La date du 5 avril 2024 était marquée au fer rouge dans notre agenda, tout était calé : session photo (sous la pluie) suivie d'une interview, conclue par le moment le plus attendu, à savoir ce show de la "release party" totalement immanquable pour tout fan parisien des Johnny Mafia. Le quatuor biberonné à Weezer, aux Pixies et Nirvana ne nous a pas déçus, dans le fond comme dans la forme. Ce soir-là, ils ont laissé le soin aux Gurl de chauffer La Maroquinerie. Le W-Fenec vous propose un retour sur des moments forts et les ressentis de cette soirée "sold out".
Johnny Mafia @ La Maroquinerie (Paris) / 2024
Rien d'étonnant à ce que les Gurl ouvrent le bal ce soir. Enzo, batteur de Johnny Mafia, m'avait chaudement recommandé et vanté le talent de ce trio de rock garage aux accents pop-punk lors d'une soirée de la Saint-Sylvestre datant d'il y a quelques années. J'avais dû attendre la sauterie des 5 ans d'NRV Promotion l'année dernière à Petit Bain (Paris) pour constater le potentiel de ce groupe, sans pour autant lui trouver ce petit "quelque chose qui fait la différence". Comme les Johnny Mafia, les Parisiens ont le sens de la mélodie qui fait mouche et une ardeur communicative, et surtout élaborent une musique calibrée pour le live. Ceci dit, contrairement à la dernière fois, le groupe semble bien plus à l'aise sur scène, davantage relâché et cela favorise le public à se bouger et illuminer son esprit. Quelques membres des Johnny étaient d'ailleurs aux premiers rangs pour prendre le pouls de la soirée, et ont dû constater, tout comme moi, à quel point le choix de Gurl était plus que justifié.
Depuis la sortie de leur EP Maybe we're not kids anymore en novembre 2023, le trio a clairement passé un cap, progresse à son rythme et tourne de plus en plus, notamment en dehors de nos frontières, puisque des dates en Angleterre ont été annoncées sur leur page Bandcamp. Tâchons de les revoir lors d'une tournée promotionnelle de leur premier LP qui devraient logiquement débouler dans les prochaines années. Puisqu'"ils ne sont (peut-être) plus des gamins", que leur maturité artistique semble prendre forme, les membres de Gurl devraient présenter le meilleur d'eux-mêmes à cette occasion. Au vu de la prestation fournie ce soir, on n'en doute pas.
Qu'est-ce qui différencie une "release party" d'un concert classique ? À part présenter ses nouvelles chansons, eh bien, pas grand-chose en réalité. Surtout que depuis la sortie en février de leur quatrième album, 2024 : année du dragon, les Johnny Mafia ont eu le temps de caser neufs concerts et de jouer/parfaire leurs nouveaux morceaux en public avant même celui de La Maroquinerie. Ce soir, le quatuor de Sens (ou 3C, son tourneur) a choisi la capitale française (et non, celle du Monde, qui est Sens évidemment, ville natale du groupe dans laquelle il jouera comme chaque année lors de la fête de la musique...) pour célébrer la sortie de son nouvel album. Gentlemen qu'ils sont, les gaziers l'ont quasiment joué en entier. Seule "Keep an eye on me" a été volontairement oubliée. Pourquoi ? Est-ce qu'il manquait quelqu'un pour jouer du xylophone à la fin ? N'avaient-ils pas le temps nécessaire pour la présenter aux fans ? Pas assez répétée ou impossible à rejouer en live ? Nous ne le saurons jamais, mais les Johnny ont de quoi faire en termes de catalogue de titres. Ils nous gratifient d'une vingtaine de morceaux revisitant assez bien leur répertoire avec une petite préférence pour le dernier (normal !) et Sentimental.
C'est sur les airs de la "Lambada", célèbre tube de l'été datant de 1989 dont l'air a été pompé sur un obscur groupe bolivien, que Johnny Mafia arrive sur les planches, visiblement heureux et fiers d'être devant un public chauffé à blanc. Enzo, qui se présente avec une peau de grosse-caisse customisée à son effigie (une image extraite du clip "Vomit candy" où il pose connement avec un chien), balance le tempo de "Sting", les guitares se lâchent progressivement, le groupe est lancé telle une fusée. Ce dernier enchaine avec facilité et entrain ses tubes power pop/punk les plus connus ("Trevor Philippe", "Sun 41", "I'm sentimental", "Sleeping", "Black shoes") entremêlés des hits beaucoup plus frais ("Green eye", "Rules bulls bells", "Vomit candy", "Gimme some news"). En parlant d'enchainement, on a particulièrement aimé celui réalisé entre "Green eye" et "Trevor Philippe", deux titres qui possèdent le point commun de se terminer sur un tapping de guitare assez semblable. Les Bourguignons agrémentent leur spectacle de pitreries et de blagues entre les morceaux. Ainsi, William tente de convaincre le public, tel un vendeur sur les marchés ambulants, d'acheter un "super" calendrier chinois qu'on retrouve généralement dans les restaurants. Il faut dire que le bassiste provoque assez souvent des moments gênants mais hilarants quand il s'adresse à l'audience. Mais les autres ne sont pas en reste quand il s'agit de galéjer, à l'image de Théo qui essaye de négocier l'augmentation du montant du cachet sur scène en apostrophant le tourneur.
Johnny Mafia @ La Maroquinerie (Paris) / 2024
Le public aime ça, en redemande même, et ne se fait pas prier pour foutre un dawa d'enfer. Entre successions de slams où les fans retombent parfois sur les musiciens ou leurs matériels, jets de bouteilles d'eau et de gobelets de bières sur le groupe (dont Enzo se débarrasse en les renvoyant dès qu'il en a l'occasion), quand ce n'est pas sur les pédales de Fabio, sans compter les divers coups sur les micros quand les musiciens chantent, et j'en passe, les Johnny Mafia restent quasi stoïques face à cela et n'oublient jamais ce pourquoi ils sont là. Vivre cela peut parfois nous mettre dans des situations inconfortables (deux chutes pour ma part suite à un mouvement de foule), mais cela fait partie du spectacle. Et on oublie vite tout ça car il y a peu de temps mort dans les shows des Sénonais, tout se fait à fond, et l'état d'esprit est toujours joviale. On passera sur les micros défauts du set, comme ces quelques fausses notes entendues entre le xylophone et la guitare sur "Gimme some news", car le concert de Johnny Mafia a été ce soir incroyablement bon, bien rythmé et fluide, tout en n'omettant pas de saluer la sympathie et la joie contagieuse des gars qui facilitent aussi son ambiance. Le groupe nous quitte après avoir interprété le combo décoiffant "Crystal clear"/"Ride" en rappel. Bouillonnante et vivante, cette soirée fut idéale, une grosse fiesta inoubliable et à coup sûr le meilleur show du groupe auquel j'ai pu assister. Un conseil : foncez vite les voir ! Ils viennent de rajouter des dates un peu partout pour le reste de l'année.
Setlist :
Sting
I'm bound
Green eye
Trevor Philippe
Sun 41
Summer
Rules bulls bells
Problem
I'm sentimantal
Cyanide
Vomit candy
Phone number
Split tongue
Sleeping
Hammer
Gimme some news
Black shoes
TV and Disney
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Crystal clear
Rise
Merci à Marion Seury, et JC de 3C.
Photos : © Rocco de Fixin
Publié dans le Mag #61