Rock Rock > (The) Melvins

Biographie > Ton Buzz me donne la Dale !

Les Melvins voient le jour dans les années 80 à Montesano (pas loin de Seattle, entre Olympia et Aberdeen...) quand des amis qui fréquentent le même lycée décident de former un groupe. On trouvait alors Buzz Osborne à la guitare et au chant, Matt Lukin (futur Mudhoney) à la basse et Mike Dillard à la batterie. Dans un premier temps, ils jouent des reprises des Who et de Jimi Hendrix mais s'orientent très rapidement vers le punk-hardcore. Mike Dillard quitte rapidement le navire et sera remplacé par Dale Crover qui reste, avec Buzz Osborne, les deux seuls membres permanents des Melvins.
Depuis leur début, les Melvins ont connu énormément de changements de bassistes et semble connaître actuellement une période de stabilité avec le duo Big Business (Jarred Warren à la guitare basse et Coady Willis à la batterie) qui les a rejoints pour l'album (A) senile animal. L'addition de ces deux fortes personnalités musicales à permis au Melvins de se renouveler et de connaître à nouveau un succès critique qui s'était un peu émoussé au fur et à mesure des albums.

Les Melvins ont aujourd'hui une discographie conséquente liée à une production régulière d'albums mais aussi à des collaborations diverses.

En voici une liste complète :
Six songs (1986)
Gluey porch treatments (1987)
Ozma (1989)
Eight songs (1991)
Ten songs (1991)
Bullhead (1991)
Eggnog (1991)
Your choice live series vol.12 (1991)
Lysol aka Melvins (1992)
King Buzzo (1992)
Dale Crover (1992)
Joe Preston (1992)
Houdini (1993)
Prick (1994)
Stoner witch (1994)
Stag (1996)
Honky (1997)
Alive at the fucker club (1998)
The maggot (1999)
The bootlicker (1999)
The crybaby (2000)
Gluey porch treatments réedition via Ipecac (2000)
Electroretard (2001)
Colossus of destiny (2001)
Hostile ambiant takeover (2002)
Millenium monsterwork 2000 avec Fantomas (2002)
Pigs of the roman empire avec Lustmord (2004)
Never breathe what you can't see avec Jello Biafra au chant (2004)
Sieg howdy! avec Jello Biafra au chant (2005)
(A) senile animal (2006)
A live history of gluttony and lust (2006)
Nude with boots (2008)
The bride screamed murder (2010)
Freak puke (2012)
Everybody loves sausages (2013)
Tres cabrones (2013)

Review Concert : (The) Melvins, Les Melvins au Grand Mix (avril 2013)

(The) Melvins / Chronique LP > Working with God

(The) Melvins - Working with God En début d'année, les Melvins ont voulu faire plaisir à leurs fans. Le trio a profité du lancement de leur dernier disque, Working with God, pour ressortir en vinyle Hostile ambient takeover (2002) et leur tout premier disque Gluey porch treatments (1987). Working with God est le deuxième album, après Tres cabrones (2013), comprenant la formation de 1983 (Dale Crover à la basse et Mike Dillard retournant à la batterie) et le moins que l'on puisse dire c'est que la bande s'éclate au point de commencer le disque par "I fuck around", reprise punk fun du "I get around" des Beach Boys. Une véritable réussite (bravo pour le travail des chœurs qui n'est pas chose aisée) donnant de l'entrain à ce qui va suivre. Et le moins que l'on puisse dire est que la déception n'est vraiment pas de mise, car ce qui suit est du 100% Melvins pur jus, avec son riffing groovy comme on les aime ("Negative no no", "Bouncing Rick", "Boy Mike"...) des ambiances sombres et lourdes ("Caddy daddy", "Hot fish"), aux structures parfois tortueuses et aux sonorités bizarroïdes, notamment cette fin a capella sur "Good night sweetheart" dont on ne sait pas vraiment pas quoi en penser sur le coup. En somme, du gros délire, du Melvins en roue libre qui prouve qu'à l'approche de la soixantaine, ses membres continuent de profiter de la vie tout en gardant leur esprits d'enfants et d'ado intacts ("1 Fuck you"), pour notre plus grand bonheur !

