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Biographie > gentil Gremlins

Pour ceux qui auraient raté l'un des films cultes des années 80, le mogwai est la version gentille du Gremlins, tant qu'on ne lui balance pas de la flotte dessus (il se multiplie), tant qu'on ne lui file pas à bouffer aprés minuit (il se transforme), tant qu'on ne l'expose pas à la lumière (ça le tue), ça va, la bestiole se comporte comme une adorable peluche vivante. Le Mogwai qui nous intéresse ne craint ni la pluie ni la lumière même s'il est peu habitué au soleil, et oui, il est natif de Glasgow en Ecosse... Plus de 10 ans aprés le film, deux jeunes fans de rock vont sans forcément y penser changer la face du monde musical, on est en 1995 et ni Stuart Baithwaite (guitariste) ni Dominic Aitchison (bassiste) ne connaissent alors Gospeed You! Black Emperor, pourtant, ces deux groupes sont aujourd'hui les références absolues du mouvement "post rock". Le duo s'entoure de Martin Bulloch (batteur) et John Cummings (guitariste) et enregistrent des titres, ces premières expériences sont regroupées en 1997 sur Ten rapid suivi par un premier album pensé dans sa globalité : Mogwai young team. Les instruments dominent, les voix sont accessoires, les émotions submergent les auditeurs, le groupe fait sensation. Depuis, presque métronomiquement ils sortent des albums qui sont autant de perles : Come on die young (1999), Rock action (2001), Happy songs for happy people (2003), sur scène ils font participer d'autres instruments (Barry Burns (claviers) a rejoint le groupe en CDI), jouent dans l'ombre et n'ont pas peur de faire durer le plaisir et les larsens. Avec GY!BE, ils montrent que le rock n'est pas mort et permettent à quantité de musiciens de se trouver une passion pour un rock instrumental qu'il soit à fleur de peau, onirique ou confèrant au lyrisme grandiloquent. Mars 2006, ils livrent un nouveau chef d'oeuvre : Mr Beast.

Review Concert : Mogwai, Live au Grand Rex (nov. 2017)

Review Concert : Mogwai, Mogwai est splendid (avril 06)

Interview : Mogwai, Entretien avec un Mogwai (oct. 2017)

Interview : Mogwai, Interview de Barry (avril 06)

Mogwai / Chronique LP > As the love continues

Mogwai - As the love continues Pour pouvoir écrire sereinement sur un album, il est bon de se replonger dans ce que le groupe a proposé par le passé histoire de se rafraîchir la mémoire, avec Mogwai, c'est à la fois simple et compliqué. Simple parce qu'ils font partie de ces groupes que je n'arrête jamais d'écouter (et comment se passer de "Glasgow mega-snake" ?), compliqué parce qu'ils en sont à leur dixième album et déjà une belle palette de sonorités. L'histoire d'amour continue ici avec la classe d'un groupe qui gère son talent en patron malgré les vents contraires (la pandémie a contrarié pas mal de leurs plans et a forcé le groupe à enregistrer pas mal de trucs "en visio").

Si les choix de sonorités et d'effets donnent une forme d'unité à As the love continues, l'album apporte son lot de diversité avec un tas d'éléments qui permettent d'identifier chaque titre et lui donne un cachet particulier. Pour quelques-uns, la singularité est flagrante comme sur "Ritchie Sacramento", le seul titre vraiment "chanté" (par Stuart) mais qui s'intègre bien mieux à l'ensemble que "Party in the dark" sur Every country's sun, sur "Here we, here we, here we go forever" où l'on trouve des bidouillages électroniques et des guitares claires qui lentement se laissent gagner par des distorsions douces ou sur "Midnight flit" qui se voit être renforcé par un orchestre à cordes. Pour d'autres, ce sont des détails qui assurent le marquage comme cette phrase de Benjamin John Power (Fuck Buttons) qui ouvre "To the bin my friends, tonight we vacate Earth", la présence du saxo et de quelques mots de Colin Stetson sur "Pat stains" ou la discrétion des guitares et l'ambiance lumineuse de "Dry fantasy". Enfin, si "Drive the nail" et "Supposedly, we were nightmares" n'ont pas spécialement capté mon attention, Mogwai ajoute trois monstres à son panthéon personnel de morceaux qui définissent le post rock. Le dernier de l'opus est le premier que je cite car c'est une démonstration du genre, "It's what I want to do, mum" : quelques notes déclinées lentement, des couches instrumentales qui s'ajoutent délicatement, la saturation qui prend de l'ampleur et une fois que tout a bien mariné, un premier éclair de génie avec un rayon incandescent traversant une composition alors prête pour son implosion. C'est ça le post rock. C'est aussi "Fuck off money" aux qualités cinématographiques évidentes et qui cache pas mal de puissance derrière un paravent plutôt ouaté. Enfin, la grande claque de cette nouvelle livraison de pépites, c'est, pour moi, cette plage ultra dynamique, clairement rock, ce "Ceiling granny" enlevé qui occupera certainement une place de choix dans les futures set-lists.

