Après trois EPs gorgés d'idées complètement déglingo délivrés ces dernières années, il était temps pour nos deux zigotos lillois préférés de nous faire subir un traumatisme musical supplémentaire, mais en long format cette fois-ci (à peine plus d'une demi-heure) puisque Margaret Catcher nous a fait l'honneur d'offrir dès les premières semaines de 2017 un premier album intitulé Singularity. Ce titre s'impose comme une évidence si tu as déjà eu le bonheur (ou le malheur, c'est selon) de tendre l'oreille sur le "rock augmenté" de Pierre Level (batteur) et Xavier Leloux (bassiste et chanteur). Un rock dans lequel instruments, synthés, pédales, pads, effets, machines électroniques font bon ménage, car pour pouvoir servir cette bouillabaisse de styles mêlant electronica, math-rock, ambiances de musiques de film 80's ou disco, pour ne citer qu'eux, il faut bien à un moment donné sortir l'outillage nécessaire.
Dès le début du disque, avec "Not too bad", on retrouve déjà cette propension retro-futuriste et l'envie de plonger l'auditeur dans la confusion. Singularity a l'avantage, par le temps qu'il lui est donné, de montrer l'ensemble des capacités étonnante de ses géniteurs à évoluer dans son milieu hybride et de montrer aussi sa véritable identité. Car on se rend compte après plusieurs écoutes que Margaret Catcher "catche" beaucoup plus facilement qu'avant et semble presque moins jusqu'au-boutiste que des formations dont il semble s'inspirer comme Battles, Squarepusher, Prefuse 73 ou Deerhoof. Tout ceci étant subjectif, me direz-vous, mais quand un titre comme l'excellent "New transe" (dont certaines sonorités font penser à AIR) surgit, on se demande si finalement ce n'est pas lui, l'OVNI de cet opus. Car les Lillois savent aussi composer des morceaux pas trop alambiqués, que cela soit dit.
Singularity démontre aussi et surtout le talent du duo à naviguer dans ses propres eaux, à se rendre hors norme en proposant, par exemple, une décontraction musculaire auditive sur la récréative "Zouki zouki", disco-mambo indescriptible qui s'insère entre deux interludes electro-ambiant, ou en soumettant une version acoustique très originale de "TER", titre que l'on retrouve sur l'EP du même nom sorti il y a un an et demi. Et Margaret Catcher c'est aussi, et ne l'oublions pas, du rock foutraque et puissant guidé par une basse au pouvoir destructeur ("Emergency", "Singularity") qui sait admirablement s'adapter aux moindres interstices sonores apparaissant dans ce maelstrom d'envies artistiques des Lillois. Si vous voulez découvrir Margaret Catcher, commencez donc par vous jeter sur cet LP à la fois mystérieux et orgastique.
Margaret Catcher
Interview : Margaret Catcher, InterviOU : Margaret Catcher (juin 2017)
Margaret Catcher / Chronique LP > Singularity
Margaret Catcher / Chronique EP > TER
Margaret Catcher a publié sur le net début juillet, via le label Atypeek Music, un single intitulé "Zouki zouki". Un vrai tube de l'été labyrinthique, comme leur précédent EP d'ailleurs. Ce dernier nommé TER, sorti pas mal de mois avant, se présente en deux sections : le titre éponyme et ses 2 parties d'un côté, et une version revisitée par Jane Bug + un remix de NUMéROBé de l'autre. Autrement dit, en terme d'unité de style, faudra repasser car c'est la grosse fête du slip ! Le duo formé par le batteur Pierre Level et le bassiste Xavier Leloux se fait le chantre d'une totale liberté d'expression sans omettre d'y ajouter de la musicalité. Rock augmenté d'électro avec un clin d'œil au 8-bit, de vieux synthés, de saturation ronflante, de paroles incompréhensibles... Un voyage comme ceux qu'on peut avoir en TER, un peu de tension, de chaleur, d'angoisse, de relâchement aussi, avec cette version synth-pop minimaliste de Jane Bug, ou quelque chose de plus introspectif avec l'excellent remix de leur collègue de JFX Lab. Un EP recommandable qui a bénéficié d'un clip épileptique à base de fond vert, d'extraits de film et d'effets spéciaux qui font mal aux yeux. A leur image, quoi !
Margaret Catcher / Chronique EP > Transhuman fever
La comparaison avec Pryapisme aurait pu être toute trouvée : un patronyme et des titres de chansons qui font sourire, un Dieu à tête de chat présent sur la pochette, une musique rock complètement barrée qui convoque le 8 bits sur un morceau de 7 minutes ("Samo raye"). Et pourtant, Margaret Catcher est loin de l'avant-gardisme maladif des Clermontois, pas tout à fait les mêmes références musicales et puis un effectif plus amoindrie : ces musiciens ne sont "que" deux. Pierre (batterie et pads) et Xavier (basse-synthés et chant robotique) oeuvrent depuis 2011 au sein de ce groupe qui allie un rock technique s'entourant de technologies diverses (vocodeurs, capteurs sensoriels, pads et pédales d'effets). Une nébuleuse sonore appelé "rock augmenté" dont on sort difficilement indemne, comme toujours avec les disques caustiques qui se veulent innovant. Et c'est d'autant plus une surprise que cet EP est sorti chez JFX Lab, un label digital plus habitué à sortir de l'électro ou du hip-hop de son fourneau que du rock expérimental dont les influences sont à chercher du côté de Squarepusher, Jagga Jazzist et Deerhoof. On recommande l'écoute numérique tout en sachant que la recette doit sûrement être bien plus excitante en live.