Kvekertak_chouette Kvekertak_chouette Lundi 14 octobre. La température est quelque peu clémente, le ciel joue des tours, mais ça n'entachera pas ma motivation de taper les bornes jusqu'en Alsace pour un groupe devenu depuis quelque mois l'attraction des amateurs de sensations fortes. Ren est de la partie, tout comme Greg et Nanard (Joey Jeremiah), et c'est donc à quatre que nous franchissons les cols pour rejoindre cette zone industrielle où le Grillen accueille nos amis norvégiens. On arrive un peu à la bourre, et on a pas vraiment pris le temps de consulter les internets pour se renseigner sur les deux groupes ouvrant la soirée. On prendra donc la température sur place. A l'ancienne. Ou plutôt comme il y a vingt piges, quand les moyens technologiques ne nous permettaient pas de fouiner sur un mauvais myspace pour écouter à foison tout et n'importe quoi.

Nous pointons le bout de nos nez dans la salle alors que Gerilja, trio norvégien, termine son set. On aura juste le temps de constater que le backline de Kvelertak monopolise une grande partie de la scène, et que Gerilja (et très certainement le groupe qui lui succèdera) se partage les restes. L'ambiance est attentive (ou "je m'en foutiste") pendant que les trois musiciens développent un rock mi alternatif mi psychédélique, le tout envoyé sur une guitare Jackson. Tout les goûts sont dans la nature. En prenant le set en cours, il m'est difficile de rentrer dans l'ambiance qu'à dû développer le groupe tout au long de son concert, mais l'ensemble n'est pas déplaisant.

Deuxième groupe de la soirée, Årabrot est lui aussi un trio venu de Norvège. Autant Gerilja me semblait tout à fait intéressant, autant Årabrot reste pour moi une sacrée énigme. Looks improbables (le bassiste mixe la culotte courte d'Angus Young, la coupe au bol de Johnny Ramone et le micro surélevé de Lemmy), son horrible (malgré la foison d'amplis Hiwatt sur scène), chansons chiantes à mi chemin entre la noise et le black metal), je n'ai soit rien compris au délire des gars, soit je suis trop vieux pour ces choses là. Du coup, pendant que le guitariste envoie des riffs à deux sous et que le batteur ramasse tout les trois morceaux son tom basse, on se concentre sur la dégaine des gaziers et sur l'apparition en milieu de scène d'un play boy, propre sur lui et lunettes de soleil sur le nez, derrière la forêt d'ampli du bassiste. Le fameux bonhomme semble envoyer des séquences ou des nappes de claviers (je ne saurais pas vraiment dire, tellement on entendait pas grand chose à ce qu'il faisait), reste immobile derrière le mètre carré qui lui a été alloué, décapsule une canette pendant que ses amis s'égosillent, semble apprécier la bière Meteor chaude, et scrute le public pour voir si un spectateur ne trinquerait pas avec lui. Incompréhensible. Sitôt le show terminé, mes acolytes et moi même restons sans voix devant ce spectacle ubuesque sans réel intérêt, même si je reconnais avoir tapé du pied quand le trio balançait de fort belle manière bien que trop rarement des riffs lourds et pesants.

Kvelertak Kvelertak C'est à l'attraction de la soirée de prendre le relais. Le temps de saluer l'ami Vava The Rebel Assholes, Kem Eurockéennes et de tailler le bout de gras avec le sympathique Nicolas du non moins sympathique zine Daily Rock, que les roadies s'affairent sur scène pour faire place nette au six Norvégiens. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que Kvelertak en impose dès les premiers riffs. "Åpenbaring", morceau introductif de Meir (excellent deuxième album du groupe), ouvre le show voyant les trois (!) guitaristes maltraitant leurs instruments respectifs tandis que Erlend Hjelvik, l'imposant frontman, déboule sur scène avec un hibou sur le crâne ! La puissance développée par le groupe est phénoménale, le son est époustouflant et la présence scénique des six musiciens en dit long sur le sérieux et le professionnalisme de la formation. Kvelertak distille son black 'n' roll avec brio et énergie, et je suis soufflé quand je vois que l'un des remuants guitaristes porte une attelle longue comme mon bras. Le jeu est précis, les guitares se distinguent dans la sono, et même si le chant "black" a tendance à me fatiguer assez rapidement, le charisme du chanteur et (surtout) les guitares high energy et hyper rock 'n' roll me font passer un excellent moment. Je reste scotché par l'aisance du groupe, et même si l'un des guitaristes (celui jouant sans médiator !!) connaît quelques soucis, cela n'entache en rien la prestation de Kvelertak que je qualifierai de rageuse et généreuse. L'ingénieur du son fait un excellent taff, le son devant la scène comme en fond de salle étant d'une puissance et d'une propreté déconcertantes. L'éclairagiste abuse quand à lui des blinders positionnés sur les têtes d'ampli, mais fait tout de même du bon boulot. On sent donc un groupe rôdé et une équipe hyper pro à ses cotés.

Kvelertak enchaîne durant près d'une heure les brûlots de son dernier album (le dérangeant "Trepan", l'ultra jouissif "Bruane Brenn", le punk black "Nekrokosmos".) et des titres de son premier disque (c'est ce que j'en ai déduit, car le groupe a sorti deux albums à ce jour, et que je ne possède que leur deuxième skeud. Pas con comme raisonnement hein ?), avec pour dénominateur commun de ravir un public venu assez nombreux pour un lundi soir (ce que le groupe ne manquera pas de souligner) et assez différent vestimentairement parlant (quelques Turbojugend ici et là, des punk, des amateurs de hardcore et des Vikings). Il faut dire que la formule proposée par Kvelertak a de quoi satisfaire un maximum d'amateurs de musique dite "violente" et "énergique". Pas par opportunisme, juste par plaisir de mélanger les multiples influences parfaitement digérées. Si bien qu'après une set list riche et variée, le groupe quitte la sène du Grillen avec la satisfaction du devoir accompli sous les applaudissements appuyés de l'assistance.

Ce concert restera comme l'un de mes moments "forts" de l'année où un maximum de paramètres étaient réunis pour faire de ce show une réussite : salle à taille humaine, excellent son, bonne ambiance, et groupe au top de sa forme. Que demander de plus ?