Microfilm a toujours eu ce petit "truc" assez indéfinissable qui lui permet de naviguer en dehors des modes, de façonner sa propre griffe musicale sans pour autant avoir à user de structures toujours plus alambiquées pour se faire remarquer. Troisième album du groupe, The bay of future passed, ne déroge pas à la règle, immuable chez lui, qui suppose que l'on peut faire simple, inventif et efficace. Une pochette qui renvoie aux affiches des films noir des années 50 (mais avec de la couleur), toujours ses samples de long-métrages que l'on imagine sorti tous droits d'un projet avorté de Brian De Palma (flagrant sur "Blood sample"), une superpositions de dialogues importés du cinéma sur des boucles instrumentales hypnotiques qui nous font perdre toute notion du temps.
Microfilm, c'est un peu comme vivre à longueur de temps enfermé dans les salles obscurs et passer son temps à regarder des bobines se dérouler sur grand écran : on s'immerge dans les films, on oublie tout le reste et, l'ambiance feutrée des lieux aidant, on se perd peu à peu jusqu'au moment où la lumière se rallume "enfin".
Au delà de ses atmosphères si particulières, la musique du groupe possède un dynamique imparable, un groove qui serpentent à travers les dialogues pour imprimer un peu plus sa marque ("Brute force", "State & Island"). Guitares volubiles, une rythmique métronomique, une légère touche "pop" disséminée ci et là (l'intro de "The bay of future passed"), un ou deux petits crescendo stratosphérique (la suite de ce morceau sublime qu'est "The bay of future passed"...) une basse prégnante, des dialogues aux abonnés absents (preuve que le simple étant de "groupe-concept" ne fait pas tout et serait bien trop réducteur), Microfilm réussit à peu près tout ce qu'il entreprend. De la tension imprimée sur "Dernière séquence" à la virulence mélodique de "Combinaison", en passant par ce sentiment de résignation troublant sur le bien-nommé "Devant nous, rien", ce malgré une certaine redondance dans les motifs instrumentaux (le seul bémol de l'album), le groupe distille ses atmosphères avec un sens aigu de la narration mélodique, une musicalité dans les enchaînements qui, entre bande-son de film inexistant et album-concept bien réel, lui permet de trouver un juste milieu bien trop rare en ces temps de surenchère pesante et de minimalisme abstrait à l'égocentrisme stérile.
Dernier twist scénaristique avec une sortie tout en faux semblants et une très belle relecture de "Blood simple" au piano, épilogue feutré d'un un album au script incroyablement ciselé et aux atmosphères fascinantes. Rideau. On l'a disait "post-rock" à l'époque de A journey to the 75's, quelques années et deux albums plus tard, on se rend compte que la musique de Microfilm "n'est simplement" que "rock instrumental", originale de par son concept de base, bluffante de par ce que le groupe y insuffle pour magnifier son écriture de la première ligne de dialogue au dernier soupir. Difficilement dispensable tout de même...
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LP : The bay of future passed
Label : Head Records
Head Records (396 hits)
Date de sortie : 02/12/2009
Blood Sample
State & Island
The Bay Of Future Passed
Devant Nous, Rien
Dernière Séquence
Combinaison
Blood Sample (Piano Edit)
Note : les commentaires appartiennent à ceux qui les ont postés. Nous n'en sommes pas responsables.
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Re: Microfilm - The bay of future passed
"A la recherche de Justin Hayward
“DAYS OF FUTURE PASSED” est un album des Moody blues sorti en 1967. Enregistré avec un orchestre symphonique conduit par Peter Knight, cet album concept nous raconte la journée typique d'un jeune homme moderne, en même temps que ses rêves et ses angoisses. Ces jours (days) pleins d’espoir tourné vers un futur enchanteur et une promesse de bonheur deviennent pour Microfilm une baie (the bay), une plage. Le temps devient espace, se mue en paysage comme pour mieux s’arrêter.
En 2010 le jeune homme, désormais postmoderne, aimerait encore croire aux grands récits et aux utopies des années 70 mais ne peut que se réfugier dans un “futur antérieur”. L’orchestre symphonique s’est tu, tout comme la voix de Justin Hayward et ses “I love you cause I love you” pour laisser place aux larsens des guitares. Seuls restent de longues montées harmoniques, un rock dit progressif et un goût prononcé pour la narration.
L’invention chez Microfilm ne se situe pas dans l’abandon du chant mais dans l’apparition de voix multiples empruntées au grand cinéma comme aux séries B et à leurs doubles imagés. Le leader, au sens du chanteur héroïque, figure autour de laquelle s’est construite l’histoire du rock, apparaît de manière composite en autant de personnages convoqués au fil des morceaux. D’ailleurs, il est intéressant de noter que les extraits choisis mettent en scène des héros et héroïnes dans des moments d’angoisse, de fragilité ou de doute, comme une représentation subjective d’un état du monde, de l’humain.
La bande originale du film de cinéma, dans la relation entre l’image et le son, est ici renversée. C’est bien la musique qui construit l’histoire alors que les images et les dialogues viennent en écho, en accompagnement, ajoutent une strate cognitive. Les quatre musiciens, sobres et brillants, en contre-jour deviennent les silhouettes d’un film qui se joue sur l’écran qui les accompagne. L’ensemble fait image.
L’album nous invite à construire une multitude d’histoires, nous laisse rêver les décors, paysages de western, bas-fonds d’une ville des années 50, et parachever les intrigues, invasion d’aliens, catastrophe surnaturelle, histoires de meurtres ou de cadavres disparus…
L’incursion dans le champ documentaire guidée par le témoignage poignant d’un ouvrier Peugeot nous plonge dans les abîmes de la souffrance humaine et nous met face à une réalité sociale émouvante et cruelle. “The bay of the future passed” se dénoue par un morceau de piano mélancolique, le disque s’arrête, une femme belle et désirable pose sa tête sur votre épaule et vous susurre à l’oreille des mots d’amour."
Yann Chevallier