Les pendules sont remises à l'heure, si d'autres combos réussissent de grands albums (Caspian récemment), les patrons sont toujours Ecossais. Réinventant sans cesse leur genre, les Mogwai gardent l'équilibre entre leur routine dans l'excellence et des innovations plus ou moins discrètes qui n'entachent en rien la globalité de leur œuvre.

Publié dans le Mag #46

Mogwai / Chronique LP > Every country's sun

Mogwai - Every country's sun Étrangement, plus j'écoute ce Every country's sun, moins je retrouve ma première impression, celle d'un album aux sonorités franchement nineties qui sentait bon l'indie ricain bien alternatif avec quelque chose dans le traitement du son qui rappelle Tortoise ou Yo La Tengo. Après de nombreuses sessions d'écoute, mes oreilles ont dû s'habituer à l'âpreté de la basse et de certaines guitares pour se tourner davantage vers les sons plus clairs du piano ou d'autres guitares, des sons plus modernes et plus dans la lignée de ce que Mogwai fait depuis quelques années. Le retour de Dave Fridmann à la prod (plus de quinze ans après Come on die young et Rock action et qui a entre temps bossé pour The Flaming Lips, OK Go, Thursday, Tame Impala...) doit être pour quelque chose à cette première sensation. Cette redécouverte d'un son 90's passée, c'est plus l'opposition entre les basses et les aiguës qui ressort, une opposition qui laisse Mogwai dans les hautes sphères, avec ces rares groupes capables de se réinventer en permanence et d'enchaîner les titres simplement superbes.

Et ils le sont quasiment tous sur ce nouvel album... Le chant n'est pas réellement présent, si ce n'est sur "Party in the dark", titre au format pop qui pourrait rivaliser avec les tubes de Grizzly Bear s'il était écouté dans un autre contexte. Ici, entouré de pistes instrumentales, il dénote quelque peu... tout en étant très bon. Mais voilà, placé après "Coolverine" et avant "Brain sweeties" qui sont deux perles absolues, c'est difficile de ne pas voir le morceau comme un casseur d'ambiance. Je préfère donc quand Mogwai brise son propre rythme en l'accélérant nettement ("Crossing the road material", "Battered at the scramble"), en insufflant de l'air et de l'électronique éthéré ("Aka 47" à l'opposé des sons des Avtomat Kalachnikov modèles 1947), en murmurant quelques textes où le chant n'est qu'instrument ("1000 foot face") ou en reprenant ses schémas les plus efficaces de progressions estampillées "post rock" ("Don't believe the fife") parce que si les quasi inventeurs du genre se plaisent à s'en écarter, c'est toujours un bonheur de reprendre une leçon avec eux.

Un des plus beaux artworks de sa discographie (avec celui de The hawk is howling ?), un producteur qui remet au goût du jour le son des débuts du combo, des titres fédérateurs qui portent la patte Mogwai tout en faisant preuve de renouvellement, les haters devront donc encore patienter avant de tacler Mogwai qui avec Every country's sun fait une fois de plus preuve d'un talent fou.

