Ginger Wildheart est un mec qui a bourlingué. Le bonhomme est dans la course depuis les années 80 avec notamment son groupe culte The Wildhearts. Depuis quelques années et la mise en sommeil du quatuor anglais,Ginger Wildheart s'exécute en solo sous multiples formes (et oui, c'est possible !). Multi instrumentiste et véritable stakhanoviste de la création, l'ami Ginger nous offre un peu de son temps pour répondre à nos quelques questions. Vous comprendrez pourquoi j'ai énormément de respect pour le bonhomme qui mérite le respect.
Ginger Wildheart
Salut Ginger ! Tout d'abord, merci beaucoup de consacrer un peu de ton temps pour répondre à cette interview ! Pour commencer et pour nos lecteurs qui auraient le mauvais goût de ne pas te connaître, peux-tu nous résumer ton background en quelques mots.
Je m'appelle Ginger Wildheart et je suis sagittaire : mi-homme mi-cheval, comme chacun le sait, ce qui me donne le droit de chier dans la rue sans me faire arrêter. J'aime manger, respirer et tous les autres phénomènes qui favorisent la vie. Je suis musicien professionnel depuis de nombreuses années, ce qui signifie que je suis riche. Je collectionne les larmes, je vue un culte à Satan et je déteste le bleu. En fait, le dernier truc est un mensonge.
Vous pouvez trouver tout le reste sur ma page Wikipedia, avec différents degrés d'exactitude...
2012 a été une année plus que prolifique : un triple album résolument éclectique mais toujours rock (555 %), un album noisy pop où tu joues de tous les instruments (Hey! Hello!) et deux disques rock and loud (Mutation : The Frankestein effect et Mutation : Error 500), (sans oublier les concerts et cette tournée avec Slash). Combien de temps t'ont pris tous ces projets ?
J'ai commencé à travailler sur le premier album Mutation : The Frankenstein effect, en janvier 2010 mais j'ai accompli la majeure partie du travail relatif à ces albums en 2011 et tout 2012. Actuellement, l'écris un nouvel album que j'espère commencer à enregistrer à la fin de l'été. J'ai du mal à m'arrêter de bouger, j'ai peur de mourir. Un peu comme les requins mais sans les multiples rangées de dents. Ah oui et je sais cligner des yeux aussi, je ne pense pas que les requins sachent le faire.
555% est en quelque sorte un tournant dans ta riche carrière car ce triple album a été financé par une souscription (pledge campaign) via Internet : comment t'es tu lancé dans cette aventure ? Quels étaient les risques « encourues » sachant que les morceaux étaient en boîte au moment du début de la campagne, n'est ce pas ? Tu as fait des émules, car Tod Kerms (bassiste de Slash, ndlr) a lui aussi utilisé ce réseau pour son album. Dis nous tout.
Aucune des chansons n'était préparée lorsque nous avons commencé la campagne de souscription pour 555%. Je n'avais rien que quelques idées et beaucoup de doutes sur le fait d'avoir vraiment besoin de 30 chansons. Et je n'étais absolument pas sûr d'atteindre les 100%.
Parfois, ça fait plaisir de se tromper et parfois c'est même carrément génial. Et cette sous-estimation fait partie de la deuxième catégorie, indubitablement.
Je suis content de voir des gens convaincus que c'est un bon modèle commercial. Je dois beaucoup à Pledge et si je peux inspirer d'autres personnes à recourir à Pledgemusic.com pour financer leurs albums, alors c'est un grand honneur pour moi.
Une question me turlupine mon cher Ginger, pourquoi « limiter » l'acquisition de tes projets Pledge en disque « physique » (cd, vinyle) aux souscripteurs, et ne pas permettre au public qui n'aurait pas participé à la souscription d'acquérir le disque « physique » une fois la campagne terminée ? plus d'un ont été frustrés !
En fait, nous essayons de canaliser le trafic vers nos projets Pledge. Nos campagnes comprennent de nombreuses exclusivités et une véritable implication. Nous avons l'intention de continuer d'élargir notre communauté. Si une personne rejoint la fête sur le tard, je suis sûr qu'elle pourra obtenir des exemplaires auprès des gens charmants qui composent notre petit clan (c'est pour ça que j'encourage les gens à acheter plusieurs exemplaires).
Nous sortons aussi des versions légèrement abrégées dans le commerce. Par exemple, 555% a donné l'album 100% qui contient les chansons choisies par les fans, le deuxième album Mutation, Error 500, sera disponible dans le commerce et Hey! Hello! va sortir au niveau international. En revanche, c'est important pour moi que les exclusivités restent disponibles uniquement pour ceux qui ont participé aux campagnes Pledge. Je te jure que c'est beaucoup plus sympa que d'acheter des albums sur iTunes ou sur Amazon.