Publié dans le Mag #48

(The) Melvins / Chronique LP > Pinkus abortion technician

(The) Melvins - Pinkus abortion technician Un an après la sortie de A walk with love & death, les Melvins mettent dans les bacs Pinkus abortion technician. En passant par le label Ipecac Recordings, ils allongent encore une discographie déjà longue comme le bras et même plus. Venu en 2016 sur l'album Basses loaded, Steven McDonald récidive pour tenir une partie des lignes de basse. Pour compléter le travail du musicien de Redd Kross, rien de moins que la participation de Jeff Pinkus. Un bassiste qui lui, est apparu sur plusieurs disques des Melvins (Hold it in, Basses loaded) et qui a une influence importante sur la formation de Buzz Osborne et Dale Crover. Le titre de l'album Pinkus abortion technician est composé du nom du musicien et d'un album qu'il a enregistré avec Butthole Surfers : Locust abortion technician.

Les Melvins entament ce nouveau disque par "Stop moving to Florida". C'est un medley de "Stop" de The James Gang (1969 - Yer'Album) et de "Moving to Florida" de Butthole Surfers (1986 - Cream corn from the socket of Davis). Personne n'est ménagé dans la première partie du titre où l'ensemble est très énergique. Arrivés aux deux minutes, les Melvins ne prennent pas le temps d'aménager une transition. La fracture est nette. Le morceau se poursuit sur une voix sans mélodie accompagnée des plus gros effets de la section rythmique. "Embrace the rub" est un superbe punk dopé qui passe en 1:40' sans prendre le temps de respirer. "Don't forget to breathe" fait parler le contraste. Lent et lourd, il s'inscrit davantage dans le registre auquel les Melvins nous habituent. Perché sur ses 7:53', il est sans conteste le morceau le plus long de l'album. Le gong vient littéralement mettre fin à la composition. "Flomboyant duck" fait apparaître la guitare acoustique des Melvins. Sur l'amorce, le rêve pourrait être présent dans le chant mais il est cassé par quelques gros riffs dont la formation a le secret. Malgré quelques plaintes lancinantes de la guitare électrique, l'acoustique pose ensuite un jeu hypnotisant. C'est bien sûr le calme avant la tempête : "Flamboyant duck" finit dans un barouf d'enfer. Les Melvins poursuivent en semant le chaos sur "I want to hold your hand" des Beatles (1963). La reprise donne dans le noise et se retrouve dépouillée de son essence pop destinée à plaire aux bonnes familles américaines. On finit par oublier les quatre garçons dans le vent et par trouver un court moment quelques similitudes avec "Endless nameless" de Nirvana (1991 - Nevermind). Avec "Brenup Butter", les Melvins font à nouveau parler la poudre. Effort poursuivi sur la reprise de "Graveyard" de Butthole Surfers (1987 - Locust abortion technician). Le nouveau chapitre de la formation américaine se ferme. Les Melvins sont toujours colossaux. Leur univers agite les fantômes du passé et ne perd pas un grain de ténèbres.

Publié dans le Mag #33

(The) Melvins / Chronique LP > A walk with love & death

the Melvins 2017 Presque un an jour pour jour après la sortie de Basses loaded, les Melvins sortent un double album : A walk with love & death. Le duo Buzz Osborne/Dale Crover se renforce pour l'occasion par la présence du bassiste Steven Shane McDonald (Redd Kross). Le premier volume nommé Death voit l'invitation de Joey Santiago (Pixies), Anna Waronker (That Dog) et de Teri Gender Bender (Crystal Fairy, Le Bucherettes). Conçu pour être la BO d'un film de Jesse Nieminen, la seconde partie se titre Love. En plus de Joey Santiago et Anna Waronker, c'est Tom Hazelmyer (Halo of Flies) qui rejoint les rangs. Le tout produit par Toshi Kasai sous la houlette du label Ipecac (Mondo Generator, Palms, The Young Gods). De quoi faire rêver sur le papier.