Publié dans le Mag #30

Mogwai / Chronique LP > Rave tapes

Mogwai - Rave tapes Après avoir tout explosé sur leur passage en 2011 avec Hardcore will never die, but you will, disque bouillonnant, laissant le groupe au cœur d'une évolution l'emmenant sur les sillons d'un indie-rock racé et organique au "détriment" du post-rock majestueux dont ils sont quasiment les "inventeurs" sur le vieux continent, les Mogwai n'ont pas vraiment chômé. Un EP (Earth division), une très belle bande-son pour une série qui l'est beaucoup moins (Les revenants, surestimée mais qui surnage toutefois au beau milieu d'une production télévisuelle hexagonale sclérosée), un album de remixes plutôt oubliable (A wrenched virile lore) et pas mal de concerts. Les Ecossais ont été plus qu'occupés mais ça ne les a pas pour autant empêché de trouver le temps et l'énergie créatrice de confectionner un nouvel album studio : Rave tapes.

Un disque qui dans ses premiers instants et le très beau "Heard about you last night" livre une intro' ténébreuse, appelant à l'envoûtement de l'auditeur en exhalant une classe contagieuse qui transparaît également lors des pistes suivantes. Mais après une telle merveille, difficile de revenir à la réalité. Alors les Ecossais ont la riche idée de changer un peu de registre, proposant avec "Simon ferocious", leur lecture très personnelle d'un certain rock répétitif mâtiné d'électronique suranné. Un discours en forme d'ode à la musique synthé rock "lourde" et robotique (l'efficace "Remurdered"), à l'esprit post-rock plus traditionnel aussi ("Hexon bogon"), au magnétisme narcoleptique surtout (en témoigne notamment l'immersif et intemporel "Repelish"). On l'a compris, quoiqu'ils entreprennent, les Anglo-Saxons maîtrisent leur sujet à la quasi perfection. Et si deux/trois titres sont en deça de leur toujours immense potentiel (on pense notamment à "Master card" ou "Deesh" assez oubliables), le contenu de ce Rave tapes est en permanence au bas mot très honorable.

Parce que le minimum syndical chez Mogwai est forcément un sommet difficilement atteignable chez nombre de leurs contemporains et que les Ecossais ont toujours cette capacité à rebondir après une ou deux pistes à l'excellence moindre pour livrer un climax de toute beauté ("Blues hour" et son indie-rock classieux mais pénétrant, un "No medicine for regret" empreint d'une mélancolie habitée). Et alors que l'on ne se demandait même plus si le groupe allait poser un single quelque part, c'est à l'heure du dernier morceau "The lord is out of control" qu'il se décide enfin. Expédiant par la même occasion dans les enceintes un titre (trop) chargé en effet et qui n'est certainement pas ce qu'il a fait de mieux. Même s'il a au moins le mérite de ne jamais réellement se reposer sur ses acquis, prenant sans cesse des risques, certes calculés, mais aussi salutaires qu'artistiquement libérateurs.

Fascinant.

Mogwai / Chronique LP > A wrenched virile lore

Mogwai - A wrenched virile lore J'ai envie de dire "mwouais". Mwouais parce que je ne comprends pas tout à fait l'intérêt de sortir un album de remixes de Mogwai. Pourquoi un groupe qui est l'un des plus grands spécialistes de la création d'atmosphères tendues et de déchirements lumineux offre-t-il son dernier album en date Hardcore will never die, but you will à la moulinette de musiciens anglais et américains ? Quel intérêt ? La plupart des groupes (Zombi, The Soft Moon) ou des bidouilleurs (Justin K. Broadrick de Jesu ou Godflesh, Tim Hecker, Robert Hampson...) adorent les machines et les rythmes beatés évidents, ils ont quasi tous cadencé des morceaux dont les tempos étaient avides de liberté. Faire jouer l'album par un orchestre symphonique ou ce genre d'idées, ok, je veux bien mais là, je reste circonspect...

Le seul exercice vraiment intéressant, c'est Robert Hampson qui s'y essaye, mixant "White noise" et "Death rays" pour donner naissance à "La mort blanche" mais comme le nouveau-né ressemble assez à ses parents, on peut être déçu car c'est toujours la même rengaine avec les remixes : il faut trouver le juste milieu entre le respect du titre original et sa transformation en un nouveau morceau... Si j'écoute le premier remix de "Rano pano" (ma plage préférée de Hardcore will never die, but you will), je retrouve une partie de ce que j'aime (cette boucle mélodique entêtante) mais pas la pureté que lui ont donné les Ecossais car soit son remixeur a ajouté des tonnes de sons samplés bizarroïdes (la version de Klad Hest) soit il l'a assombri et rendu plus granuleux (la version de Tim Hecker), ce sont des choix artistiques, c'est leurs pattes, ok, mais ça va plaire à qui ?

