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Leader de The Third Eye Fondation, entité trip-hop/drum'n'bass/électronique de référence originaire de la prolifique scène de Bristol (Portishead, Massive Attack...) avec laquelle il a connu un certains succès (notamment par le biais d'une poignée d'albums sortis chez Domino Records), Matt Elliott sort aussi, depuis une dizaine d'années, des disques solo dans lesquels il explore ses aspirations (dark)folk poétique et enivrante. The mass we made paraît ainsi en 2003 chez Merge Records avant que l'anglais ne rejoigne le label français Ici d'ailleurs avec lequel il entame alors une collaboration aboutissant aux sorties des albums Drinking songs (2005), Failing songs (2006), Howling songs (2008), Failed songs (2009), The dark (2010) et The broken man (2012).

Matt Elliott / Chronique LP > The end of days

Matt Elliott-The end of days Matt Elliott sort du brouillard de Farewell to all we know pour nous annoncer The end of days. Pas franchement de quoi se réjouir... Déjà que sa folk lo-fi n'est pas marquée par le sceau de la gaieté en temps normal, là, on sait qu'on s'embarque dans un EP à l'option tristitude toujours aussi assumée. Et alors que d'habitude, je trouvais très beau ces morceaux de mélancolie, la majeure partie des titres de cette nouvelle production ne trouve pas grâce à mes oreilles. La faute au saxophone qui vient remplacer la guitare sur de très (trop pour moi) nombreux passages, si cet instrument porte beaucoup de tristesse en lui et sert évidemment le propos, son omniprésence m'éloigne du Matt Elliott que j'apprécie. Quand le saxo ne se pointe que pour renforcer les idées ("The end of days") ou reste au placard ("Healing a wound will often begin with a bruise"), je me retrouve au chaud avec une douce guitare (la voix de Matt se cache bien trop souvent aussi à mon goût). Avec des pistes assez longues, très instrumentales et marquées par la présence du saxophone, The end of days n'a rien de réjouissant, c'était annoncé, c'est assumé. N'en reste que cette expérience est une déception personnelle, je vais retourner dans le brouillard.

Publié dans le Mag #55

Matt Elliott / Chronique LP > Farewell to all we know

Matt Eliott - Farewell to all we know Forcément, le chroniqueur écrit en fonction de ce qui l'entoure, il n'est pas insensible (sinon, quel intérêt de parler de musique ?) et la situation de ce printemps fait que le coronavirus va contaminer tous nos articles. C'est un fait. Pour autant, dans la plupart des cas, ce sera insidieux, asymptomatique diraient les spécialistes, mais parfois, ce sera évident. Pour Matt Elliott, ça va être plus que ça... il faut dire que notre voisin anglais le cherche... Il a intitulé son énième album solo "Adieu à ceux qu'on connaît" (Farewell to all we know) et c'est à peu près ce qu'on a tous fait en se cloisonnant courant mars... A peu près tous car Outre-Manche, ils préfèrent sacrifier une partie de la population plutôt que l'économie... pendant un temps.

Ensuite, il place un homme au centre de son artwork, logique, l'humain prévaut ces temps-ci et c'est pas plus mal... Par contre, le mec est en plein brouillard et semble un peu perdu, c'est exactement où nous en sommes. Au milieu d'un nulle part jamais expérimenté sans savoir vraiment où on va et si on s'en sortira tous... Enfin, et c'est là le principal, le leader de The Third Eye Fondation est évidemment un des défenseurs de la slow life ! Profiter de tous les instants au ralenti, apprécier des choses simples, revenir à l'essentiel et ne pas courir dans tous les sens, acheter, consommer, jeter comme des porcs... Bon, là, ok, on a quelques spécimens en France qui se comportent comme des gros gros porcs en ces temps de crise et qui n'ont pas conscience de ce que sont les mots "respect" ou "civisme", ceux-là n'écoutent pas Matt Eliott, d'ailleurs, ils n'écoutent personne, seul leur petit ego compte. Rien à voir avec l'univers musical qui nous englobe durant cette dizaine de titres où chant et guitare acoustique nous promènent en douceur dans un pays ouaté où le temps n'a plus d'importance. Pour moi, ce genre de musique très reposante, c'est celle du dimanche matin, celle qu'on écoute bien au chaud, ça tombe bien, il fait bon et en ce moment, c'est dimanche tous les jours.

Publié dans le Mag #42

Matt Elliott / Chronique LP > The broken man

Matt Eliott - The broken man Loin des univers électroniques de Third Eye Foundation sous lequels on le connait depuis pas mal d'années, Matt Elliott poursuit ici sa carrière solo parallèle avec un nouvel album intitulé The broken man.

Tout en élégance, sa guitare acoustique ouvre le bal sous un petit air de Flamenco ("Oh how we fell"), couverte d'arpège et d'une accélération digne des grands noms du genre. C'est alors que l'harmonie d'une cloche en fond et d'une deuxième guitare répondant à la première apparait et densifie cette intro toute en beauté. Puis la voix de Matt entre en scène pour nous subjuguer de sa pureté. Tout le long de ces onze première minutes on apprécie le songwriting tout en finesse et simplicité. On pourrait imaginer parfaitement cette première piste chantée lors d'une éloge funèbre dans une petite bourgade hispanique, tant la tristesse qui se dégage de celle-ci vient happer l'auditeur avec ce chant rocailleux en forme de poème hanté. On pense parfois Bill Callahan (Smog) tout en se laissant transporter par sa classe et la mélancolie qu'il dégage.

La suite avec notamment "Dust flesh and bones" n'est pas la pour contredire cette impression, apportant au passage une ligne vocale entêtante plongée sous des paroles sombres : "This is how it feels to be alone. Just like we'll die alone". On imagine alors ici Matt crachant toute sa douleur et sa tristesse. Les arrangements de cette chanson sont parfaits, des violons et une voix lyrique en fond viennent appuyer ce sentiment de malaise que semble être la vie selon le songwriter anglais. Sous forme de léger crescendo cette chanson nous emmène loin dans la déprime la plus belle et la plus pure (si tant est qu'une déprime puisse l'être). Et malgré l'arrivée du piano, remplaçant la guitare sèche pour "If anyone tells me", l'ambiance reste la même, une impression de noyade perpétuelle dans des eaux sombres nous immergeant dans les abîmes de la solitude. Les mots sont grands mais l'impression y est, cette voix juste accompagnée de ce piano naviguant ainsi quelques treize minutes durant nous laissant face à une sensation de néant assez contagieuse.

The broken man se termine dans un élan d'espoir avec ce "This is for" aux sonorités hispanisantes puis "The pain yet to come" et son chant retrouvant une lueur de lumière qu'il n'avait pas vu depuis longtemps. A la fin de ces sept pistes, on sort différent, plus mélancolique sûrement, cassé comme le dit le titre de l'album ? Peut-être.