Lenine Renaud

Biographie > Vladimir Séchan

Contacté pour faire un concert lors d'une manifestation pour défendre le logement étudiant, Frank ne peut y aller avec Marcel et Son Orchestre car ses potes ont d'autres plans. Ni une ni deux, il appelle Cyril qui a déjà connu de nombreux succès avec les Nonnes Troppo, les VRP ou les Suprêmes Dindes histoire de dépanner pour la soirée. Et la sauce prend, entre jeu de mot ch'ti et engagement politique, ils décident de s'appeler Lénine Renaud. Deux ans après ce premier concert, le groupe sort Mets tes faux-cils, deviens marteau ! (2013) puis récidive deux ans plus tard chez At(h)ome avec 6, rue Brûle Maison, "Brûle-Maison" étant le surnom d'un chansonnier lillois du début du XVIII ème, pour info, au 6, tu trouves une brasserie...
En 2018, le nouvel album s'intitule La gueule de l'emploi.

Interview : Lenine Renaud, Petite visite chez Lenine Renaud (oct 2022)

Interview : Lenine Renaud, Lenine ou Renaud ? (janv. 2019)

Interview : Lenine Renaud, Lénine Renaud passe à la question (avril 2015)

Lenine Renaud / Chronique LP > Le petit musée

Lénine Renaud - Le petit musée Brel, Ferrat, Sardou, Nougaro, ils sont quelques-uns à avoir rendu hommage à la peinture ou aux peintres (Picasso, Matisse, Gauguin ou Van Gogh notamment) mais à ma connaissance, il n'y avait pas encore d'album "concept" autour de cet art. Lénine Renaud comble ce vide avec un opus conceptuel puisqu'il ne traite que du troisième art. L'idée a été poussée assez loin puisqu'au-delà de la galerie de personnages (que forme le groupe sur la pochette), le CD est une palette, le dos de l'artwork est un dos de tableau et dans le premier clip livré, on se retrouve au musée à faire vivre une œuvre de Rembrandt.

La visite commence par un rappel historique, les premiers peintres ont laissé leurs traces sur des murs, là où tu engueules tes gamins, 40 000 années après, on visite encore leurs grottes. "Rupestre" est décalé, humoristique, enjoué et remet en perspective les "artistes pédants" et nos "aïeux grognons". Sans enchaînement, on fait "La ronde de nuit" avec une description de la création de l'œuvre et les différents niveaux de lecture qu'il nous faut avoir pour comprendre l'œuvre dans son ensemble et ne pas rester à sa surface. Un petit côté cours d'histoire de l'art et d'histoire sociale qu'on retrouve sur d'autres morceaux comme "Le radeau de la Méduse" mais qui se fait sans se prendre au sérieux avec un peu de musette et de guitare. L'autre façon d'aborder les œuvres choisies par Lénine Renaud est la mise en scène des personnages comme "La femme à l'ombrelle" de Monet (dont ils rappellent la passion pour les chemins de fer et la Grenouillère) ou "La femme au chapeau jaune" de Hopper (Une femme en détresse ? Une prostituée ? Une fille facile ?). La musique se fait discrète (même si le son très américain de la guitare est remarquable pour l'amateur des oiseaux de nuit), on est plus attentif aux textes et à ces petites histoires que l'on peut se raconter pour donner vie à l'œuvre. Au-delà des œuvres, ce sont des artistes dans leur globalité qui nous sont également dépeints, on découvre "Gaston Chaissac" ou "Léonor Fini" par de jolis textes et si on a un peu d'entrain et de folie pour Gaston, c'est "Toulouse-Lautrec" qui attire toute la lumière dans cette catégorie. Parfaitement rythmé, assez dépouillé, le titre a tout pour devenir un "hit" car il ne te faudra pas longtemps pour chantonner le refrain et la fin des couplets...

Je te laisse découvrir Le petit musée dans sa globalité sans tout dévoiler, le vernissage vient d'avoir lieu, tu y trouveras d'autres illustres amateurs de détails (Courbet, Goya), des parallèles avec l'actualité, un gros clin d'œil à leurs attaches nordistes (et au tableau de Cogghe plus qu'à celui de Manessier), une petite chatte et des chauve-souris cornues. Le mélange des voix comme des instruments ainsi que la qualité des textes font que Lénine Renaud nous donne envie de filer musarder dans les musées et d'inventer d'autres histoires pour expliquer pourquoi ce cri, quel est ce jeu de carte ou d'où provient cet énigmatique sourire.