A wrenched virile lore est donc un exercice de style, et comme quand certains reprennent Pink Floyd à la sauce reggae, l'énoncé n'était peut-être pas suffisamment bon pour obtenir un résultat convaincant... Certaines versions ont tout de même trouvé le point d'équilibre comme le "White noise" de Cylob ou le "How to be a werewolf" de Xander Harris qui peuvent servir de fond sonore à une soirée électro-lounge top hype. "Mexican Grand Prix" a été retravaillé par RM Hubbert en version guitare acoustique et c'est plutôt une réussite, espérons que ça donnera des idées pour le futur car si Mogwai peut faire grandir ses compositions, c'est certainement avec encore plus d'instrumentations ou une chaleur différente et non pas avec un surplus de trifouillages électroniques.

Mogwai / Chronique LP > Hardcore will never die, but you will

Mogwai - Hardcore will never die, but you will Au premier regard, le nouveau Mogwai fascine. L'atmosphère urbaine qui se dégage de son artwork, les couleurs, l'angle de la prise de vue, il y a là quelque chose d'assez inexplicable, une beauté glacée et fascinante qui laisse à penser que le groupe a d'ores et déjà réussi son coup. Lorsque "White noise", morceau inaugural de l'album débute, on sent les écossais complètement libérés de toute pression extérieure, de toute inhibition intérieure, l'éloignement géographique de ses membres qui vivent désormais à plusieurs centaines de kilomètres les uns des autres semblant avoir paradoxalement rapproché le groupe. Comme si cette difficulté "technique" inhérente à la distance avait fait l'effet d'un catalyseur sur le processus d'écriture des écossais, qui livrent ici un premier titre fabuleusement serein, léger et mélodique, affranchis d'un carcan "post-rock" dans lequel ils ont certainement du se sentir trop à l'étroit.

Lorsque vient le moment de passer à la suite, on se sent complètement en phase avec le groupe, qui dévoile alors des morceaux aux textures électroniques new-wave (le vocoder et les beats électrisants de "Mexican Grand Prix"), aux tentations rock grésillantes (un brin faciles) sur "Rano Pano", avant de revenir à ses premiers amours pour un post-rock tantôt diaphane tantôt massif ("Death rays"), toujours vibrant. Un tube plus tard avec le frondeur "San Pedro", véritable bombe à retardement en matière de rock salvateur à la mélodie en quête d'absolu et Mogwai de confirmer qu'avec cet Hardcore will never die, but you will, il est plus que jamais au sommet de son art, faisant à peu près tout ce qu'il veut avec une réussite quasi irréprochable et toujours cette aisance qui fait la marque des grands. Comme sur le très beau "Letters to the metro", une merveille contemplative au magnétisme envoûtant, ou "Too raging to cheers" petit bijou de sophistication post-rock et de mélancolie à fleur de peau.

Des morceaux toujours variés, quelques pépites comme à chaque fois avec eux, les britanniques ont fait plutôt fort mais se sont aussi offerts quelques petits ratés avec le très quelconque "How to be a werewolf" ou un "George Square Thatcher death party" aux turgescences synthétiques un peu poussives malgré un final intense. Mais encore une fois le vocoder fait des ravages... Des moments de léger égarement rapidement compensés par un "You're Lionel Ritchie", joue la carte du Mogwai le plus pur, concluant l'album sur un morceau de post-rock tempétueux et massif, tout en déferlantes soniques et crescendo éruptifs. Classe, comme l'est du reste "Music for a forgotten future", une pièce de quelques vingt-trois minutes, figurant sur l'édition 2xCD de l'album. Une ode évanescente et sublime propice à l'évasion des sens, l'abandon de soi au coeur d'une oeuvre, sans doute l'une des plus belles réussites du groupe... qui ne figure donc pas sur l'édition standard du disque. Enième paradoxe de la part du groupe quand on se dit qu'avec avec un titre comme Hardcore will never die, but you will, les écossais facétieux se sont décidément amusés à brouiller les pistes pour mieux égarer, surprendre et enchanter leur auditoire.

