Rock Rock > Kvelertak

Biographie > Omelette norvégienne

Né courant 2007 du côté de Stavanger en Norvège, Kvelertak connaît rapidement une trajectoire que l'on qualifiera de météoritique au sein d'une industrie du disque pourtant en pleine déconfiture. Une première démo quelques mois après sa naissance et déjà le sextet venu du froid se fait remarquer, essentiellement dans son pays natal d'abord, mais ce qui lui vaut de signer chez le jeune label qui va monter quelques années plus tard sur la scène européenne : Indie Recordings (Shining). En 2010, éponyme, le premier album du groupe voit le jour et son cocktail hard-rock vs hardcore-punk vs black metal fait instantanément mouche et claque un disque d'or (15,000 copies écoulées rien qu'en Norvège) en quelques mois. Si bien que ledit effort trouve sans souci une distribution outre-Atlantique par le biais de The End Records et de devenir la grosse côté européenne en matière de crossover du hard (mais pas que) doublé d'une cash-machine qui fait sauter la banque.
Deux ans plus tard, devenu définitivement "bankable", Kvelertak signe chez le poid-lourd passé dans le giron d'une major : Roadrunner (qui appartient à Warner Music) et met la touche finale à son deuxième album long-format, Meir, lequel fracasse les bacs au printemps 2013.

Review Concert : Kvelertak, Kvelertak au Lux (avant le virus)

Review Concert : Kvelertak, Kverlertak à Colmar (Oct. 2013)

Kvelertak / Chronique LP > Splid

Kvelertak - splid Quelle est la valeur de Kvelertak version 2020, après le départ de son cogneur de batteur (et l'arrivée de Håvard Takle Ohr) et surtout de son charismatique hurleur Erlend Hjelvik, remplacé depuis deux ans par Ivar Nikolaisen ? Elle est inestimable. Oui, inestimable. Et comme le groupe a l'habitude de transformer un simple riff en or, Splid, quatrième album du combo norvégien et premier effort chez Rise Records, sera le joyau de sa discographie. Rien que ça.

Ce disque est d'autant plus réussi qu'il fait apparaître Kvelertak sous son meilleur jour. Pas question de renier l'époque du phénoménal et charismatique Hjelvik, mais la venue de Nikolaisen (dont Splid est la première expérience longue durée sur bande), ouvre de nouveaux horizons pour le sextet magique aux trois guitares complémentaires (mon Dieu, cet interlude de "Rogaland" !). De nouvelles pistes pour les mélodies, de nouvelles combinaisons vocales plus nuancées et surtout, des ambiances retrouvées. Le black'n'roll est toujours de mise, mais Kvelertakmet encore plus son amour pour le punk et même le deathpunk si cher à ses compatriotes de Turbonegro.

Comme pour l'excellent Meir, le disque débute avec un morceau ("Rogaland") où tous les instruments entrent au fur et à mesure de l'avancée de la chanson, une sorte de montée en puissance pour créer une orgie sonore orgasmique. Et ce n'est que le début. Car l'auditeur a intérêt à avoir la mâchoire bien accrochée pour faire face aux uppercuts qui se succèdent sans temps mort. Ainsi, "Crack of doom" (l'un des deux morceaux de l'album chantés en anglais, et avec un Troy Sanders de Mastodon en vocal guest pas au meilleur de sa forme), le traditionnel (c'est-à-dire mélange de rock et de black) "Necrosoft", le mélodique et puissant "Discord" (deuxième titre en anglais avec Nate Newton de Converge au chant) s'enchaînent sans aucune baisse d'intensité. Il faut attendre la cinquième piste et "Bråtebrann", premier single de l'album, pour retrouver un semblant de respiration dans ce déluge de riffs et de voix torturées. Avant de reprendre quelques mandales bien ajustées ! "Uglas hegemoni", le morceau le plus rock'n'roll de l'album, prouve, s'il en est véritablement besoin, que les racines de Kvelertak puisent dans l'amour des guitares, dans la passion des mélodies mais aussi dans l'urgence, l'électricité, mais aussi et surtout les constructions simples et efficaces. Et dans cette avalanche de fureur et de sueur, on aurait presque oublié que le groove des Norvégiens est tout simplement exquis, en attestent le génial "Fanden ta delle hull! " et le monumental "Tevling" au son clair.

