Motörhead - Bad magic Je ne pensais pas un jour devoir écrire cela. Pourtant c'est le cas : à l'heure où tu liras ces lignes, et comme tu le sais déjà, Motörhead n'est plus. Pourtant, au moment de la sortie de Bad magic, il était plutôt question d'une nouvelle tournée mondiale pour célébrer cet album coïncidant avec les quarante ans de carrière du trio (passé un temps quatuor) mené par Lemmy Kilmister. Seulement, le destin en a décidé autrement. Alors plutôt que me morfondre sur la disparition du bassiste chanteur, je préfère te parler comme il se doit de ce putain de disque qu'est Bad magic, chose que j'aurais dû faire bien avant (le disque est sorti en fin d'été dernier), mais ainsi va la vie.

« Victory or die ». C'est ainsi que débute Bad magic, nouvel (et hélas dernier) album du trio Motörhead. Pas vraiment prémonitoire, car une fois de plus, Motörhead a gagné son pari : sortir un disque nerveux et passionnant. Et dès l'entame de ce 22ème (!) effort une nouvelle fois produit par Cameron Webb (responsable du son du groupe depuis Inferno), ça ne fait pas dans la dentelle ! Motörhead déroule le tapis rouge à son auditoire et lui assène un uppercut qui fait mal aux gencives. La recette est connue de tous : batterie omniprésente, riffs de guitare surpuissante, basse hors du commun et puis cette putain de voix du Sieur Kilmister. À l'instar des Ramones ou d'AC/DC, Motörhead fait du Motörhead, sans concession ni compromis, et c'est bien pour ça que je les aime. "Thunder & lightning" qui suit ne relâche pas la pression et prend littéralement à la gorge. « Fire storm hotel », dans un esprit boogie blues rock, fait son petit effet et démontre à celui qui en doutait encore que Phil Campbell a du potentiel à la six cordes, et que le groove du génial Mickey Dee est intact. Un Mickey Dee qui met tout le monde d'accord avec l'intro du tranchant « Shoot out all your lights », archétype même de ce que Motörhead peut proposer de mieux : riff heavy à l'inspiration blues, pont punk et refrain percutant. Sublime ! À l'image de « The devil », « Electricity » ou « Evil eye », la succession des titres composant Bad magic est un best of de ce que le trio britannique a pu offrir depuis de (très) nombreuses années. Si bien que je pardonne « Till the end », morceau (à la limite de la ballade) certes touchant mais qui n'a pas grand chose à faire dans ce déluge de fureur et d'électricité. Car « Tell me who to kill » ou « Choking on your screams » (morceau sur lequel Lemmy chante très bas comme dans « Brotherhood of man » sur The wörld is yours) ne manque pas de qualités pour décerner à Motörhead le trophée du groupe le plus rock 'n' roll du monde. Et tandis que la fin est proche avec le dansant « When the sky comes looking for you », on se dit que le destin est quand même bien fait quand résonne la dernière plage du dernier album de Motörhead, à savoir la dispensable reprise de « Sympathy for the devil » des Rolling Stones (désolé, l'original est intouchable).

Disque impeccable, Bad magic ne fera pas tâche dans la lourde discographie du combo britannique. Et même s'il sera aux yeux de beaucoup « le dernier album de Motörhead », ce disque aux diversités vocales et aux guitares qui font mal comporte d'excellentes chansons avec très peu de surprises. Mais est-ce cela qu'on attendait de Motörhead ? Putain, je parle déjà du groupe au passé. Le rock 'n' roll n'est peut être pas mort, mais avec la disparition de Lemmy et la cessation forcée des activités de son groupe, il est bien amputé.