Publié dans le Mag #53

Lenine Renaud / Chronique LP > La gueule de l'emploi

Lenine Renaud - La gueule de l'emploi Conservant leur style, les Lenine Renaud semblent un peu moins portés sur la rigolade en cette année 2018. En phase avec la société, ce sont plutôt les difficultés et les accrocs qui nous sont contés, même le "déconneur" a des vagues à l'âme et "Ma copine narcoleptique" ne peut s'empêcher de se terminer par un tacle sur nos députés. L'équipe n'a pourtant presque pas changé, pas de crise de ce côté-là, il y a même eu un recrutement puisque après avoir travaillé pour Alain Chamfort ou Graeme Allwright, Sonia Rekis a pris possession de l'accordéon des Lillois, c'est donc bien le climat social qui a porté le groupe vers des textes et des ambiances qui flirtent entre nostalgie et mélancolie ("Louloute", "Woodstock").

Le décalage reste une de leurs armes favorites pour dérider et oublier ce qui nous entoure, nous plongeant pourquoi pas un siècle plus tôt avec les images du livret ornées de smileys jaunes pour casser l'esprit, dommage car certains collages (ceux de "Les limaces" ou "Libre" par exemple) méritaient mieux que ce photoshopage rapide (comme l'immonde double effet négatif / miroir au dos de l'opus, des graphistes ont connu le goulag pour moins que ça). Des décalages mais aussi des tranches de vie comme celle de la voisine d'en face, celle du gars qui va chercher du "Concentré de tomates" ou du petit "Émile" (putain, celle-là on dirait du Cabrel !), dans ces cas-là, on écoute, on suit les histoires de ces héros de l'ordinaire, on s'attache et on arrive même à être déçu pour eux lors du sappy end ("Marre").

Plus grave que ses prédécesseurs, La gueule de l'emploi n'est pas l'album le plus facile d'accès pour pénétrer le monde de Lenine Renaud, surtout pour celui qui déboule en pensant trouver une alternative à Marcel Et Son Orchestre... D'ailleurs peut-être que le retour de ces derniers (au moins sur scène) a capté un peu trop de bonne humeur ou alors, c'est simplement que le groupe est ancré dans la vie réelle et que celle-ci n'est pas toujours réjouissante. Enfin, tout ça, c'est juste mon petit doigt qui me l'a dit, à peine aidé par mon oreille droite...

Publié dans le Mag #36

Lenine Renaud / Chronique LP > 6, rue Brûle Maison

Lénine Renaud - 6, rue Brûle Maison Le duo de frontmen s'est entouré d'une bande de joyeux drilles pour commettre leurs disques, parmi eux Guillaume (guitariste des premières heures), Gauthier (passé par Louise Primate) et leurs vieux potes Jibé (Marcel Et Son Orchestre, Mascarade) et Laurent (Les Suprêmes Dindes). C'est donc à six qu'ils s'installent en salle pour vider quelques godets et raconter leurs histoires musicales.

Selon les titres et donc les sujets abordés, on oscille entre historiettes humoristiques dans la lignée de leurs voisins Les Blaireaux ("Mon pote et mon chien", "Transports en commun", "Pourvu qu'il pleuve", "Les liaisons dangereuses", "Les tocs") et idées sur notre société ("Ma môme", "Victor Rodriguez"). Et si quand ça rigole, y'a toujours un peu de fond et quand c'est plus "dramatique", on essaye de garder de l'espoir, c'est quand ils réussissent franchement à marier les deux que c'est plus plaisant ("Qu'est-ce que je devrais dire moi ?", "Le visage de Dieu"). Ceci dit, tu l'aurais vite compris à la lecture de cet exercice de liste, Lénine Renaud a plus de facilité quand il s'agit de déconner que quand il faut rester sérieux et défendre un propos, on est donc bien dans la suite lointaine des aventures des Nonnes Troppo, des VRP ou dans une version acoustique des Suprêmes Dindes ou de Marcel et Son Orchestre.

Les chansons sont en effet servies sur un plateau folk-acoustique ultra chaleureux, souvent assez rythmé, toujours dans le ton des paroles (la tristesse de "La résidence") et offre une grande variété d'ambiances (de la country à la musette en passant par le blues et même l'indus unplugged sur "Hypertrichose palmaire"). Vrai travail de groupe pour ce qui est des arrangements, les couleurs sont propres à chaque histoire et mettent véritablement en valeur les textes qui ne font pas que des vannes directes ou des sketchs ("Pourvu qu'il pleuve" et le piège du blouson noir) mais aussi dans une certaine forme de poésie, en témoigne cet extrait de "Ma môme" :
On habite un meublé, elle et moi.
La fenêtre n'a qu'un carreau qui donne sur l'entrepôt et les toits

A l'écrit, ça n'est pas forcément percutant mais à l'oreille, ça me plaît autant que les petits jeux comme "Mon pote et mon chien" (Quelque soit l'heure ou mon état, il saute de joie quand il me voit, mon ...) ou "Les liaisons dangereuses" (et une jolie liste où Y'a des cruciverbistes avec une case en moins.).