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Biographie > Riff heavy chez les kiwis

Originaire d'Auckland en Nouvelle-Zélande, Kerretta est un trio revendiquant l'influence de Isis, Pelican et autres Mogwai ou Russian Circles. Evoluant donc des sphères post-rock/post-metal atmosphèriques ou plus telluriques avec une pointe d'expérimental, le groupe sort un premier EP vinyle en 2008, Antient avant de publier l'année suivante son premier album long-format : Vilayer. Celui-ci se voit rééditer en Europe courant au mois de mai 2010 via Golden Antenna Records (Daturah, From Monument to Masses...).

Interview : Kerretta, Kerretta parle (sept. 2014)

Kerretta / Chronique LP > Pirohia

Kerretta - Pirohia Trois années se sont écoulées depuis la sortie de Saansilo et voilà que Kerretta refait surface. Certes, les kiwis ont sorti des titres en digital pour préparer le terrain à ce Pirohia, mais comme ils sont amateurs de jolis artworks et de digipaks soignés, tenir l'album entre ses mains en plus de l'avoir dans les oreilles, c'est quand même autre chose.

Même si le ciel et la mer sont au coeur des jolies photos de l'artwork, les riffs et les distorsions lourdes et sombres sont gravement telluriques, à l'écoute de cet album, c'est bien le sol qui gronde, la terre qui se craque et nos pieds qui tremblent. L'attraction terrestre granuleuse et sa pesanteur poussiéreuse se trouvent contrebalancer par des petites notes claires qui font sourire les oreilles et allument le feu dans les yeux, outre la guitare, les ajouts de percussions font aussi beaucoup à contraster l'ensemble et le rendre facilement audible. Si les kiwis n'étaient qu'en mode vrombrissements de basse, on saturerait aussi vite que leur guitare, là, les nombreuses petites éclaircies aérent le tout, le rendent dynamique et parfois même entraînant et hypnotique ("Sister, come home"). C'est d'ailleurs dans ce genre de morceau où les contrastes sont poussés au maximum que je prends le plus mon pied à me laisser emporter par leurs idées, quand ils ajoutent des changements de rythme ("The roar"), on atteint même des sommets. Et ce, ultra rapidement car le groupe ne s'étend jamais vraiment (les titres tournent tous autour des 5 minutes), il va à l'essentiel et ne se perd pas dans ces circonvolutions tant appréciées chez les tenants du post-rock. D'une grande cohérence, tout l'album se déguste d'une traite, à peine remarque-t-on ce "Kawea tatou ki nga hiwi" qui incorpore un chant tribal maori, une voix qui est ici un instrument au service d'une ambiance plus qu'un transmetteur de message, on est bien plus proche du shamanisme que d'une "chanson", Kerretta honore ainsi les racines d'une nation à l'identité très forte.

Si quand on te parle de rock et de Nouvelle-Zélande, tu penses à The Datsuns ou Die! Die! Die!, c'est que tu n'as pas encore écouté Kerretta parce que s'il fallait n'en retenir qu'un, ce serait eux.

Kerretta / Chronique LP > Saansilo

Kerretta - Saansilo En Nouvelle-Zélande, "on" a la religion, qui se joue à 15 et avec un ballon ovale, des paysages incroyables de diversité ET une exception post-noise-rock métallique de premier choix : Kerretta (d'accord il y a aussi les excellents Jakob...). Vilayer, le premier album des kiwis leur avait permis de débarquer sur le vieux continent il y a près d'un an et demi de cela, Saansilo, leur nouvel opus va assurément leur faire transformer l'essai inaugural... ne serait-ce qu'au détour des sept bombes à fragmentation livrées par le label Golden Antenna Records (Daturah, From Monument to Masses, Ira, Maserati) dans un très beau "super heavy cardboard sleeve" imitation mini-vinyle. Un objet particulièrement soigné pour un album qui ne l'est pas moins ; et c'est "A ways to surprise" qui se charge d'en apporter les premiers éléments de confirmation : le riff de guitare tourne en boucle, gimmick d'une rare efficacité pendant que derrière, le groupe bétonne déjà son sujet, entre les accents électriques qui convolent en juste noce aux côtés d'une batterie qui cadence l'ensemble avec une précision diabolique.

