Presque un an jour pour jour après la sortie de Basses loaded, les Melvins sortent un double album : A walk with love & death. Le duo Buzz Osborne/Dale Crover se renforce pour l'occasion par la présence du bassiste Steven Shane McDonald (Redd Kross). Le premier volume nommé Death voit l'invitation de Joey Santiago (Pixies), Anna Waronker (That Dog) et de Teri Gender Bender (Crystal Fairy, Le Bucherettes). Conçu pour être la BO d'un film de Jesse Nieminen, la seconde partie se titre Love. En plus de Joey Santiago et Anna Waronker, c'est Tom Hazelmyer (Halo of Flies) qui rejoint les rangs. Le tout produit par Toshi Kasai sous la houlette du label Ipecac (Mondo Generator, Palms, The Young Gods). De quoi faire rêver sur le papier.
"Black heat" et ses 6'41 ouvre Death sur une ambiance brumeuse. Les Melvins bien décidés à ne pas faire dans la demi-mesure nous jettent illico dans les limbes. Le tempo est bas, la voix éloignée et le bad trip est en approche. C'est magnifiquement fait : du pur jus noir Melvins ! Si l'atmosphère est toujours aussi poisseuse sur "Sober-delic (acid only)", la guitare de Buzz Osborne fait quelques merveilles en terme de mélodies. "Euthanasia" prend des allures théâtrales sur la voix du chanteur et termine dans le chaos des grincements de guitare. La dynamique de "What's wrong with you" plus lumineuse (autant que c'est possible pour les Melvins) permet de reprendre son souffle. La respiration n'est que de courte durée. Le climat s'alourdit quand à l'horizon se dessine "Flaming creature" prêt à hanter quelques unes de nos nuits. Death est un disque qui va comme un gant à la formation américaine. Il n'est pas rapide mais sombre à souhait. Un peu comme la mort...
Love est-il l'opposition parfaite ? Un câlin tout droit venu des années hippies ? Un message depuis le monde des bisounours ? Le visionnage du trailer du film de Jesse Nieminen est fait pour convaincre du contraire. Sur le premier disque, tous les éléments étaient présents pour plonger dans la noirceur. Love est profilé a priori comme une partie suintant d'un univers bien barré aux tendances glauques. Des dialogues sont bien souvent utilisés en fond pour créer une base d'ambiance qui mène parfois au bord de l'angoisse ("Queen powder party") ou de la folie ("Street level St Paul"). Les grognements et autres sons electro de "Chicken butt" nous mènent dans les couloirs d'un asile dont on ne sortira visiblement plus. Difficile de garder le nord tant l'univers se fait malsain voir suffocant. L'oeuvre tient de la performance et ce n'est pas la plus lisible pour l'auditeur.
A walk with love & death est comme annoncé un double disque. Love qui n'a rien d'une guimauve est une expérience perturbante et digne des Melvins. Death est un classique qui représente sans nul doute la meilleure partie de ce double album. Pour reprendre les mots de Dale Crover : "A walk with love and death est un monumental, sombre, morose, psychotique voyage mental ! Pas pour les âmes sensibles. Vous allez dormir la lumière allumée après l'avoir écouté".
Publié dans le Mag #30