"Black heat" et ses 6'41 ouvre Death sur une ambiance brumeuse. Les Melvins bien décidés à ne pas faire dans la demi-mesure nous jettent illico dans les limbes. Le tempo est bas, la voix éloignée et le bad trip est en approche. C'est magnifiquement fait : du pur jus noir Melvins ! Si l'atmosphère est toujours aussi poisseuse sur "Sober-delic (acid only)", la guitare de Buzz Osborne fait quelques merveilles en terme de mélodies. "Euthanasia" prend des allures théâtrales sur la voix du chanteur et termine dans le chaos des grincements de guitare. La dynamique de "What's wrong with you" plus lumineuse (autant que c'est possible pour les Melvins) permet de reprendre son souffle. La respiration n'est que de courte durée. Le climat s'alourdit quand à l'horizon se dessine "Flaming creature" prêt à hanter quelques unes de nos nuits. Death est un disque qui va comme un gant à la formation américaine. Il n'est pas rapide mais sombre à souhait. Un peu comme la mort...

Love est-il l'opposition parfaite ? Un câlin tout droit venu des années hippies ? Un message depuis le monde des bisounours ? Le visionnage du trailer du film de Jesse Nieminen est fait pour convaincre du contraire. Sur le premier disque, tous les éléments étaient présents pour plonger dans la noirceur. Love est profilé a priori comme une partie suintant d'un univers bien barré aux tendances glauques. Des dialogues sont bien souvent utilisés en fond pour créer une base d'ambiance qui mène parfois au bord de l'angoisse ("Queen powder party") ou de la folie ("Street level St Paul"). Les grognements et autres sons electro de "Chicken butt" nous mènent dans les couloirs d'un asile dont on ne sortira visiblement plus. Difficile de garder le nord tant l'univers se fait malsain voir suffocant. L'oeuvre tient de la performance et ce n'est pas la plus lisible pour l'auditeur.

A walk with love & death est comme annoncé un double disque. Love qui n'a rien d'une guimauve est une expérience perturbante et digne des Melvins. Death est un classique qui représente sans nul doute la meilleure partie de ce double album. Pour reprendre les mots de Dale Crover : "A walk with love and death est un monumental, sombre, morose, psychotique voyage mental ! Pas pour les âmes sensibles. Vous allez dormir la lumière allumée après l'avoir écouté".

Publié dans le Mag #30

(The) Melvins / Chronique LP > Basses loaded

(The) Melvins - Basses loaded Dans sa jeunesse, Kurt Cobain apprend à jouer de la guitare grâce à un copain d'Aberdeen : Buzz « King Buzzo » Osborne. Avec un batteur du nom de Dale Crover, ce dernier forme les Melvins. Trop nerveux pour se lancer avec eux, le blondinet passe son tour et préfère jouer les roadies en attendant de créer Nirvana avec Krist Novoselic. Intiment liés, les Melvins donnent des coups de main à cette nouvelle formation. Dale Crover joue les batteurs quand cela est nécessaire et assure même quelques tournées. Quand à Buzz Osbourne, il cherche un nouveau batteur pour Nirvana et le trouve en la personne de Dave Grohl (ex-Nirvana, Foo Fighters). Quand dans les années 90, Nirvana fait trembler la terre entière avec Nevermind, un appel d'air vers les artistes de Seattle se fait. La star du grunge se noie dans le succès et l'héroïne mais n'en n'oublie pas les copains. C'est ainsi qu'à cette période les projecteurs se tournent vers les Melvins. Leur album Houdini est alors signé chez Atlantic Records et Kurt Cobain assure la production de la moitié des pistes. Dans le temps, les Melvins révèlent - à raison de un ou deux albums par an - une véritable force de création.

Deuxième de l'année 2016, Basses loaded a pour particularité de faire intervenir une myriade de bassistes : Steven McDonald (Redd Kross), Jared Warren (Big Business), Trevor Dunn (Mr. Bungle), Krist Novoselic (ex-Nirvana), Jeff Pinkus (The Butthole Surfers) et Dale Crover habituellement derrière les fûts des Melvins. Autrement dit, une belle brochette prête à en découdre...