La fin de l'album ravira les inconditionnels du groupe. Après 4'29 d'un passionnant (et même dansant) "Stevnemøte med Satan" riche en mélodies diverses et variées et toujours sur le fil du rasoir, Kvelertak propose deux bijoux schizophréniques longue durée pour lesquels il ne faut pas se fier aux intros. Après un "Delirium tremens" au début hypnotique, à la colonne vertébrale mélodiquement brutale et à l'apogée ultra violente (le tout en plus de 8 minutes !), le disque s'achève avec "Ved bredden av nihil". Débutant à la guitare nylon, ce titre fait plonger l'auditeur dans la folie et se révèle être, avec son prédécesseur, l'un des morceaux les plus sombres de l'album. Une touche finale dérangée et dérangeante sur des rythmes rock puis black.

Le choc est rude mais l'euphorie est à son paroxysme. Avec Splid, et après 58 minutes à malmener de toute part son auditoire, Kvelertak ne réussit pas un coup de maître : il devient le Maître des donneurs de coups. Avec son nouveau frontman, Kvelertak s'offre une deuxième jeunesse, dopée au mélodies imparables et aux harmonies fulgurantes. Plus diversifié et encore plus fort, le groupe offre le meilleur, c'est-à-dire lui-même. Rien de moins.

Publié dans le Mag #42

Kvelertak / Chronique LP > Meir

Kvelertak - Meir Le voici donc ce fameux nouvel album de Kvelertak, grosse hype de la scène hard/rock/métal européenne depuis un premier album qui aura, sinon fait la fortune, au moins assuré les arrières d'un "petit" label devenu presque grand : Indie Recordings. Une maison de disque que le sextet norvégien a donc quitté pour signer chez une structure correspondant plus à son nouveau statut : Roadrunner. Autrement dit, une major (le label appartient à Warner Music Group) assurant une visibilité de patron à un groupe qui semble avoir la recette (miracle ?) pour un deuxième hold-up consécutif oui, mais plutôt mérité.

L'introductif "Åpenbaring" traine un peu en longueur, annonçant tranquillement une grosse plâtrée électrique qui, si elle se fait attendre, finit par montrer le bout de son museau en dernière partie de morceau. Afin de surtout laisser place à un "Spring Fra Livet" qui dégueule ses vociférations héritées du black metal en les dopant à coup de hard-rock gentiment hardcore-punk pour un résultat résolument crossover, détonnant, à défaut d'être si réellement inspiré que ça en fait. Impression confirmée par l'efficace "Trepan" puis le single "Bruane Brenn", Kvelertak a un truc en plus : celui de savoir préparer et servir sa sauce avec un savoir-faire irréprochable et une efficacité couillue qui plaira forcément aux inconditionnels de rock sévèrement burné. Mais ne nous leurrons pas, les Norvégiens inventent sans inventer.

Parce que s'ils ont formé un groupe au concept plutôt fort d'un point de vue marketing, le résultat ne fait "que" mixer, habilement certes, un tiers de hard-rock classieux aux effluves old-school, un tiers de black metal (les tessitures vocales) et de hardcore punk pour les tempi et autres cavalcades rythmiques qui donnent cette vigueur si caractéristique de l'oeuvre des Nordiques. Bon après, d'autres l'ont tenté en restant dans l'ombre, eux l'ont réussi en explosant à la face du monde. C'est aussi ça le talent, même si parfois celui-ci reste un peu en sourdine ("Evig Vandrar" ou "Snilepisk" démontrant que la Kvelertak's-touch ne suffit pas nécessairement à transformer tout ce que celui-ci touche en or massif). Ce même si ces bons gros coups de double-pédale venant plastiquer les codes du bon vieux hard-rock de papa à une vitesse qui en laisse plus d'un sur les rotules, cela a quelque chose d'assez jouissif ("Månelyst", "Nekrokosmos").

Le mélange des genres serait-il l'avenir d'un certain rock pur et dur... plus dur que vraiment pur (sang)? En tous cas, sur une grosse poignée de titres (pas forcément systématiquement sur toute la durée de l'album hein...), cela fonctionne et plutôt bien ("Undetro", "Tordenbrak"). Bref, Kvelertak n'est peut-être (sans doute) pas le phénomène annoncé mais fait très bien le job et délivre ici un album aussi frais que brutalement énergique. Les performances live endiablées - ou pas - feront le reste.