Ce système de pledge est-il un bras d'honneur à l'industrie du disque ? Une façon de prouver à tous, artistes confirmés comme groupe en développement, qu'on peut se passer du circuit classique des maisons de disques pour sortir un disque qui ne restera pas dans l'anonymat ? Un ras le bol des requins des majors ? Penses-tu repasser un jour par les circuits classiques ?
Je ne suis même pas sûr d'avoir suffisamment à foutre de l'industrie du disque pour lui faire un bras d'honneur. J'essaye juste d'exister en dehors de leur domination générale et si je peux encourager quelques personnes à faire de même, c'est une énorme récompense. L'indépendance créative et musicale existe, et il y a des gens qui veulent travailler dur pour réussir par leurs propres moyens. Il y a aussi des musiciens paresseux à qui les accords avec les maisons de disques conviennent probablement mieux. C'est pour ça qu'il y aura toujours des labels. Moi, j'aime bien laver ma voiture moi-même, tu vois ?
Tu as gagné un prix lors du dernier Classic Rock Awards dans la rubrique Event of the year pour 555 %. Est-ce le public ou la profession de la musique qui a voté ? Es-tu adepte de ces récompenses, est-ce important pour toi ?
C'est très important pour moi parce que c'était le vote des lecteurs alors j'avais vraiment l'impression d'accepter cette récompense au nom des fans. Évidemment, je trouve ça décalé de recevoir une récompense pour une forme d'art qui regroupe habituellement des voyous et des rebelles mais les fêtes sont vraiment géniales alors ça ne m'ennuie pas trop d'accepter un prix et quelques verres gratos, puis de traîner avec des amis et des célébrités. C'est sans importance et c'est amusant, mais les vraies récompenses appartiennent aux personnes qui trouvent des remèdes contre les maladies ou qui travaillent sans relâche pour aider ceux qui ont eu moins de chance qu'elles. Deux activités qu'on n'associe pas habituellement aux groupes de rock.
J'ai écouté (en boucle) ces six disques, et j'en arrive à la conclusion que ça ne doit pas tourner bien rond chez toi : comment expliques-tu que tu sois aussi prolifique, que tu puisses écrire des bijoux power pop, des titres punk rock, enchainer avec des titres funky, et envoyer tout valser des bombes hardcore (les projets Mutation), avec pour dénominateur commun la mélodie et le « bon goût » ?
J'ai la chance d'aimer beaucoup de styles musicaux différents. C'est de là que me viennent mes styles changeants. En fait, je suis incapable de décider de ce que je veux être. Je pensais que j'aurais trouvé ma voie en grandissant mais aujourd'hui ça me semble improbable. Je suppose que je devrais être reconnaissant d'être une âme tourmentée qui aime tout, des ballades country au métal indus violent. Ça me plaît de ne pas savoir quel style aura mon prochain album alors même que je suis en train de l'écrire. Ça rend la vie plus intéressante.
Quelle est la journée type de Ginger Wildheart ? tu vis de la musique ? Tu as un boulot à côté ?
Ça dépend de ce que je fais. De toute évidence, quand je suis à la maison, ma vie est complètement différente de celle que je mène en tournée. En ce moment, je me prépare pour quelques concerts à NYC avec The Wildhearts alors je passe mes journées à m'entraîner dur, à manger sainement, à soulever des poids, à rester sobre avec quelques craquages de temps en temps. Je remplis aussi mon rôle de papa. Des choses très ordinaires pour tes lecteurs mais pour moi ce sont des plaisirs sains.
Ginger Wildheart
Te voilà parti avec Ginger Wildheart & Friends sur les routes d'Europe avec The Darkness, reformé il y a quelques mois, tu retrouves ce groupe avec qui The Wildhearts avaient tourné au milieu des années 2000, c'est une vieille amitié ?
Oui, j'adore ces mecs. C'est génial de les voir encore envoyer après tout ce qu'ils ont traversé la dernière fois que nous avons joué avec eux et ça m'a fait chaud au cœur qu'ils me demandent de reprendre la route avec eux. En tournée, ce sont des crèmes et en plus, j'étais super content de partir avec mon groupe solo, cette fois-ci. La dernière fois que nous avons tourné ensemble, j'étais avec The Wildhearts et c'était vraiment pourri. On ne s'amusait plus en tant que groupe alors je pense que cette tournée a précipité notre fin et celle de The Darkness. Ça fait plaisir de constater que des deux côtés, nous sommes plus forts que ça. Nous, on bouffe la merde que les autres groupes ont peur de renifler.