Le moins qu'on puisse dire, c'est que Basses loaded démarre très fort. Après quelques accords dissonants qui pourraient être empruntés à Sonic Youth, "The decay of lying" - meilleur titre de l'album à mon humble avis - renvoie quelque chose d'extrêmement théâtrale. Comme si le groupe, du haut d'un sommet chantait un air qui domine le monde. Le tout s'agrémente d'une structure blues arrangée à la sauce underground puisée dans les rues d'Aberdeen. Il ne faut pas longtemps pour que je chante le refrain : "We were like heroes of the world, We died before we filled them, There was no screaming, only sleeping, To wear us down". Le titre passe en boucle...Assez lente, "Beer hippie" contient les mêmes propriétés et fait écho au premier titre de l'album.

Dans un registre Rock'roll, "I want to tell you" est très entraînante et dévoile une ambiance plus positive. L'instant d'après les Melvins se jettent bien volontiers dans un métal déchaîné. La tempête passe et le calme revient avec "Planet distructo". Dans un premier temps, le morceau s'inscrit dans un rock aérien. A la 3ème minute, tout bascule ; la basse de Trevor Dunn prend les devants pour s'imposer sur près de deux minutes de jazz ! La pause est terminée et la formation américaine repart pied au plancher. Ces allers et venues dans le rythme global de l'album sont les bienvenus. Comment contraster plus ? La réponse est dans "Maybe I am amused" et dans "Take me out to the ballgame". La première - dans laquelle joue Krist Novoselic - est un rock on ne peut plus folk qui se trimbale son petit accordéon. Quand au morceau de la fin...C'est une chanson de Noël chantée en chœur par des pirates. Tout simplement ! Et franchement, ce petit brin de déconnade fait du bien.

Avec Basses loaded, le groupe montre qu'il est - après plus de trente années de carrière - capable de nous surprendre en apportant mille contrastes en un seul album. Toujours bien entourés, les Melvins ont ce génie de changer d'univers comme de chemise tout en restant fidèles à eux-même. Messieurs, Salutations bien basses.

(The) Melvins / Chronique LP > Tres cabrones

Melvins - Tres cabrones Après quelques albums passablement moyens (en tous cas pour eux) (re)voici les Melvins déjà de retour avec un LP qui, à défaut de surprendre, fait vraiment plaisir à entendre. Welcome Mike Dillard à la batterie (membre fondateur du groupe qu'il a quitté en 1984) Dale Crover se chargeant de la basse... Une formation old-school qui leur a manifestement permis de reprendre du poil de la bête.

Là où l'album fait clairement mouche, c'est dans la variété des styles abordés avec toujours cette mixture de sludge, de "classic rock" et d'éléments plus expérimentaux, mais aussi de par la qualité du songwriting, qui tient la dragée haute tout le long de Tres cabrones. Avec "Doctor Mule", le premier titre, les Melvins n'entament pas le disque de la manière la plus percutante qui soit mais la qualité du riff qui s'imprègne rapidement dans la caboche jusqu'à séduire l'auditeur le plus blasé. La deuxième piste, "City dump" est là aussi du Melvins tout craché : le titre s'avère, au fil des écoutes, bien jouissif, tandis que qu'"American cow" dévoile là encore tout le savoir-faire du groupe quand il s'agit de composer des morceaux heavy tout en apesanteur. "Tie my pecker to a tree" est de son côté plus une interlude fun qu'un véritable morceau et rappelle les génériques de certains dessins animés. Plutôt drôle à défaut d'être marquant.
On enchaîne, d'autant que les hostilités reprennent de plus belle avec "Dogs and cattle prods", l'une des grosses réussites de Tres cabrones. Soit une piste de plus de huit minutes qui démarre en mode classic hard-rock, on s'attend à un "partage en testi-couilles" comme (The) Melvins en ont le secret mais de manière très surprenante, le titre s'adoucit pour devenir quasiment folk-pop. Excellent de chez excellent. Surtout qu'après quelques morceaux honnêtes et une autre intermède cartoonesque, débarque là aussi l'une des grosses claques de Tres cabrones, "I told you I was crazy", une chanson qui épate par son minimalisme bluffant, un gimmick de clavier et la voix de Buzz qui plane au dessus, pour ensuite évoluer et faire du Melvins pur jus.

