Mia Vita Violenta - Grey Seas Durant l'été 2017, un jeune groupe (formé en 2013 quand même, tout est relatif) prend ses quartiers dans le studio de La Ferme Électrique avec Camille Jamain, un producteur parisien (Jojobeam, ENOB, Casse-Gueule) connu notamment pour opérer comme ingé-son sur les recommandables soirées En Veux-Tu En V'là. La raison : sortir un troisième disque (entre le long EP et le mini-album) d'une trentaine de minutes intitulé Grey seas. Ce groupe se nomme Mia Vita Violenta - en référence à un album de Blonde Redhead que les Parisiens (ou du moins une partie) citent souvent comme une référence indéniable - et combine ses influences émo, noise-rock, post-rock et post-hardcore pour en ressortir une énergie brute et intense, parfois fugace et contrastée par une légèreté mélodique et un magnétisme astral qui rompt les dynamiques les plus abruptes du combo.

En somme, Grey seas joue du yo-yo dès qu'il le peut, comme de ses influences citées plus haut. En les évoquant, on se plaît à ressentir l'émoi de certains de nos vieux albums d'Engine Down, pour ses arpèges émo-rock et ses envolées de guitares, de Cult Of Luna, pour l'aspect du riffing massif, de Rosetta, pour ses ambiances éthérées, ou bien encore de Drive Like Jehu ou même Unwound, pour leurs structures syncopées ou épineuses. Dès l'introductive et brumeuse "Expand", on ne sait à quelle sauce l'auditeur va se faire cuisiner, ces "mers grises" nous laissent flotter progressivement sur de plus ou moins grosses écumes suivant les moments. "Shape" et "Grey seas" en sont les plus beaux exemples et sûrement les morceaux les plus sublimes que le quatuor a achevé depuis son début de parcours. Rarement la noise-rock n'a aussi bien cohabité avec le post-rock et le post-hardcore.

Avec ce troisième essai, Mia Vita Violenta transforme tout ce qu'il touche en or, difficile alors de lui trouver quelconques défauts. Si on cherchait un peu la petite bête, on oserait timidement prétendre avoir eu l'envie d'entendre plus de chant ou de "gueulantes" à la AmenRa sur certaines déferlantes de distorsions ("Shape"). Mais l'espace servant à l'expression instrumentale n'est-il pas au final une raison valable pour laisser la voix porter son message au mieux par la suite ? Si la réponse est positive, alors l'étrange et non moins excellente "Bipola" et ses schémas rythmiques cycliques nous donne en effet tort. Dans tous les cas, ce disque est à écouter d'urgence, et notez que son univers majoritairement sinistre est plutôt en raccord avec sa pochette qui représente un portrait de la célèbre artiste-sculptrice Camille Claudel. Une femme talentueuse qui a connu une longue fin de vie en internement psychiatrique après de profonds troubles de démence et de paranoïa. Mia Vita Violenta dépeint-il en musique la démence ? À vous de nous le dire !