Mogwai / Chronique LP > Special moves | Burning

Mogwai - Special moves Alors celui-là, autant dire qu'il était plus qu'attendu. Non seulement parce que Mogwai, c'est souvent excellent sur CD, mais surtout parce que c'est réputé comme étant assez divin en live. Donc à fortiori, un enregistrement live, même s'il ne peut restituer le frisson immédiat d'un concert, est déjà un bon palliatif pour ceux qui n'ont jamais vu la formation écossaise oeuvrer sur scène. Et comme en plus, il y a un DVD et non des moindres avec...

Special moves étant de fait donc, difficilement dispensable, il compile quelques onze titres captés lors de trois shows donnés à Brooklyn (New York, USA) en avril 2009, pour nous emmener dans des sphères post-rock évanescentes aux panoramas idylliques (la très belle ouverture de set avec "I'm Jim Morrison, I'm dead"). Difficile de garder une once d'objectivité devant l'impression de maîtrise et de communion avec l'auditeur qui se dégage de cet album live ("Hunted by a freak") : les guitares grimpent dans la stratosphère, les mélodies gagnent en densité ("You don't know Jesus""), "I love you, I'm going to blow up your school" verse des litres de post-rock ascensionnel, électrique et enivrant... Les basses sont lourdes et obsédantes, les guitares ondulent autours de mélodies elle-mêmes entortillées autour d'un clavier gracile ("I know you are but what am I ?") et l'émulsion bruyante ("Like Herod") qui se produit lorsque les Mogwai passent en mode "agressif" enflamme les enceintes. Pour la douceur, il faudra se pencher sur un "2 rights make 1 wrong" tout en délicatesse infinie, preuve que les écossais savent toujours tout faire, ce, avant le final, magistral, qu'est l'imposant "Glasgow megasnake".

Place à l'image (mais aussi au son puisque l'on y découvre 8 titres joués en live) avec Burning, un très beau film documentaire de quarante sept minutes à l'esthétique particulièrement soignée, réalisé par Nat Le Scouarnec et Vincent Moon, ce dernier étant notamment connu pour ses travaux avec la Blogothèque et notamment des captations live de Bon Iver, Vic Chesnutt, Xiu Xiu ou Okkervil River. En accompagnant le groupe sur la série de concerts qu'il donné le groupe à NYC, les deux réalisateurs ont laissé tourner leurs caméras pour capter l'essence de ce qu'était Mogwai en live mais aussi en dehors de la scène, pour "retranscrire" au plus près cette immersion dans la tournée des écossais. Des images live qu'ils ont monté ensuite avec des plans d'extérieurs, capturés en ville ainsi que quelques jolies prises de vue filmées cette fois dans l'intimité du groupe. Le tout en noir et blanc (très classe), mis en valeur par des enchaînements magnifiques et un montage qui scénarise leur travail d'une manière originale, de manière à être avec le collectif écossais et en même temps conserver une certaine distance, pudique, vis à vis de ses membres. Plus qu'un DVD standard de plus comme en voit des tonnes ou qu'un rockumentaire simplement bien filmé, Burning est entre les deux, la classe en plus, soit le parfait complément de Special moves, si ce n'est plus. Classe, comme souvent avec le groupe.

[NB] : en bonus, on a également droit à 11 minutes de "Mogwai fear Satan" live enregistré à Reims par le crew de la Blogothèque.