Bref, on vous l'a déjà dit, rien de surprenant mais un album qui cumule bien des atouts et devrait passer quelques mois sur votre platine en attendant la prochaine livraison. On n'en attendait pas moins de ce groupe culte de chez culte. Et particulièrement prolifique avec ça, ce qui ne gâche rien.

(The) Melvins / Chronique LP > Everybody loves sausages

The Melvins - Everybody loves sausages Après quelques albums mi-figue mi-raisin et une tournée récente (avec les The Melvins Lite...) qui nous laissait passablement sur notre faim, (The) Melvins semblaient avoir perdu le petit quelque-chose qui les rendait à nouveau sur-excitants depuis quelques disques. Et finalement, quoi de mieux qu'un album de reprises avec un nom à la con et plein de potes prestigieux (Scott Kelly de Neurosis, Mark Arm de Mudhoney, Jello Biafra des Dead Kennedys... ) au casting pour redorer un karma qui n'a, de toutes les façons, pas vraiment besoin de l'être.

Dès le premier titre, une reprise de Venom avec Scott Kelly de Neurosis au chant : on retrouve le panache des (The) Melvins sur un titre percutant et heavy. La seconde piste, une cover de Queen, s'avère excellente et emballe de suite l'auditeur pour peu que l'on soit adepte du second degré si cher à ce groupe atypique. Le troisième titre est déjà connu de nos services puisqu'il était apparu sur un split avec le Jon Spencer Blues Explosion édité par le célèbre label noise Amphetamine Reptile (Helmet, Chokebore, Today Is The Day tout ça...). Toujours excellent d'ailleurs, un morceau que le groupe s'est passablement bien approprié, faisant quasiment oublié le coté ringardos d'une chanson popularisée par Ram Jam dans les années 90, oui oui, à l'époque où tu écoutais Fun Radio. Même verdict pour le "Set it on fire" de The Scientists avec Mark Arm des géniaux Mudhoney au chant, ou la reprise de Roxy Music avec un Jello Biafra totalement méconnaissable en mode crooner dézingué. Finalement, il sera bien difficile de résister à une tracklist aussi savamment dosée et à un choix de reprises parfaitement équilibré entre morceaux connus et titres plus obscurs, titres plus directs et morceaux plus expérimentaux. La dernière doublette "Art school" de The Jam et "Heathen earth" de Throbbing Gristle le démontre encore une dernière fois : (The) Melvins pulvérisent donc joliment le scepticisme qui nous habitait au départ.

Et il faut lire les notes de Buzz à l'intérieur du livret quant aux choix des morceaux, c'est souvent assez drôle. Exemple pour Venom : "We all love Venom, Rumor has it that these guys are all yoga instructors now". Haha.

(The) Melvins / Chronique LP > Freak puke

The Melvins - Freak puke Freak puke, un titre en forme de punchline et une sortie chez le décidément incontournable Ipecac (comme quelques-uns de ses prédécesseurs déjà), pour The Melvins en mode "Lite" et donc au casting resserré sur son expression la plus intime et personnelle. Exit le Big Business venu jouer les renforts de luxe depuis quelques temps, l'album est ici l'oeuvre d'un trio. Et majuscule s'il vous plaît. Soit Buzz Osbourne + Dale Crover + Trevor Dunn, voilà, le genre de line-up qui a méchamment de la gueule, auquel on pourrait presque ajouter un quatrième larron en la personne d'une contrebasse... "personnage" intégrant de ce dix-septième album de l'un des groupes les plus cultes de la scène rock nord-américaine des trente dernières années.

