Rock Rock > Killbody Tuning

Killbody Tuning / Chronique LP > Pictorial

Killbody Tuning - Pictorial Lors des Etranges Nuits du Cinéma de 2017, Killbody Tuning s'est prêté au jeu du ciné-concert avec le "Pi" de Darren Aronofsky (auteur par ailleurs des excellents "Requiem for a dream" et "Black swan" mais aussi des plus dérangeants "Noé" et "Mother!") et n'a pas voulu s'en tenir à une performance live prolongeant le plaisir en retravaillant ses compositions pour un album intitulé Pictorial. Double clin d'œil (donc tu ne vois plus rien) puisque sa musique est très "visuelle" et ce mot commence par la magique lettre grecque. Pas la peine pour autant de voir (ou revoir) le film pour profiter de la musique des Suisses toujours aussi démonstratifs et enclins à balancer de grandes nappes progressives et de tout déchirer au larsen. Les plages de folie saturée sont un peu "classiques" (pour du post rock s'entend), c'est donc avec les parties plus douces que Killbody Tuning fait la différence ("When I was 6 I did", "No... I saw everything", "Our fingerprints" eh oui, chaque morceau reprend une phrase prononcée dans le film). Des sonorités inattendues, une architecture moins évidente, des sensations plus nuancées et une approche plus mentale que physique qui s'étend jusqu'à ce que les distorsions reprennent du service et assurent elles aussi. Comme le nombre, cet album est donc transcendant.

Publié dans le Mag #36

Killbody Tuning / Chronique LP > Hello ! Welcome, so far...

Killbody Tuning - Hello Welcome So Far J'aurais presque envie de m'excuser bêtement de chroniquer un groupe, pas mauvais du tout soit dit en passant, qui pratique un style qui, avec le temps, m'a usé puis véritablement ennuyé faute de véritables révolutions ou de nouvelles inspirations. Mais vraiment. J'ai découvert puis aimé le post-rock fut un temps, quand c'était à la mode on va dire. En gros vers la fin des années 90, quand Mogwai défrayait la chronique avec ses premiers albums, Slint n'existait déjà plus depuis longtemps. Et puis, sont arrivés progressivement pendant une bonne décennie une ribambelle de formations qui ont reprise à bon ou mauvais escient tout ou partie des codes et gimmicks du sacro-saint post-rock. Killbody Tuning sort en octobre 2014 Hello ! Welcome, so far..., les Suisses n'ont pas bouleversé la formule depuis tout ce temps, ça reste très cinégénique et la recherche esthétique est indéniable, atteignant parfois le sublime ("Italian football legend"). Malheureusement, l'effet sensationnel qui s'en dégage ne fonctionne plus sur moi mais risque de ravir les personnes gravitant (encore) autour de ce genre de rock instrumental où les guitares dessinent les traits de son caractère profondément mélancolique et aérien.

Killbody Tuning / Chronique LP > 47°0'40.00"N/6°42'20.00"E

Killbody Tuning Au départ il y a un film, titré Dernière chasse et son réalisateur romand (suisse), un moyen-métrage d'horreur psychologique tourné à l'été 2009 par un certain Julien Humbert-Droz, notamment à l'origine de prises de vues figurant sur Videography, le DVD d'ASIDEFROMADAY paru en 2007. Ensuite il y a un groupe de post-rock à tendance expérimentale, suisse aussi et porteur d'un nom de collectif gansta-rap bling bling décérébré : Killbody Tuning. Pourquoi pas. Le premier (JHD) cherche une bande-son, le second (KT) un projet lui permettant de se rapprocher d'un univers cinématographique qu'il essayait déjà d'explorer au sein de son premier enregistrement (l'EP The french hunter, 2008), les deux font naturellement l'affaire et permettent alors à 47°0'40.00"N/6°42'20.00"E (bénie soit la fonction copier-coller du laptop) de voir le jour. Pourquoi pas aussi.

Qui dit post-rock cinématique dit forcément (enfin logiquement...) musique panoramique, génératrice d'images consécutives aux expressions sonores de ses auteurs, "mais" dans le cas présent, le résultat est pour le moins étonnant. Car si Julien Humbert-Droz a souhaité intégrer le groupe très en amont dans le processus de création de son film, celui-ci lui a artistiquement répondu en déclinant les atmosphères du métrage en des compositions originales, si bien que le rendu ne soit pas une simple illustration sonore de la matière filmique mais quelque chose d'à la fois plus complémentaire et en même temps original... Et par là-même assez différent de ce que l'on imagine d'un film que l'on n'a pas vu (malheureusement) mais qui, de part son synopsis, semble assez éloigné des sphères relativement apaisées d'un "Ara ubiorum" ou d'un "Seestrasse", ce-dernier s'offrant néanmoins quelques poussées de fièvre abrasive à l'intensité métallique palpable.

Post-rock métallisé, densité sonore peu à peu amplifiée jusqu'à atteindre des sommets de fougue passionnelle et mélodies puissamment évocatrices ("Porta Capena"), on en prend plein les tympans et Killbody Tuning s'offre de très belles réussites lorsqu'il explore le registre "post-rock" étendu... Mais se montre bien moins convaincant au moment d'incorporer une voix sur "Marker of change" et "Muswell Hill", deux "chansons" aux arrangements post-rock bien effacées et aux effets plus que limitées en comparaisons des morceaux exclusivement instrumentaux. Ou la démonstration pure et implacable que ce n'est pas l'absence de chant qui cause l'ennui mais trop souvent le manque de créativité/talent. Les auteurs de ce 47°0'40.00"N/6°42'20.00"E (merci la fonction copier-coller bis) n'en manquent certainement pas et c'est donc bien là où réside tout l'intérêt de ce disque.