Ayant toujours suivi plus (l'éponyme inaugural) ou moins (II) de près les aventures des Canadiens de Metz, c'est sans a priori que je découvre Strange peace. Une paix étrange ? Tiens donc, auraient-ils levé le pied ? Cela ne m'étonnerait pas, tant la troisième œuvre d'un groupe est en général synonyme d'évolution marquante dûe à une certaine maturité et du recul sur son propre travail. En tout cas, dès le premier titre de ce nouvel album ("Mess of wires"), j'en suis pas totalement convaincu, le mur du son à la A Place To Bury Strangers fait son effet direct, une belle mandale dans la gueule, les riffs sont acérés, le rythme et le rendu sonore sont puissants et pesants. On se souvient qu'à l'époque notre cher et tendre collègue et néanmoins ami Cactus vilipendait gentiment la production des premiers disque du trio, sur ce présent méfait, il ne risque pas de s'en plaindre puisque ce sont Steve Albini (reconnu pour ses travaux avec Nirvana, Jesus Lizard, Neurosis et les Pixies) et l'habituel Graham Walsh (artisan sonore de Viet Cong, Alvvays ou Young Rival) qui se sont chargés de la production maousse costaud de ce Strange peace.
Ce fait est, inutile de vous préciser que la profondeur et la densité du son pour un trio sont exceptionnelles, un rendu qui, s'il sonne comme tel en live, fera un ravage et poussera le public dans ses retranchements. J'ai envie de vous dire qu'heureusement, par moments, le groupe sait ouvrir son champ musical à de belles harmonies (comme "Cellophane" et "Raw materials", d'inspiration Fugaziennes) et à des ambiances plus relâchées (qui font franchement du bien !) comme dans la longue interlude "Caterpillar" ou dans "Sink". Le reste n'est que grosso merdo du Metz tel qu'on le connaît depuis ses débuts. Entre noise rock et post-punk, Strange peace n'accorde finalement que peu de répit à l'auditeur qui sera d'ailleurs pris à parti avec un fulgurant brûlot punk-garage nommé "Dig a hole" à la (presque) toute fin. En somme, pour mieux l'achever et qu'il creuse lui-même son propre trou.
Durant ces 36 minutes enregistrées "en direct" en quatre jours, jamais l'ennui nous ronge. C'est la force d'un bon album et si Metz s'est taillé une sacrée bonne renommée avec ses deux premiers opus, nul doute que cette "paix étrange" viendra l'asseoir encore plus.
Publié dans le Mag #31