iliketrains_progress_reform.jpg Progress reform est-il un EP ou un LP ? Un peu des deux sans doute. Avec ces sept titres composant l'harmonieux premier effort de iliKETRAINS, la question mérite d'être posée mais si, d'un point de vue technique, il s'agit effectivement d'un EP, la réponse n'a au final que peu d'importance. Entre Sigur Ros pour les crescendo mélodiques stratosphériques, Radiohead pour le songwriting finement ciselé et Nick Cave ou Interpol pour la voix, le quintet anglais impressionne d'entrée de jeu avec le très beau "Terra nova". Guitares intemporelles, timbre grave et puissant, rythmiques à l'unisson, iliKETRAINS nous emmène dans un voyage à travers quelques moments d'Histoire qui ont marqué le groupe.
Ainsi l'expédition du capitaine Robert Falcon Scott, parti explorer le continent Antartique en 1910 et qui se termine dramatiquement par la mort tragique de tout son équipage en 1912, est évoquée avec un "Terra nova" émotionnellement particulièrement intense. Par la suite, "A rook house for Bobby" raconte le destin de Booby Fischer, champion du monde d'échecs entre 1972 et 1975 qui triompha du phénomène russe Boris Spassky au cours d'une partie homérique se déroulant en pleine Guerre Froide, quand "The beeching report" aborde la réforme du système ferroviaire anglais qui, après les fermetures successives des plus petites lignes régionales, envoya bon nombre de cheminots au chômage puis à la rue... Un thème qui a particulièrement marqué le groupe, lui inspirant son propre nom mais également ses costumes de scène (voir la biographie du groupe).
Musicalement, iliKETRAINS maîtrise son sujet comme trop peu savent le faire aujourd'hui. Des compositions aux mélodies douces amer, des crescendo de guitares sous haute tension dramatique, des cordes et claviers qui se mêlent aux riffs puissants et incisifs dans des éruptions post-rock/ shoegaze épiques et entêtantes ("Stainless steel"). Un lyrisme sombre et passionné qui pourra évoquer leurs compatriotes de I Love you but I've chosen darkness, des paysages musicaux brumeux bercés par des cordes renvoyant aux canadiens de Godspeed You! Black Emperor ("Accident"), le tout pour quelques compositions addictives à souhait, Progress reform regorge de pépites post-rock et peu importe de savoir s'il s'agit d'un EP ou d'un véritable LP. Car malgré son format un peu court, ce disque est en premier essai à l'homogénéité étonnante, dont les 7 morceaux qui le composent sont autant de pièces formant un puzzle obsédant et ténébreux. Là où Interpol puis Editors ont érigé la pop-song post-punk tendant vers la new-wave au rang d'art avec des morceaux courts et à la noirceur étouffante, iliKETRAINS allonge ses compositions, les aére en élargissant son spectre, pour produire une musique qui nous prend aux trippes en s'insinuant dans notre âme...