Mansfield.TYA - Corpo Inferno Toujours en course, le duo Mansfield.TYA a sorti à la rentrée 2015 son quatrième album, soit dix ans après leur début discographique réussi avec l'excellent June avec lequel j'ai découvert le groupe. Que le temps passe vite. Depuis, je n'ai que très peu pris le temps de suivre Julia et Carla jusqu'à récemment avec la sortie de ce nouveau disque nommé Corpo inferno, chaleureusement recommandé par une amie. Bien que la méthode de composition change à chaque fois, la formule sonore bigarrée des Nantaises n'a, à quelques nuances près, pas prise une seule ride. On navigue toujours dans un univers varié qui oscille entre chanson française, folk, électro pop, techno, baroque et dans lequel s'immiscent des indéracinables petites comptines dont elles seules ont le secret.

La première écoute intégrale de la galette ne déçoit pas, à défaut de prendre une claque. Comme à l'accoutumé avec ces Nantaises, on a toujours cette précieuse et agréable sensation de ne pas tout avoir saisi sur leurs intentions. Et puis, plus le processus de découverte s'affine, plus les émotions procurées par les ruptures de styles et les arrangements électroniques et acoustiques s'amplifient. On ne peut que s'incliner devant des petits bijoux sonores comme "La fin des temps", titre d'une profondeur inquiétante mais éblouissante, ou la cadencée "BB" qui fait œuvre de triturations électro. En somme, on ne sait jamais vraiment sur quel pied danser avec Mansfield.TYA tant le télescopage entre ombre et lumière est prégnant.

Les voix vêtues de nonchalances et d'effronteries qui résonnent dans ce Corpo inferno, rendent hommage aux écrits de plusieurs belles plumes de la langue française tels que Victor Hugo ("Les contemplations" où l'on trouve un extrait de son poème "Je respire où tu palpites") ou Proust, et savent s'effacer un peu comme sur "Loup noir". Sur cette dernière, c'est l'américaine Shannon Wright copine du label Vicious Circle, qui vient poser sur le sillon une délicatesse vocale familière accompagnée d'un clavier feutré et de violons portant la chanson vers un sentiment d'affliction. Tout le contraire de "Palais noir", le titre suivant à l'accent tapageur.

Composé dans leur studio à Nantes en 3 mois, Corpo inferno a étonnamment le don de se faire adopter assez aisément. Avec son lot de compositions attendrissantes ("Gilbert de Clerc", "Le monde du silence") et des textes que l'on peut s'approprier, le tout avec une prise totale de liberté et de risque, Mansfield.TYA tape encore dans le mille 4 ans après le très recommandable Nyx.