C'est toujours un plaisir de parler d'Incubus. Tout d'abord parce que ce groupe dégage quelque chose de sympa, et que surtout c'est un des rares combos U.S. qui ne me lasse pas au bout de trois mesures. Car Incubus, c'est bien connu, n'est pas un groupe de métal. Non. C'est un rock 'n' roll band, tout simplement, un groupe ouvert qui ne s'est jamais fait prié pour mélanger ses influences et qui a su imposer un style, un son, un respect. Morning view, véritable 3ème LP studio après le génial S.C.I.E.N.C.E et le respectable Make yourself, est un très bon album. Ça, ce n'est pas forcement une surprise...
Incubus
Biographie > Un cul d'bus ?
Interview : Incubus, Incubus : interview (juillet 2001)
Incubus / Chronique LP > If not now, when?
Très drôle, c'est les vacances alors pour fêter ça les rigolos chargés de la promo du nouvel album d'Incubus ont inversé les cds et ont mis les démos du vainqueur d'X-Factor s'enregistrant dans sa salle de bain à la place du vrai nouvel album de Brandon et sa troupe... Ah merde, non, c'est le vrai. Bon ben voilà, vous allez encore dire "rhoo il est méchant... blabla", oui d'accord. M'enfin là quand même... En plus on a fait un effort, vu le palmarès du groupe : "If not now, when?", "Promises, promises", "Friends and lovers" et "Thieves", on a donc laissé passer quatre titres pour en ressortir avec l'envie de nous ouvrir le crâne pour oublier tout ça. Et pourtant on est plutôt préparé à ces choses-là à la base : Muse, Army of Anyone, Results May Vary de Limp Bizkit, le dernier Velvet Revolver (rhoo ça va...), n'importe quel enregistrement d'Empyr, les purges intergalactiques, ça va, ça nous connaît. Mais à ce point, fallait oser. Eux ils ont osé.
Une collection de bluettes adolescentes lestées de quelques litres de guimauves, un Brandon qui en fait des tonnes ("Isadore"), des guitares aux abonnées absentes (le très mal nommé "The original" > ironie cruelle pour le groupe), c'est mou comme jamais à tel point que l'on pourrait presque s'endormir. Sauf que non, parce qu'à force de subir, ça démange de prendre les enceintes et de les balancer par la fenêtre. Réaction primaire, épidermique certes, mais potentiellement justifiable. Forcément, difficile de s'endormir énervé. Surtout si on repense à ce qu'était le groupe il y a quelques années. "C'est toujours un plaisir de parler d'Incubus" disait un illustre confrère il y a bientôt dix ans, faut dire que c'était avant, quand le groupe pondait un Morning view. Maintenant on a droit à If not now, when? et des titres du calibre de "Switchblade" ou "Defiance". Ouais bah c'était mieux avant hein.
L'album tourne en boucle (déjà rien que ça est un supplice en soit) et nous on se demande ce qui a bien pu passer par la tête des membres du groupe pour commettre un truc pareil. Incubus merde, là c'est à croire que tout fout le camp dans une industrie du disque qui marche décidément sur la tête. Bon d'accord tout n'est pas à jeter, quelques titres s'en sortant un peu moins mal que d'autres (une moitié "In the company of wolves", l'autre moitié, n'importe laquelle au point où on en est, d'"Adolescents") et... euh, ah ben c'est tout. Autant dire que sur quelques onze titres, oui, ils nous ont épargné les "chutes de studio" histoire de ne pas être complètement ridicules... encore que là ce soit déjà limite. Navrant de quasi bout en bout, If not now when? atteint sans forcer son talent (ah ça pour pas forcer, ils ne se sont pas foulés...) le statut de bide artistique de l'année. Bravo et pas merci, on peut désormais débrancher également Incubus afin de ne plus jamais à subir ça. R.I.P.
PS : par contre la pochette est plutôt pas mal. Oui, on se raccroche à ce que l'on peut.
Incubus / Chronique LP > A crow left of the murder
En voilà qui ne sont pas passés loin du couperet fatidique, ne serait-ce que parce qu'ils nous avaient offert en guise de sorties récentes deux improbables daubes boysbandesques où leur fusion rock énergique s'était peu à peu transformé en pudding pop flasque et dégoulinant, où la voix du charmeur Brandon Boyd (il est bôôô !) pouvait sans peine concurencer la génération Star Ac' dans leur recherche désespérée d'exaspération la plus parfaite de l'auditoire. C'est peu dire que dans ces circonstances le bourreau aiguisait conscencieusement sa hache venimeuse sur le tranchant de sa stéréo, prêt à couper la tête des traîtres américains déjà mis à mal sur l'autel judiciaire, embourbés dans les procès (ex-maison de disque, ex-DJ) et le manque de crédibilité artistique encore renforcé par le départ impromptu de leur bassiste d'origine Dirk Lance.