Ton website permet à tes fans de discuter avec toi et de te poser des questions, via Formspring, Tu es aussi assez présent sur Twitter. C'est important de garder un contact « permanent » avec ton public (bien que tu ne me retweete jamais, ah ah ah ) ?
Je pense que le fait d'être accessible pour ses fans est aussi important que le reste, y compris la musique, quand on fait ce métier. Ça ne veut pas dire que je doive retweeter tout ce que les gens me demandent, sinon ma Timeline serait pleine de retweets à propos de couples qui se marient ou d'anniversaires. Tu comprends que ça deviendrait vite mortellement chiant à lire. Non seulement je perdrais des tonnes de followers mais je finirais aussi par me suicider. Je retweete les trucs qui m'amusent et aussi quand ça concerne des événements caritatifs où les gens font preuve d'initiative et travaillent pour les autres de manière désintéressée. Il n'y a rien d'extraordinaire à fêter son anniversaire ou à croire que le mariage est une entreprise admirable. J'essaye juste de rester aussi intéressant qu'on peut l'être sur un réseau social.
Outre les sorties de Hey! Hello! et des projets Mutation, l'actualité, c'est aussi la reformation pour quelques dates au Royaume Uni (et à New York) de The Wildhearts pour célébrer les 20 ans du premier album du groupe. The Wildhearts ont également joué lors du traditionnel Ginger's Birthday à Londres en décembre dernier. Quels sont les projets en ce qui concerne le groupe : une « vraie » tournée est-elle envisagée, un nouvel album du groupe est-il dans les tuyaux ? Une reformation « durable et active » est-elle possible ? je veux tout savoir.
Je n'exclurai jamais la possibilité de refaire un album avec The Wildhearts un jour, ou même une tournée, mais pour l'instant ça ne colle pas avec mon travail actuel. Ces concerts d'anniversaire m'ont montré combien les gens nous aiment et ça me touche beaucoup. Ça nous touche tous.
Mais ça ne plairait à personne que je me force à écrire un nouvel album pour The Wildhearts, avec des chansons bâclées qui sonneraient faux. À commencer par moi. Je pense que c'est important d'être honnête et de faire honneur notre passé au lieu de l'utiliser juste pour se faire un peu plus de fric. En plus, quand tu fais quelque chose pour l'argent, ça ne marche jamais bien longtemps. Et moi, j'ai vraiment envie de durer longtemps.
Les tournées avec Slash et The Darkness auront permis au public français de te voir sur les planches deux fois en six mois. Tu te fais rare en France (j'ai toutefois pu te voir en 1996 à Nancy en première partie d'AC/DC !!!). Aimes tu notre beau pays ? Connais tu des groupes français qui te bottent ?
J'adore la France et j'espère VRAIMENT revenir cette année en tête d'affiche. Je sais que mon manager lit cette interview alors je suis sûr qu'il va faire de son mieux pour exaucer mon souhait. Hé hé.
Il n'y a pas beaucoup de groupes français que j'aime bien mais je trouvais Trust excellents, à l'époque. J'aime beaucoup Air et J'ADORE les films d'horreur français. Ces derniers temps, vous déchirez dans le genre gore. De mémoire, les meilleurs films d'horreurs sortis récemment sont français, par exemple Martyrs, Haute Tension, Frontière(s), Inside, Mutants, La Meute... enfin bref, ça ne s'arrête pas. Je pense que Martyrs est l'un des films d'horreur les plus importants depuis l'Exorciste, qui est incontestablement mon film préféré. Il y a des dizaines de films d'horreur français que j'adore. Vous faites bien le sang aussi. Bien sombre. Je pourrais parler des films d'horreur français pendant des jours entiers.
Outre la "promotion" de Hey! Hello! et Mutation, et la tournée européenne, quels sont tes prochains projets ? un nouveau disque en préparation, un nouveau projet artistique,. ?
Je suis en train d'écrire des trucs en ce moment même mais pendant que j'écris, je n'aime pas trop en parler. Les choses évoluent toutes seules, elles prennent forment et créent leur propre personnalité. Pour l'instant, je m'amuse juste avec l'argile.
Merci d'avoir répondu à ces questions. En espérant te revoir en France très vite ! Si tu as une dernière chose à dire, c'est le moment.
Je pense qu'on va se revoir dans pas trop longtemps.
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Merci à Ginger Wildheart et à Gav Mac Caughey pour le relais !