À l'été 2021, Rémy, batteur de La Jungle nous informait, lors d'une interview accordée à notre magazine, que le duo avait profité, pendant le COVID, d'un appel à projet artistique avec le musée Art et Marges pour créer une œuvre sur laquelle une dizaine d'artistes d'art brut ou d'art outsider (parmi lesquels André Robillard, François Peeters, Samuel Trenquier et Serge Delaunay qui est décédé avant la sortie de ce disque) devaient interpréter graphiquement chacun des titres proposés par le groupe. Le fruit de ce travail a été récompensé par la sortie deux ans plus tard de Blurry landscapes avec la série des œuvres visibles sur la version vinyle. Un vrai objet qui a conduit les Belges à une manière de travailler différente de ses habitudes pour ce sixième album, plus lente, qui leur ont ouvert de nouvelles perspectives.
Et cela se ressent. Comment ? Par une diversité d'univers qui s'impose encore plus à l'esprit sur ce deuxième album sorti en deux ans (Ephemeral feast, dont on a loupé la sortie en 2022). Ça reste clairement toujours dansant et fourrés de passages de rock bien nerveux ("The marvelous forest of our dreams"), tribaux ("Tomorrow"), ou proche de l'electro-techno ("La compagnie de la chanson", "Le tigre en bottes vertes", "The growl and the relief"). Mais, plus surprenant peut-être, le duo s'essaye également avec succès aux paysages sonores relaxant ("Hatching the light", "Stop", "Le chemin rapide") ou à des choses plus proches de ce que faisaient à une époque des groupes comme LCD Soundsystem voire Unkle qui arrivaient à mettre sur le même pied d'égalité la puissance répétitive de fines mélodies avec un rythme motorique comme sur le très réussi "Panther's rib cage". On pensait qu'à un moment donné les gars de La Jungle allaient s'essouffler artistiquement. Il aura fallu une période de confinement pour les booster comme jamais. Impressionnant.
Publié dans le Mag #59