Mogwai / Chronique LP > The hawk is howling

Mogwai - The Hawk is howling Après l'excellentissime Mr Beast, Mogwai dévoile The hawk is howling et démontre que le groupe est dans une phase créatrice qui lui vaut de produire des morceaux de très haut niveau. Les écossais ne perdent pas leurs temps en courbettes inutiles et circonvolutions arty stériles pour nous faire entrer directement dans leur nouvel album. "Im Jim Morrisson, I'm dead" est à ce titre d'une élégance mélodique rare. Une beauté mélancolique, pleine de solennité mesurée, un clavier enjôleur et des harmonies graciles, Mogwai nous fait déjà succomber après un seul et unique morceau. Une petite douceur et les britanniques durcissent soudainement le ton avec l'implacable et légèrement Toollien "Batcat". Lourd, rageur, presque animal, ce second titre met la mécanique sur orbite en faisant tourner la machine à riffs à pleins tubes, quand "Danphe and the brain" (ou est-ce Daphne... peut-être une inversion sur le verso du CD promo) revient vers des territoires musicaux plus évanescents, usant à loisir d'un orgue électronique pour nous plonger dans une torpeur semi-consciente et nous transporter vers les limbes du post-rock ("Local authority").
D'ailleurs, c'est à ce moment que l'on se rend compte que les frontières de ce (sous)-genre musical, en partie initié par les auteurs du présent The hawk is howling, sont définitivement devenues très floues. Mogwai flirtant ici avec les codes du rock et de la pop indie anglo-saxonne, délivrant des arrangements suaves non sans en conserver une écriture unique qui transcende littéralement les styles abordés. Comme lorsqu'il la joue délibérément rock sur le lumineux "The sun smells too loud". Titre solaire en forme de petite friandise musicale qui laisse l'esprit léger quand "Kings meadow" puis "I love you, I'm going to blow up your school" (et son crescendo final cathartique et éruptif) nous replongent avec bonheur dans les affres d'une mélancolie noctambule et ténébreuse. Puissance des guitares ou douceur et volupté des arrangements synthétiques d'un groupe au sommet de son art, Mogwai mêle les deux au grès de ses désirs, livrant ainsi un "Scotland's shame" lunaire aux nappes de guitares qui électrisent l'atmosphère et consument les sens. Maître de ses effets, catalyseur d'ambiances, le quintet livre avec "Thank you space expert", la plage sonore (?) la plus courte de sa carrière (4 secondes de silence absolu... sic) avant de boucler la boucle sur "The precipice". En configuration : "rock lourd et incisif", Mogwai conclue les débats sur une note de puissance, afin de mettre tranquillement et sans trop d'efforts le monde à ses pieds. On appelle ça avoir la classe...

Mogwai / Chronique LP > EP + 6

mogwai_ep.jpg Qu'est-ce que c'est que ce truc encore ? Telle est la question que se poseront peut-être certains lecteurs qui ne connaissent que très peu le travail de Mogwai. La réponse est simple, après le "collected recordings" qu'était Ten rapid, EP + 6 est un objet regroupant rien moins que 3 EP sortis par le groupe à ses débuts et donc compilés sur une seule galette. Ou comment faire des économies de places et de £, $ ou €... Noisy pop lunaire avec "Superheroes of BMX", longues plages atmosphériques et éthérées ("Now you're taken"), minimalisme post-rock ("X-mas steps") et odes mélancoliques ("Christmas song"), Mogwai faut preuve dès ses morceaux d'une très grande capacité à hypnotiser l'auditeur par des compositions lentes, apaisées et fourmillant de mille détails et nuances.
Véritable invitation au voyage contemplatif vers des contrées inexplorées, "Stanley Kubrick" est un morceau qui cristallise les aspirations musicales du groupe. Et déjà, Mogwai pose les bases d'un genre propre dont il est l'un des principaux géniteurs : le "post-rock". Mélodies intenses et déchirantes, aspirations bruitistes, ou crescendo majestueux, les compositions de la formation écossaise alternent le chaud et le froid. Passer du calme absolu à l'apocalypse, de la douceur cotonneuse et hypnotique au chaos sonique, de la sérénité à l'éclair de rage brute, voilà ce qu'est déjà Mogwai à l'heure de ses premiers essais discographique, à savoir un groupe capable de passer d'une seconde à l'autre d'un petit ruisseau mélodique à un torrent glacial et oppressant. Maîtrisant l'art de la saturation éléctrique comme personne, jouant sans cesse des contrastes entre l'apaisement atmosphérique et le déluge sonore tellurique, Mogwai pose avec les titres qui composent cette compilation, non seulement les bases d'un genre, mais surtout l'esquisse d'une griffe musicale unique, souvent imitée, jamais égalée.

