu'en fait non, Naked Six, c'est clairement pas du heavy. Loin de là ! Et j'en suis ravi aussi.
Il faut dire que Seb Byford, ayant baigné dans la NWOBHM, a eu envie de faire "son truc" à lui, avec les inspirations qui sont les siennes. Et le jeune homme est plus branché Nirvana et Arctic Monkeys que Judas Priest et Def Leppard, si tu vois ce que je veux dire. Avec son groupe, qu'il a formé avec deux amis d'enfance, il sort Lost art of conversation, premier album qui déboîte. Produit et mixé par Thomas Mitchener (Frank Carter & The Rattlesnakes, Gallows), Lost art of conversation rappelle au quadra que je suis la folie des années 90 dans laquelle j'ai grandi. Larsen, urgence, ambiance syncopée, voix saturées, guitares énergiques et planantes, le cocktail est explosif pour passer un bon moment. Car après le psychédélique et lancinant "21st century brawl" en guise d'apéro, les fauves sont lâchés ! Les bombes s'enchaînent sans discontinuer dans des registres pop, punk, indie que ne renieraient pas Supergrass, Blur ou même un Pearl Jam en furie. Et du coté des contemporains, les audaces sonores pourraient plaire à Queens Of The Stone Age. À la première écoute, Naked Six surprend par son coté bruitiste et sa rage sans limite emmagasinés dans des morceaux aux mélodies riches et frontales. Puis, au fil des écoutes, le groupe devient incontournable et il est difficile de faire ressortir un titre plus qu'un autre tant l'ensemble est de qualité. Si tu cherches du rock lisse et sans goût, je te conseille de passer ton chemin. Par contre, si tu es à la recherche d'un rock'n'roll abouti et audacieux, acidulé à souhait et sentant bon la fin du siècle passé, Naked Six ne pourrait que te ravir. Cerise sur le gâteau, ce "Outside looking in", tout en souplesse et en retenue dans un esprit très Floydien, démontre de fort belle manière la capacité de ce trio anglais à manier avec intelligence les mélodies et les ambiances, et surtout à composer des morceaux aboutis. Sacré disque !
Publié dans le Mag #43