Un premier titre en forme de coup de maître et une mise en orbite d'une effroyable efficacité, Kerretta fait l'étalage de toute sa classe en distillant son détonnant cocktail de post-rock abrasif, de noise incandescente et de metal alternatif instrumental, pour un résultat à la limite de l'orgasmique ("Halls to wherever"). Les guitares se font à la fois volubiles et tortueuses, le groupe développe un agrégat musical aux fluctuations intenses, aux climats changeants réservant quelques sommets de post-rock affolant de maîtrise technique. Du point de vue du songwriting, Saansilo, c'est pas mal aussi, pas uniquement un exercice de style formellement brillant mais vide de sens donc, c'est également une véritable leçon de songwriting aussi labyrinthique que fascinant ("Bloodlines" et son final ébouriffant, "By the throats" et ses geysers électriques éteints par une rythmique fracassante). "Shepherds thread" dépose ses petites touches mélodiques sur un socle post-rock catchy, appuyé par quelques riffs qui dévorent la bande magnétique avant de faire cracher les décibels sur un final des plus explosifs. Quant à "Kept from the brilliance of the outer world", il prend tout son temps pour faire languir l'auditeur pour mieux le clouer sur place à coups de déferlantes post-métalliques instrumentales surpuissantes, avant que "Onyxia" ne vienne épiloguer sur un final à la violence éruptive prégnante et aux ultimes poussées de fièvre particulièrement dantesques. Deux derniers titres pour confirmer ce que l'on pressentait déjà après l'écoute du premier album du groupe, à savoir que Kerretta fait assurément partie des futurs grands s'il ne l'est pas déjà.

Kerretta / Chronique LP > Vilayer

Kerretta - Vilayer Intro toute en bruissement électrique, la saturation qui grimpe progressivement, la tension qui commence emplir l'atmosphère, ligne de gratte aride en duel avec la batterie, basse mise en avant et progression constante : "Sleepers", titre inaugural de ce Vilayer n'a en apparence rien de bien extraordinaire, pourtant c'est un véritable coup de maître que ce premier titre réalisé par le trio néo-zélandais. Quelque part entre post-rock survolté, noise ondulant le long de notre colonne vertébrale et stoner instrumental burné, Kerretta marque d'entrée de jeu son territoire.
Heureux hasard ou simple maîtrise absolue de son art : les kiwis ont du répondant et le démontrent sans sourciller avec "Maven fade". Là, on comprend que ça ne peut pas être deux fois de suite le coup de génie aléatoire qui frappe encore, mais que ce trio là en a dans ses riffs et sous la pédale d'effets. Constat du reste un peu plus confirmé par "The Secret is momentum". La frappe est limpide et alerte, les breaks démoniaques et si le groupe oeuvre dans un registre exclusivement instrumental, on ne peut qu'admettre l'évidence à la découverte de "White lie", une voix serait de trop.
Croisement idéal entre un Russian Circles en plus rock et un Pelican sans ses éléments les plus métalliques, Kerretta n'en demeure pas moins à la fois puissant et vénéneux, troublant dans "Dinshah" lorsque le tempo ralenti et que la musique se veut encore plus mouvante, subtile dans son approche harmonique... ou à défaut très simple, concis et efficace lorsqu'il revient à ses fondations noise-rock ("Nest of spies"). Incandescent lorsqu'il tente t'accoucher d'un single (si si), comme avec "The square outside" (la tuerie de l'album), le groupe conclue son magistral premier album sur un "Born amber reigns" dantesque de maîtrise. Et là, que dire sinon respect. Parce que Vilayer est must-have absolu. Rien que ça.