Mogwai / Chronique LP > Ten rapid

mogwai_ten_rapid.jpg Compilant les tous premiers enregistrements de Mogwai sur un même CD, Ten rapid est le témoignage en 9 plages des balbutiements prometteurs d'un groupe qui deviendra l'une des formations majeures de la scène post-rock internationale quelques années plus tard. Regroupant les morceaux ne figurant pas sur le premier album du groupe (Young team) et parus sur divers singles (l'EP New paths to Helicon, parts 1 & 2), split CD et compilations entre 1996 et 1997, cet objet est un le témoignage étonnant d'un groupe alors en pleine recherche d'identité musicale et, pourtant déjà, tout et là, ou presque. Certes les âmes chagrines objecteront que le son est loin d'être à la hauteur du talent des natifs de Glasgow, les guitares sont un peu étouffées, la prod un peu trop "cheap", mais ceux qui aiment les objets un peu plus rares, les disques imparfaits où l'on découvre déjà les prémices de quelque chose qui va nous bouleverser, y trouveront sans doute leur compte.
Car n'oublions pas qu'il s'agit des premiers enregistrement des écossais, pourtant déjà sur le chemin de la réussite. Les instrumentations sont déjà savamment travaillées, Mogwai fait preuve d'une maîtrise assez rare pour un groupe encore "débutant". Distillant ses atmosphères avec finesse, pendant qu'il aiguise soigneusement son sens de la mélodie qui viennent titiller affectueusement l'épiderme ("Ithica", Summer"), le groupe berce ses compositions d'un spleen mélancolique et envoûtant ("Helicon") et livre ainsi quelques morceaux à la fraicheur candide et tout simplement désarmante. Mogwai n'en est alors qu'à ses débuts et va évidemment évoluer. Mais nombre de ceux qui connaissent la plupart des oeuvres du groupe s'accorderont sans doute à dire que ce qui fera quelques mois (années...) plus tard la magie du groupe sur CD et en live, est en grande partie déjà présente sur cette compilation de titres pas toujours très connus. Avis aux amateurs...

Mogwai / Chronique LP > Mr Beast

mogwai : mr beast Si le post-rock est en plein essor, il lui manquait encore un album qui puisse atteindre au coeur le "grand public rock", maintenant, il y a Mr Beast... Mogwai a réussi le mixage entre rock intello-instrumental et pop accrocheuse, ils vont à l'essentiel avec un son très clair sans renconcer à leurs élans ("Glasgow mega-snake", "We're no here"), le décollage vers leurs hautes sphères est beaucoup plus incisif, plus direct, plus percutant.
Faut-il comparer ce nouvel album aux autres ? Ce n'est valable que pour les amateurs de Mogwai et ces derniers n'ont pas attendu cette chronique pour se ruer sur Mr Beast... Mais ceux qui vont découvrir les Ecossais avec ce nouvel opus vont croiser un Mogwai bien plus pop et aux compositions bien plus solides qu'à leurs débuts même si le modèle déposé "Ithica 27ø9" reste un étalon post-rock toujours indispensable. Mr Beast est plus dynamique que Mogwai young team, se rapproche dans ses quelques titres chantés de l'atmosphère de Rock action ("Acid food", "Travel is dangerous") mais de mon point de vue, c'est surtout le petit frère de Come on die young.
Mogwai offre 10 titres aux couleurs différentes qui s'assemblent pour en créer une autre, des fragments qui imagent la détresse comme la quiétude, donnent de l'envie ("Folk death 95") ou apportent le calme ("Emergency trap") mais qui offrent une évasion vers un autre monde. Cette escapade mentale, les Ecossais l'ont vécu en invitant Tetsuya Fukagawa à venir poser sa voix sur "I chose horses". Le chanteur d'Envy, qui a lui aussi les épaules chargées de l'existence d'un renouveau du rock, nous parle dans sa langue (le japonais) et n'utilise pas les capacités émotionnelles qu'on lui connaît, il se fond ainsi dans le décor composé par le quintet, en quelque sorte les deux parties se rendent hômmage profitant béatement de la présence de chacun dans un même lieu.
Mr Beast est facile à apprivoiser, si tu ne connais pas encore l'univers Mogwai, il te sera facile d'y pénétrer, par contre, sache qu'il te sera ensuite impossible de t'en échapper... Au diable, rejoins-nous.