Laquelle contrebasse fait une entrée remarquée en ouvrant l'album sur une profondeur de champ assez vertigineuse, à tel point que l'on se demande au bout de quelques secondes si justement l'ensemble ne va pas sauter à la figure de l'auditeur. Comme une menace presque sous-jacente, elle instille le doute, un début d'effroi que la suite va effacer rapidement pour laisser place à un rock fougueusement jazzy, mâtiné de blues cramoisi et d'un feeling incandescent. "Mr. Rip Off" est de fait l'une des plus belles et fascinantes introduction d'albums entendues depuis un bon bout de temps. Envoûtante et ténébreuse... ouvrant ainsi la voie à une suite qui s'engouffre dans la brèche créative ainsi inaugurée. La paire "Inner ear rupture" / "Baby, won't you weird me out" garde cette griffe mélangeant tour à tour musique contemporaine, rock indé expérimental, jazz/blues abrasif et esprit punk libertaire aux expérimentations fugitives que ne renierait certainement pas Fantômas. Brillant.

Pratiquant l'hybridation rock au sens très large comme d'autres pondent tous les deux ans des albums ultra-calibrés pour surtout ne pas surprendre, les Melvins sont ici en roue-libre. Faisant absolument tout ce qu'ils veulent au gré de leurs délires et inspirations, comme à leur habitude, sauf que cette fois peut-être (sans doute...) encore plus, laissant ainsi libre cours à un "Worm from Waltz" se permettant des ruptures de rythme parfois impromptues mais dans le même temps outrageusement jouissives, avant que "A growing disgust" ou "Leon vs. the revolution" ne reviennent à des fondamentaux plus rock dans le plus pur sens du terme. Mais, toujours insaisissable, le trio ne semble décidément pas pouvoir s'empêcher d'explorer les horizons (free)jazz qui le titillent sur "Holy barbarian" avant de livrer un éponyme, taillé pour enflammer les live, de s'amuser avec une reprise de Paul McCartney, "Let me roll it" (pourquoi pas ?) et de conclure ses électriques et fougueux ébats, toujours en iconoclastes du rock moderne, sur un "Tommy goes beserk" aussi fougueux que bouillonnant. Ou la preuve que l'on peut avoir trente ans de carrière, une grosse quinzaine d'albums au compteur et avoir toujours des choses à dire sans tricher. Et on ne triche pas (avec) chez les Melvins. Que cela soit dit.

(The) Melvins / Chronique LP > The bride screamed murder

Melvins - The bride screamed murder Ces mecs sont incroyables. Ils sortent des disques avec une régularité proprement ahurissante, mettent tout le monde dans leur poche, influencent toute une génération de musiciens et mélomanes, collaborent avec la crème de ce qu'il se fait depuis vingt ans et tout ça, sans trop avoir l'air de forcer. Et même si la critique (hexagonale notamment) leur passe un peu tout, les Melvins, puisque c'est d'eux dont il s'agit, ont quand même empilé depuis près de trois décennies ans une étonnante quantité de (très) bons disques. On pense notamment aux incontournables Houdini, Stoner witch ou plus récemment A senile animal pour n'en citer que trois... Mais même quand ils pondent un disque mineur, comme leur dernier méfait en date avant ce The bride screamed murder, en l'occurrence Nude with boots, le résultat reste tout de même plus qu'honorable. Jamais médiocres, souvent brillants, les Melvins ont pourtant un défaut majeur, celui de ne pas toujours parvenir au niveau de génie dont on les sait capables... qui de fait rend toujours plus exigent l'auditeur désireux de ne pas céder au cliché du fan transi qui a perdu tout sens critique.

