Pour les furieuses et les furieux qui n'ont jamais eu vent d'ICSIS, il s'agit d'un acronyme mystérieux choisi pour une association musicale qui l'est tout autant. En tout cas ses membres, eux, sont bien connus et sa formation a bien évolué depuis leurs débuts en 2006. Il y a donc une dizaine d'année, le batteur de Poil puis plus tard d'Ukandanz, Guilhem Meier, rencontre la charmante Jessica Martin Maresco, chanteuse et musicienne pour Meï Teï Shô, Le Spang ! et Pili Coït. Rejoints progressivement pour former un sextet de jazz expérimental avec la pianiste et violoniste Alice Perret (Lunatic Toys, Keman Kiz), le saxophoniste Guillaume Perret, le guitariste Ben Richou (Djazia Satour) et le contrebassiste Brice Berrerd, ICSIS devient un trio en 2009, le duo originel accueillant Sylvain Lorens (Further Dimension, Buttshakers) à la guitare et à la basse. Un premier album nommé Fuckiss voit le jour en mars 2013 sur le label Dur Et Doux, et fait dériver le groupe vers du rock expérimental un tantinet noise influencé par Nirvana, PJ Harvey, Björk, Soundgarden, Ligeti et Igor Stravinsky. En juin 2016, le groupe annonce Pierre vide eau, un deuxième album marquant l'arrivée du guitariste de Ni, François Mignot, à la place de Sylvain.
ICSIS
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ICSIS / Chronique LP > Pierre vide eau
C'est donc sous la forme d'un trio remis à jour qu'ICSIS continue ses soubresauts sonores avec Pierre vide eau, soit près d'une heure d'un concept rock conté/chanté/crié en anglais et en chinois. Partant de la matière noire en poursuivant le cycle de la vie jusqu'à l'au-delà, cet opus est un voyage initiatique à travers le cosmos et les énergies. Bref, du gros nawak parfaitement corroboré par sa bande son. L'album, qui comporte huit plages, met l'accent sur l'importance de chaque étape du concept en étirant en longueur les titres (trois dépassent les huit minutes) pour laisser développer leurs humeurs à outrance. Car la liberté artistique totale reste le mot d'ordre des Lyonnais qui n'ont cure des conventions et qui ont trouvé un relais de choix avec le collectif Dur Et Doux qui abrite déjà des formations bien barrées comme Chromb!, Ni ou Poil. En parlant de ce dernier, même si le style n'a rien à voir avec celui de Poil, dont est issu Guilhem, il y a tout de même chez ICSIS quelques réminiscences du trio, surtout développées sur "Hŭ (Tigre)" et "Sgé (Serpent)" avec un travail extrêmement soigné des télescopages vocaux.
Inutile de chercher à savoir où va ICSIS dans sa quête, vous subirez juste les aléas de la progression de leurs excentricités rock, à moins de couper avant et de ne pas atteindre le final "Death", véritable ode à la neurasthénie de dix minutes permettant de se remettre de ses émotions après un trois-quarts d'heure de folie. La singularité de Pierre vide eau réside dans un tout commun, que ce soit dans le style et le jeu musical, dans la façon d'arranger et de composer ou dans les vocalises à trois. C'est la symbiose accomplie entre trois entités indisciplinées qui passent leur temps à déstructurer les structures. Le pire dans tout ça ? C'est que c'est tout bonnement jouissif !