Il fallait donc du grand Incubus pour stopper net la course folle de la lame affillée qui se dirigeait à grande allure vers leurs nuques tremblantes : les californiens ont du expier tout leurs péchés d'orgueil et de luxure, trouvé un alibi du tonnerre en la personne de l'ex-bassiste des Roots (et ex-Blackalicious) Ben Kenney, et pondus sous la pression de l'Inquisition rock un septième album catarthique qui replonge aux racines énergisantes des Fugus amongus et autres S.C.I.E.N.C.E de la chanson funk-rock parfaite. Les guitares se font soudainement plus métalliques et techniques, la basse retrouve le groove étincelant qui faisait d'Incubus le faux-frère de Primus, et même Brandon a laissé tomber mimiques désespérantes et pulls près du corps qu'il a troqué contre sa vieille tunique de Mike Patton imitant Anthony Kiedis au bal du lycée.
Alors désormais, quand Incubus nous sert du tube, ça donne un "Agoraphobia" énorme que l'on fredonnera ce coup-ci sans honte sous la douche froide de "A crow left to the murder" qui nous réconcilie tout d'un bloc avec les ricains tant il explose d'inventivité, de fraîcheur funk, de pop moins maîtrisée (donc plus touchante ?) et de délires sonores presque punk, au moins dans l'esprit. Il ne reste plus à Incubus qu'à inoculer le virus aux Red Hot pour que la bonne parole se propage à nouveau à la vitesse de la grippe aviaire, et le rock sera sauf. Allons, bourreau, remets ta lame au fourreau, tu couperas des têtes plus tard.
Incubus / Chronique LP > Morning view
13 bombes excellemment produites avec toujours ce son caractéristique à la bande de Brandon. Incubus, dans ce troisième effort, prouve (mais en a-t-il vraiment besoin ?) qu'il reste un des maîtres du couple énergie/mélodie. "Nice to know you" qui ouvre le disque met en application les atouts d'Incubus : puissance des guitares, voix mélodieuse et irrésistible, rythmique passant des structures rock aux rythmes pop, et toujours ce pont et ce refrain beau, tout simplement, avec ses guitares acoustiques. Pfff, d'entrée, Incubus a placé la barre bien haute. Tout au long de cet album, les morceaux se suivent et ne se ressemblent pas avec tout de même une ligne conductrice : apporter des émotions à travers les instruments et la voix ô combien fameuse de Brandon. Et ça marche. Même si au premier abord, il surprend par sa relative accalmie par rapport aux précédents albums, la marque de fabrique est toujours la même ! Des ambiances, des sons rocks bien à eux et Brandon, toujours Brandon, une voix sans défaut. Aucun morceaux de ce disque ne peut véritablement être classé métal ou assimilé ! On parlera plutôt, pour les morceaux les plus "durs" de rock comme pour "Circles", "Whish you were here" au riff destructeur tout de suit entêtant suivi de scratch et guitares peu conventionnels, "Blood on the ground" d'une puissance comparable aux autres morceaux de la trempe, "Have you ever", certainement le titre le plus rythmé et énergique du disque, sans réelle pause dans le dynamisme du titre, "Under my umbrella", chanson très rock mélodique. Ça, c'est pour ce qu'on connaît le mieux d'Incubus, ce mélange de force dans les instruments et de mélodies vocales à en faire pâlir les plus grands. C'est à partir de ce moment que le disque devient intéressant. Non pas que ces titres précédemment évoqués soient mauvais, loin de là, mais on connaît cette propension des américains à exploser la baraque. Ce qui devient intéressant dans le sens de curieux, c'est le reste de ce disque, c'est à dire 7 titres, soit un peu plus de la moitié de l'album. Brandon lui-même le disait dans la "bio" envoyé à la presse pour parler de cet album, cet album allait surprendre, et Incubus s'est fait plaisir à le faire. Et ça se sent ! Introduction de nouveaux instruments, comme de superbes violons sur "Just a phase", une chanson avec des arpèges de guitares tout à fait splendides. La suite n'est que confirmation de la virée "romantique" de cet album avec des tubes en puissance pour ados amoureux à la manière de "11 am". Mais Incubus ne sombre pas dans le ridicule, ce qu'il fait est incontestablement beau. Et le terme beau prend toute son ampleur avec "Mexico", duo guitare acoustique/voix magique, avec quelques incursions de cordes. Si on aime Incubus comme moi, on ne reste pas insensible à ces chansons caractéristiques d'une nouvelle dimension pour Incubus. Ces chansons sont intimistes, on sent une certaine quiétude, une ambiance paisible à l'image du recto du cd où la photo montre 5 musiciens regardant vers l'horizon, sans penser à quelque chose de spécial, juste vivre. "Warning", "Echo", titres acidulés pop rock mais pas FM US ! On ne sombre pas dans le ridicule avec Incubus, leur musique est trop intelligente pour ça. Evidemment, le single pop funky en puissance est bien là, ce coup ci, ça sera "Are you in ?", dans un esprit assez proche des Red Hot version Californication. Incubus a toujours été adepte des expériences funk et des instruments peu conventionnels dans le rock. "Aqueous transmission" sonne très musique orientale grâce à un instrument à corde traditionnelle, toujours avec ces jolies nappes de cordes en fond sonore.
Incubus, dans ce Morning view, a atteint son objectif ! Suivre ses envies sans se soucier vraiment ce que le public pourrait penser. A force de travailler avec son cœur, Incubus s'est découvert un talent pas forcement caché mais peut être plus en retrait dans ses différentes productions .. Après la fougue de la jeunesse, place maintenant à un nouveau dynamisme qui passe, paradoxalement, par des chansons plus posées. Un coup de maitre.