Assez logiquement, la question qui brûle donc les lèvres au moment de déposer ce nouvel album dans le lecteur est de savoir à quel niveau va évoluer le groupe tout au long des neuf pièces que compte The bride who screamed murder. Etape 1 : on s'envoie d'abord une monstrueuse intro pour "The water glass" dans les écoutilles, avec une seconde partie bien casse-gueule. Etape 2 : on enchaîne avec un "Evil new war God" fougueusement électrisant. Etape 3 : on obtient la réponse : le Melvins cuvée 2010 va se situer dans la rangée des très bons disques du gang de Montesano, malgré un final raté (mais on y revient plus tard). Pour le moment, le groupe se lâche. D'entrée de jeu, le riff alerte, cinglant comme jamais, surtout qu'il nous arrive dans les tuyaux par pack de douze, King Buzzo est au sommet de sa forme (c'est tout dire...) et les Californiens envoient le gros bois dans les enceintes histoire de démontrer une fois pour toute qu'après 30 ans de carrière, ils n'ont peut-être pas les coups de génie d'Houdini, mais n'ont rien perdu de leur fougue juvénile. Et pour confirmer cette impression naissante, le groupe se fend d'un excellent et bien furieux "Pig house" avant d'être à la limite de la sortie de route sur "I'll finish you off" : joyeusement bordélique, complètement décousu et finalement à deux doigts du crash électrique. Dans le genre, c'est bien là le genre de morceau qui passe... ou casse... Bon ici ça passe. Normal, ce sont les Melvins qui exécutent la sentence. Et comme en plus derrière, ça enfile les titres comme des perles... Au choix un "Electric flower", qui épouse élégamment les contours d'un rock heavy habité par l'esprit créatif et un peu barré (ok complètement barré alors) de ses glorieux géniteurs ; ou alors un "Hospital up", petite pépite branchée stoner à la coolitude assumée, armée d'un groove imparable et d'un final free-jazz bien allumé. La classe en sommes. Et pour poursuivre dans la même veine, les Melvins assènent alors un "Inhumanity and death" en mode rock punky décadent bien comme il faut avant de louper un peu leur sortie sur une dernière paire de titres qui ne fonctionnent qu'à moitié ("My generation", "P.g x3 "). A force de tout tenter, même eux peuvent passer à côté d'un sujet. Pour le reste, c'est simple, inventif et efficace, bref ça frise la mention très bien.

(The) Melvins / Chronique DVD > Live from London

The Fantômas Melvins Big Band - Live from London "IL" est là..., le fantasme absolu de bon nombres d'adepte du genre, de tout un pan de la musique dite indépendante et expérimentale qui s'offre une collaboration de très grande classe pour un show phénoménal à la mise en scène étudiée. The Fantômas Melvins Big Band, autrement dit Fantômas vs (The) Melvins sur une même scène, dans un set aux ambiances narcotiques, formant une véritable bulle temporelle dans laquelle s'accouple sans hésitation, délires punk, pattoneries démentes et "drum battles" fulgurantes. Un Mike Patton complètement habité par le rôle, un King Buzzo Osborne en pantalon de pyjama (si si) et toujours son inimitable champignon atomique qui lui sert de coupe de cheveux et une belle brochettes de musiciens plus qu'accomplis : le casting est ici quasi hors norme avec notamment un Dave Lombardo (Slayer, Grip Inc.) des grands soirs. Elucubrations électriques, un duo de batteurs qui s'éclatent derrière les fûts, trouvailles sonores en tous genre, les zikos se lâchent et comme attendu, font montre d'une virtuosité technique absolument implacable. Pas besoin d'être un mordu des deux groupes pour apprécier, le mélomane lambda sera de toutes les façons scotché une fois passés les premiers réglages.
Derrière ses consoles ou son micro, Patton, qui cannibalise un peu tous les regards, assure pendant que derrière, les décibels s'entrechoquent dans des éclats punk aux tendances hardcore. Les autres musiciens étant très statiques, on sent qu'il y a la clairement une volonté de jouer sur cette dualité entre, Mike Patton, véritable showman averti et les autres, plus en retraits, semblent complètement pris dans leur performance. The Fantômas Melvins Big Band, c'est évidemment un "truc" à part, d'autant que le DVD accentue cette impression par un montage (et quelques ralentis très réussis) qui ajoute au psychédélisme de l'ensemble. Maelström musical, joyeux boxon sonore qui part dans tous les sens, porté par un chanteur aux possibilités vocales quasiment illimitées et un potentiel d'ensemble absolument hors norme, ce DVD se révèle rapidement indispensable pour tout bon amateur de musique un peu barrée qui se respecte.

