Nada Surf Nada Surf Nada Surf est un peu ma madeleine de Proust. Le trio devenu avec le temps quatuor (Doug Gillard à la guitare puis Louie Lino au clavier) est un compagnon de vie depuis le raz-de-marée du tube "Popular" en 1996. Avec plus ou moins de regains d'intérêt pour tous les albums qui ont suivi The weight is a gift (sorti en 2005), il m'arrive encore régulièrement de réécouter de vieux classiques. C'est un peu comme certains fans de Metallica au final, on a toujours de la sympathie pour les artistes qu'on a admiré étant jeunes et on ne se prive pas d'aller les voir en concert dès qu'ils ne passent pas loin. C'est exactement la démarche entreprise pour ce concert de Nada Surf à Massy le 31 mai dernier. Sauf que Massy, c'est l'Essonne, et ce n'est pas tout à fait à côté de chez moi, mais ça se fait en transport en commun puis à patte (1h20 en moyenne, sans compter le retard). Ayant un grand cœur, JC me propose donc de régler ce problème en venant me chercher en voiture à la gare de Bourg-La-Reine afin de gagner du temps.

Arrivés sur place, on récupère les pass/accréds auprès de l'accueil puis, n'ayant pas mangé, on se laisse tenter par des crêpes maisons aux prix abordables (ce qui sera moins le cas pour les bières qui sont grosso modo aux mêmes tarifs qu'à Paris). Le temps de papoter et de déambuler dans les lieux que le quatuor parisien Hoorsees est déjà en train de balancer son indie-pop sur la scène de la grande salle comportant un étage supplémentaire de gradins. Un très bon point car les spectateurs commencent sérieusement à remplir les lieux en bas. Tandis que JC est déjà au taquet avec son appareil devant la scène, je décide de monter à l'étage et de me trouver une place intéressante pour y suivre le show. Découvert l'année dernière au festival de La Ferme Électrique, le groupe me laisse une image un peu plus positive ce soir. Je ne sais pas si c'est le contexte (festival vs salle, ambiance, fatigue, festivités...) ou si ce sont les dernières dates (dont sept aux États-Unis) qui les ont rendus plus mature dans le jeu, mais le son semble déjà de bien meilleure qualité, ce qui change pas mal la donne. Bien que le style pop de la formation soit ultra calibré et sans grande surprise, on peut néanmoins saluer leur performance pleine de vie et la belle communication qu'ils entretiennent avec le public qui lui rend bien ce soir, et à qui ils ont pu dévoiler en primeur leur séduisant nouveau single "Charming city life". Avant de quitter la scène, les Parisiens n'ont pas manqué de manifester leur reconnaissance et leur chance d'ouvrir pour Nada Surf. Comme on peut les comprendre ! JC retrouvera d'ailleurs les Hoorsees dans la cour intérieure de Paul B, pendant le changement de plateau, pour une photo souvenir comme il les affectionne tant.

La présence de Nada Surf à Massy était pour moi une énigme. La dernière sortie du groupe sur scène remonte au 15 décembre 2022 en Belgique et terminait une petite tournée européenne débutée à la fin du mois précèdent. Leur plus récent disque date de février 2020, soit il y a plus de trois ans... Et puis, j'ai soudainement pensé aux 20 ans de Let go et, dans la foulée, vérifié l'agenda des Américains en me rendant compte qu'ils se rendaient 3 jours plus tard à La Réunion pour un festival, puis pour quelques dates cet été. Probablement une opportunité que la salle ne voulait pas louper, à moins que le quatuor préférait tout simplement s'échauffer pas très loin de l'aéroport d'Orly avant de partir à La Réunion. En tout cas, les 20 ans de Let go n'ont pas arrêté de me trotter en tête les semaines précédentes tout en espérant avoir une large partie du set consacré à l'un des chefs d'œuvre du groupe.

Nada Surf Nada Surf Les acteurs principaux de la soirée débarquent sur scène, saluent de la tête puis ouvrent le bal avec "Popular" ! J'avoue que je n'étais pas prêt du tout pour ça, c'est plutôt le genre de morceau qui serait plus judicieux de mettre en rappel ou pour finir le spectacle, mais ça a le mérite de mettre tout le monde d'accord, y compris moi-même. Ni une, ni deux, c'est "Telescope" qui suit, un vieux titre issu de Karmic, le premier EP du groupe, une véritable bombe, la température monte progressivement. J'ai perdu 27 ans d'un coup en seulement deux chansons, voire trois car juste après la mémorable et enivrante "Hi-speed soul", c'est "The plan" (du premier album, High/low) qui retentissait dans la salle. Nada Surf est dans une forme magistrale ce soir. Pour calmer un peu les ardeurs, les Américains décident d'enchaîner la touchante "Friend hospital" (et l'une des meilleures de You know who you are sorti en 2016) et "Killian's red" qui font un bien fou aux âmes sensibles. La machine à danser se met en marche avec "Looking through", un titre qui commence à dater (2012) mais qui fait le job, tout comme la ballade "Come to me" du dernier album, Never not together.

Tandis que le public réclame la reprise de l'"Aventurier" d'Indochine, Nada Surf en rigole en prétextant qu'elle est compliquée à refaire et qu'ils n'ont pas eu le temps de la travailler. Notons au passage qu'ils prennent rarement la parole sur scène, si ce n'est pour raconter des petites anecdotes en se réaccordant, comme le jour où la mère de Daniel (le bassiste) s'est vraiment rendu compte qu'il était dans un "vrai" groupe en allant le voir jouer dans le temple du rock underground New-Yorkais aujourd'hui fermé, le CBGB's. Daniel, qui sera aussi chanteur principal ce soir, le temps d'un titre en français : "La pour ça". Le temps tourne vite, et les tubes n'arrêtent pas de pleuvoir comme vache qui pisse ("Inside of love", "Happy kid", "Do it again", "Blonde on blonde", "Hyperspace", "See this bones") avec une belle mise en valeur de Let go (7 titres). Le rêve absolu pour tout fan qui se respecte. Le set, avant un rappel gourmand, se termine par "Something I should do", morceau du dernier album qui porte des similitudes avec "Popular" au niveau du chant parlé de manière rapide. Une coïncidence ? Le groupe s'absente quelques instants, reprend ses instruments et nous offre un océan d'amour ("So much love", "Always love") avant de nous faire remuer le popotin et nous faire crier "Fuck it" sur un "Blankest year" festif d'anthologie. On pensait ce show inoubliable terminé, mais il manquait la cerise sur le gâteau : Un "Blizzard of '77" collégial complètement débranché avec une guitare acoustique et quatre voix bien aidées par un public totalement conquis. Incroyable !

En fouillant dans mes plus profonds souvenirs, je crois qu'il s'agit là sans conteste du plus beau des concerts de Nada Surf auxquels j'ai pu assister. Tout était là : la set-list (23 morceaux pour pas loin de 2h de spectacle !), le lieu, l'énergie et l'ambiance du public, un groupe en super forme et d'une humilité rare, un son d'enfer.... Merci Nada Surf, merci Paul B, et merci JC pour ta proposition et bien sûr tes photos qui, je n'en doute pas, sauront capter ces instants précieux.