(The) Melvins / Chronique LP > Nude with boots

the melvins : nude with boots The Melvins. Quelques syllabes et un patronyme culte qui raisonne comme la promesse d'un disque excellent à venir pour le fan inconditionnel du groupe de Seattle. Le duo (désormais quatuor) a su en effet aligner les albums de qualité avec une constance métronomique et, aura culte oblige, la sortie d'un album des Melvins est toujours un événement. D'autant plus qu'ils nous avaient laissé un excellent souvenir avec un (A) senile animal de haute volée complètement barge et fracassé : c'est revigoré qu'ils nous sont apparus de cette collaboration avec les Big Business. D'autant plus (bis) que Buzz Ozborne lui-même dit de ce nouvel album qu'il figure parmi ses cinq albums favoris des Melvins. C'est qu'il sait trouver les mots qui convient pour appâter le chaland le père Buzz.
Qu'est ce que l'on attend d'un album des The Melvins ? les vocalises hallucinées et possédées ainsi que les riffs cinglants made in King Buzzo, une section rythmique au groove pachydermique et à la précision infaillible, une bonne dose d'heavy rock'n'roll et des expérimentations "melvinesque" mais surtout ce que l'on attend des Melvins qu'ils ne se répètent pas : une remise en question qu'ils ont su appliquer avec une certaine variabilité dans leur carrière. Et bien bonne nouvelle, ce n'est pas avec Nude with boots que les quadragénaires les plus cool du rock underground vont nous décevoir. Les Melvins ont gardé la même formation d'(A) senile animal mais curieusement, cette option ne va pas se ressentir dans cet album qui va demeurer plus traditionnel dans le sens "Melvinsien" du terme : exit l'euphorie de la collaboration, place à la sagesse de musiciens expérimentés. Les Melvins étalent donc leur maestria du rock heavy déjanté sur 11 titres qui démontrent cette capacité du groupe à être sur plusieurs fronts à la fois : brûlots rock'n'roll heavy rock qui perpétue le savoir-faire des Melvins en la matière ("Billy fish", "The smiling cobra") et des titres où ils prennent un malin plaisir/un soin particulier à étaler et installer les ambiances (le dantesque "Dog island"). Pas de changement notable à signaler sur le fond donc, c'est véritablement du Melvins comme on l'aime : une ode constante à des racines 70's (une référence à un grand groupe anglais est dissimulé...à vous de trouver). C'est plutôt sur la forme et du coté de la production qu'il faut aller voir une évolution marquante par rapport à (A) senile animal : elle s'avère tout simplement moins clinquante et plus "roots", les guitares se font moins tranchantes et incisives, la voix du grand manitou paraît un poil plus en retrait. On pourrait traduire cela par une possible volonté du groupe de délaisser ces artifices pour remettre la qualité des morceaux au centre des attentions. Un pari plus que réussi.
Au final, si on fait abstraction de la béatitude systématique qu'attire ce groupe à chaque sortie, les Melvins nous livre avec Nude with boots un album d'un très bon cru mais qui souffre un peu de la comparaison avec leur précédent effort. Ici, la folie exacerbée d'(A) senile animal semble atténuée mais laisse la place à une musique plus réfléchie (presque raisonnable) et collant probablement peut-être plus avec les aspirations de ces musiciens à la longévité exemplaire. Toutefois, il est difficile de ne pas penser que les Melvins semblent un peu prisonniers de la cage dorée qu'ils se sont eux même fabriqués. Les uns pesteront contre cet album parce que les changements d'un disque à un autre sont mineurs et les Melvins nous servent "encore" du Melvins tout craché (et font du neuf avec du vieux par la même occasion). Les autres se réjouiront d'un album d'une très bonne facture et se diront que de toute façon, les Melvins nous abreuvent de cet effet de surprise lors de leurs excursions avec des musiciens divers (notamment avec l'ex-Dead Kennedys Jello Biafra). Et ils auront peut-être raison !